Billet du jour : la tentative de coup d’Etat des instances européennes

 Karine Bechet-Golovko pour Russiepolitics

Les réformes, qui se profilent en Europe sous couvert d’une plus grande « efficacité » et d’une plus grande « démocratie », préparent la fin officielle de la souveraineté des Etats, donc des Etats eux-mêmes, et la reprise en main du processus électoral, devenu beaucoup trop dangereux en période de crise politique profonde et de rupture consommée entre les élites nationales et les populations. Cela s’appelle un coup d’Etat, une tentative de prise définitive de pouvoir. Les pays européens sont à un tournant.

La conférence, initiée par Macron, de l’Avenir de l’Europe, soutenue par le Parlement européen, prépare rien moins qu’un coup d’Etat européen. Les Etats européens ont déjà très peu de pouvoir, mais l’enchaînement des crises covidiennes et ukrainiennes ont montré que cette peau de chagrin est encore beaucoup trop cossue. Les désaccords existent, les antinomies se crispent, le mythe de l’unité européenne s’effrite, la tendance est beaucoup trop dangereuse. 

Les intérêts nationaux se sont révélés antagonistes aux intérêts européens, défendus par les instances de l’UE, eux exclusivement atlantistes. Le masque est tombé avec la guerre en Ukraine, les déclarations toujours plus agressives des dirigeants européens, le jusqu’au boutisme anti-russe, contre l’intérêt de stabilité sur notre Continent, contre toute logique ont été le révélateur d’une réalité bien ancienne.

L’UE n’a pas le choix, elle joue sa peau. Elle doit monopoliser le champ de la décision politique, sans laisser la possibilité aux Etats récalcitrants à la dilution totale de pouvoir opposer des vetos, sur des questions idéologiquement aussi importantes que l’interdiction du gaz russe, du paiement du gaz russe à la Russie. Car retarder la mise en oeuvre de ces questions, retarde l’effondrement du système socio-économique européen et cela, manifestement, ne peut pas attendre. 

La dimension idéologique de cette volonté de réforme profonde des Traités fondateurs européens, soutenue par le Premier ministre italien, n’est pas même cachée : il faut remettre en cause l’unanimité pour pouvoir développer une politique extérieure commune à l’UE et ne pas être entravé dans l’adoption des sanctions contre la Russie. Puisque, manifestement, c’est à peu près à cela que se résume la politique extérieure de l’UE.

Différentes propositions ont donc été faites, mêmes soutenues par le Parlement européen, comme celle consistant à revenir sur le principe de l’unanimité. Or, c’est justement ce principe qui garantit la souveraineté des Etats dans ce système de l’UE, puisque seules les décisions pour lesquelles l’Etat donne son accord seront adoptées. Retirer à chaque Etat son droit de veto, c’est le soumettre à la volonté de la majorité, c’est lui retirer sa souveraineté. Or, un Etat qui n’est pas souverain n’est pas un Etat, c’est un territoire, avec une population, mais pour lesquels les décisions ne sont pas prises au niveau des instances nationales.

Dans la même logique de remise en cause des processus politiques, il est proposé de développer le vote à distance, dont l’absence de sécurité est manifestement un atout, et d’abaisser l’âge de vote à 16 ans, ce qui met à disposition une masse électorale politiquement immature, non confrontée à la réalité de la vie et totalement manipulable, après avoir été gavée aux slogans du monde global.

Institutionnellement, le Parlement européen demande à ce que ses pouvoirs soient augmentés d’un droit d’initiative législative (ce qui est la compétence exclusive de la Commission européenne) et veut se doter d’une certaine légitimité, notamment en ayant acté les listes transnationales, ce qui découpe les élections européennes de la dimension nationale.

Si les Etats européens se lancent dans une réforme aussi profonde des institutions européennes, ils se suicident et livrent le Continent européen à une organisation atlantiste, succursale régionale des mécanismes globaux de gouvernance. Cette réforme très ambitieuse veut utiliser les deux crises successives, instrumentalisées pour discréditer les pouvoirs nationaux, afin de faire accepter à une population désabusée, une mesure qu’elle ne pourrait en d’autres circonstances.

