La revanche des sans-dents ?

L’équilibre des forces a été quelque peu perturbé. Alors qu’Emmanuel Macron, enfermé dans sa tour d’ivoire, grisé par ses apparitions sur la scène internationale, se pensait intouchable, les législatives ont un peu remis les pendules à l’heure. Le bon peuple, s’il n’a pas osé placer Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen à la présidence, n’a pas voulu donner toutes les clés à notre Jupiter national. Sonnés, nombre de députés en place, et en marche, n’ont même pas vu le coup venir. Ils expliquent cette déculottée par ce qui serait un vote d’étiquette et non de personne ou de programme.

Il est vrai que dans les rangs du RN comme de feu la NUPES, nombre sont les élus issus de milieux modestes et qui ont, de ce fait, fait les titres de la presse. Ce serait donc la revanche des « sans-dents », des gilets jaunes, de ceux « qui ne sont rien ». Mais ne nous y trompons pas trop. D’abord parce que ces élus tout frais arrivés ont travaillé dur et sont engagés depuis un certain temps. Ensuite, et c’est plus grave, parce qu’ils risquent, non aguerris qu’ils sont (et cela n’a rien de péjoratif, bien au contraire), d’être sacrément déçus.

Les manœuvres ont commencé dès le lendemain des élections et les compromissions planent au-dessus de l’hémicycle. Sauront-ils résister à la pression ? Sauront-ils affirmer leurs convictions au-delà des consignes de vote ? C’est encore à voir mais ce serait effectivement une bonne chose au regard de l’effondrement du monde qui nous entoure. La belle œuvre européenne et la merveilleuse mondialisation ne résistent pas une seconde à la crise actuelle. Ce qui est censé nous protéger nous plonge dans le chaos et rien ne semble arrêter ce train fou.

Alors que notre industrie automobile est à la pointe, elle se fait démolir par le vote de la fin de la vente des voitures thermiques en 2035 pour une dépendance accrue aux pays d’Asie afin de s’attaquer à une pollution de CO2 estimée à 13%. L’Europe va par ailleurs signer un nouveau traité avec la Nouvelle Zélande pour permettre l’importation de viande et de produits laitiers alors même que nos agriculteurs sont en grande difficulté dans l’élevage et la production laitière et que ces importations vont accroître cette même pollution.

Oui, le challenge est colossal pour ces nouveaux entrants pleins d’espoir tant la machine infernale de la compromission et de la soumission est puissante. Je crains que ce ne soit qu’une bien petite épine dans le pied de ce monde économique tentaculaire et absurde qui gouverne pratiquement toute la planète. Une petite épine tout de même, peut-être un premier sursaut, les prémices d’un réveil. Il est plus que temps, avec ou sans dents.

Sylvain Devaux