Le paradoxe automobile

Entré en vigueur en janvier 2008, le principe du bonus-malus appliqué à l’automobile avait donc pour vocation de lutter contre les gaz à effet de serre, faisant suite au Grenelle de l’environnement de 2007. Seul critère retenu et toujours d’actualité en 2025, les émissions de CO2 déterminaient donc l’octroi d’un bonus ou le versement d’un malus. Dès 2016, le bonus avait quasiment disparu pour les voitures thermiques, le malus voyant lui sa progression s’effectuer rapidement pour atteindre aujourd’hui jusqu’à 70 000 euros dans le pire des cas. Un moyen dissuasif auquel s’ajoute aussi un malus au poids tout aussi pernicieux et qui ne concerne pas les très lourdes voitures électriques.

Évidemment, ce choix arbitraire, qui ne prend pas en compte les émissions de CO2 « du puits à la roue » car il pourrait voir un malus appliqué aux véhicules électriques, oublie les autres facteurs polluants. Mais le paradoxe est ailleurs et il s’appelle « vignette Crit’Air ». Un système prenant en compte la réponse aux normes environnementales des motorisations et qui exclu progressivement certains carburants.

Une vignette indispensable pour accéder à des ZFE concentrées dans plus en plus de villes et qui s’avèrent être un redoutable système discriminant et attaquant de plein fouet la liberté des citoyens. Je voyais il y a quelques jours une superbe Chevrolet Camaro dernière mouture, cachant sous son capot un beau V8 de près de 500 cv et sur son pare-brise une vignette Crit’Air 1 parce que carburant à l’essence et répondant aux normes euro 6 d.

Cette vignette prend en compte d’autres polluants que le CO2, en particulier le Nox et les particules fines aujourd’hui bien maîtrisées, en particulier et c’est cocasse, par les diesels récents. Mais cette jolie Chevrolet émet tout de même 318g de C02 par kilomètre et a donc le droit de rouler dans les ZFE, évidemment après que son heureux propriétaire se soit acquitté du prix de vente (plus de 100 000 euros et il faut la faire importer), du malus maxi de 70 000 euros et 5 600 euros pour le poids. Mais si vous possédez une Clio 3 dci d’avant 2010 qui vaut entre 2 et 5 000 euros qui émet 115g de CO2 au kilomètre, il ne vous reste qu’à prendre les transports en commun. Enfin, s’il y en a, s’ils sont à l’heure, s’ils sont en état et enfin, si les voyageurs ne vous détroussent pas en vous menaçant avec une machette.

J’imagine bien également que cet heureux propriétaire de Chevrolet n’aura aucun mal (enfin financièrement) à changer ou acheter en plus un véhicule électrique lorsque les Crit’Air 1 seront à leur tour exclues des ZFE. Ce sera sans doute un peu plus difficile pour le possesseur de notre Clio 3 qui devra engager près de 20 000 euros (23 500 – 4000 euros de bonus) pour une Citroën eC3, électrique parmi les plus accessibles. En lui souhaitant de ne pas avoir en plus l’outrecuidance de partir aux dates de vacances scolaires où son trajet pourrait prendre bien plus de temps que prévu comme ce week-end sur l’autoroute au retour vers Paris. Enfin, s’il lui reste de quoi partir ne serait-ce que quelques jours.

Les systèmes mis en place poussent à une adoption au pas de charge de l’électrique mais le mur de la réalité a une nouvelle fois rattrapé les « belles » idées. Voitures chères, autonomie trop juste, surtout pour les petits modèles, temps de charge longs (même si on essaie de nous faire croire que c’est presque aussi rapide qu’un plein d’essence ce qui est absurde à ce jour), disponibilité des bornes, accès à une charge à domicile, les freins restent nombreux. Et reste à savoir si le prix de charge à domicile restera longtemps aussi attractif. Enfin, cela nous confronte à une concurrence chinoise diabolique pour notre économie européenne et qui risque de donner du fil à retordre aux propriétaires lorsque la panne viendra.

Alors l’Europe veut dévoiler un nouveau plan, encore un, digne de la grande époque communiste en Russie, pour pousser les consommateurs là où ils ne veulent pas aller. Cette précipitation n’annonce rien de bon, comme à chaque fois mais une chose est sûre, vous serez toujours taxés à la fin, il faudra bien rembourser le financement de ce plan !

Sylvain Devaux

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A propos Sylvain Devaux

Universitaire de formation (Géographie et histoire), responsable d'archives après une carrière dans le tourisme, mais aussi correspondant de presse et ancien rédacteur en chef de la Robolution (Insolentiae).

3 Commentaires

  1. Soyons logiques jusqu’au bout. Tenons compte de TOUS les composants, et de leur impact sur leur capacité, à la fois à exister mais aussi à se renouveler.
    Déjà le bilan est plus que catastrophique, HURLANT de contradictions. Tout simplement un parc de voitures simplement électriques est IMPOSSIBLE. Fermez le ban, la chose est simplement impossible. Il faut comprendre.

  2. bonsoir,
    la voiture électrique ne peut que venir en complément surtout pour des trajets courts pour ceux qui sont en maison individuelle car en ville ce sera difficile pour les voitures qui stationnent dans la rue ;
    reste aussi le cout de ces véhicules, longévité des batteries, électronique embarqué …

  3. Les ZFE ont l’air de convenir vu que je n’ai pas entendu parler de soulèvements. Beaucoup y vont de leur petite vignette de la honte pour les …3, 4 et 5, et se pavanent avec les 1 et 2.
    Idem pour le périf à 50 km/h et maintenant les voies spéciales co-voiturage. Bien … pourquoi pas ? Quelle sera la prochaine contrainte ?
    Rien n’a de sens dans cette histoire, pas plus que n’en avaient les confinements, les attestations de sortie, les masques … Et chacun ou presque, d’obéir.
    Bon … https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_unsure.gif

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