PS : Une intéressante publication de Volodine, le président de la Douma en Russie, qui revenant sur cette tentative de réforme, souligne que si les pays européens veulent préserver leur souveraineté, il ne leur reste plus qu’une seule voie – sortir de l’UE. – Mais en seront-ils seulement capables ? En tout cas, pas avec ces élites dirigeantes actuelles.

Karine Bechet Golovko

7 Commentaires

  1. C’est normal, les instances dirigeantes UE ont bien compris que certains pays membres vont mettre un véto sur des mesures anti-russes. Parfois même ils passent outre toutes les mesures, sans rien demander à personne. et c’est tant mieux.

    Pour ce qui est du vote des jeunes, la réflexion est juste. Ils n’auront de vue que ce que l’école leur apprend et côté endoctrinement, il n’y a pas mieux, hormis quelques bonnes pubs en 4X3 et à la télé. Et hop, le tour est joué !

    Quant au vote à distance, bien évidemment, on en connaît les astuces.

    Enfin, pour ce qui est du législatif, là, je trouverais normal que ce soit le parlement qui initie les lois vue qu’il est élu par les peuples. Comme le parlement français qui peut proposer des lois.

    • Biquette les prédateurs sont au pouvoir. Le parlement ne décide de rien, c’est une chambre d’enregistrement des « mesures » dictées par l’imposteur en chef, porte parole des vrais décideurs camouflés. Il faut virer toute cette engeance corrompue, malfaisante et inutile, payée pour nuire à la nation.

  2. Mais surtout, aux prochaines élections, il faudra vraiment faire le tri (pour qui ira voter) et ne pas oublier tous les parlementaires qui n’ont pas bronché, ont voté comme on leur a dit, faisant fi de la souffrance des peuples. *
    Idem pour les législatives françaises, bien sûr.
    * A moins que l’UE ait explosé d’ici-là. https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_yahoo.gif

    • Élections = illusion du choix. Ça ne change rien au programme qui a été décidé. Pourtant on l’a ce fichu programme et il faut être naïf pour ne pas en tenir compte, vu l’enchaînement des choses. Les gens sont coincés par le formatage qui leur fait accroire que d’eux dépend l’avenir. Mensonges, enfumage et tout le reste. Si la connerie était médaillée, il y en aurait un paquet qui seraient nominés..

      • la seule réponse possible à ce capharnaüm : la suppression pure et simple de tous les partis politiques qui ont largement démontré qu’ils ne savaient que diviser le Peuple. A-t-on réellement la volonté de déléguer nos pouvoirs à des gens qui ne pensent qu’à aux, au travers des volontés de leurs partis. Certes pour changer la donne, il faut que le Peuple s’assume et assume, lui-même son destin (c’est ce que je décris dans « réflexions d’un Gilet Jaune », le Peuple, seul artisan de son destin). Mais le veut-il réellement ?

        Journal de guerre N° 23 – https://wp.me/p4Im0Q-5wB – 21/04/2022 – La lourde responsabilité de la gauche, désunie au nom des in-égo, de la non-éviction de Mc’ron au premier tour et condamner le Peuple à une interdiction de voter : le choix entre deux tousaufismes n’étant nullement un choix, mais un suicide sociétal. Si tous les gens de gauche s’étaient donné la main, nous eussions eu Mélenchon-le Pen ! Adieu vos vaches-cochons-curées et haute cour, le Peuple jura mais, un peu tard qu’on ne le verrait plus

  3. Faut vraiment que tous ces dirigeants non élus soient pauvres en esprit pour nous enlever toutes formes de souveraineté et de décisions. Mais si nous ne pouvons même plus décider qui élire pour nous représenter, alors qu’ils continuent leur délire mégalomane tout seul, on ne les suivra pas, rien ne nous oblige à les suivre et d’autres solutions existent, si certaines veulent se soumettre c’est leur choix mais les plus courageux ont déjà dit non.

    Il n’y a que comme ça que nous reprendront notre pouvoir, en trouvant d’autres solutions, en nous unissant, en résistant à l’abus de pouvoir. L’avenir est au peuple courageux et non à une bande d’accro du pouvoir et du profit, qui décide de tout pour nous. Redevenons libre et souverain de notre vie comme on l’a toujours été et qu’ils arrêtent de croire qu’ils ont tout pouvoir sur nous !

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