« L’abandon de poste. La différence entre esclave et salarié c’est la liberté ultime du salarié qui est supprimée. Les syndicats muets ! ». L’édito de Charles SANNAT

Source Insolentiae

Mes chères impertinentes, chers impertinents,

J’aime la liberté, et l’abandon de poste est l’ultime liberté du salarié.

C’est l’abandon de poste qui différencie et matérialise en partie la limite entre salariat et esclavagisme.

Etre esclave c’est ne pas avoir la liberté de travailler pour un patron ou un autre. Vous devez attendre d’être « affranchi ».

Pouvoir abandonner son poste est une liberté essentielle, fondamentale et elle est directement, frontalement remise en cause par le gouvernement et c’est évidemment une attaque très grave sur le front des libertés, ici, spécifiquement sociales.

Un décret en mars pour ne plus verser d’indemnités chômage en cas d’abandon de poste. 

« En France, l’abandon de poste représente la majorité des licenciements pour faute grave des salariés du privé, et peut donner droit au chômage. Pour “réguler ce phénomène”, Olivier Dussopt, le ministre du Travail, a annoncé mercredi 22 février qu’un décret visant à mettre fin au versement des indemnités chômage en cas d’abandon de poste serait publié fin mars, rapporte RTL ».

On pourrait me dire, mais, Charles, vous qui êtes si proche des sous abandonner son poste ne doit pas se faire au détriment de l’argent des autres.

C’est vrai dans l’absolu, mais dans ce cas spécifique c’est très différent, car par définition celui qui abandonne son poste était en train de travailler, donc a priori, il ne refuse pas le travail et n’est pas un défenseur du droit à la paresse. Autre élément de réflexion, que ce soit un licenciement ou un abandon de poste, vos indemnités chômage sont liées à un minimum de temps de cotisation, donc là encore celui qui abandonne son poste ne le fait pas pour « profiter » du chômage au bout de 15 jours de collaboration.

Enfin, autre élément de réflexion, la volumétrie. Est-ce que les « gens » exagèrent vraiment avec l’arme de la liberté et de l’abandon de poste ?

Nous avons plus de 3 millions de chômeurs chez Pôle Emploi suite notamment aux licenciements des entreprises qui chaque année représentent environ 1 million de nouveaux chômeurs.

Nous avons également pas loin de 2 millions de démissions par an de la part des salariés dans les « bonnes » années.

Les abandons de postes ? 500 000 par an ! 

D’après une étude de la Direction de l’animation de la Recherche des études et des statistiques (Dares), au premier trimestre 2022, 123 000 salariés du secteur privé, dont 116 000 en CDI ont quitté leur poste sans avoir prévenu ou obtenu l’autorisation de leur employeur. Les secteurs les plus touchés sont le transport et l’entreposage, avec 41 000 abandons de CDI en seulement six mois.

43 % ouvrent des droits au chômage

Si l’abandon de poste est considéré comme un motif de licenciement pour faute grave, il permet cependant d’ouvrir un droit à l’assurance chômage. En effet, la Dares estime que 55 % des salariés ayant abandonné leur poste se sont inscrits à Pôle emploi dans les trois mois qui ont suivi leur décision.

Toujours selon cette étude, 43 % ont ouvert des droits à l’assurance-chômage en vue d’obtenir une indemnisation. C’est cette possibilité d’indemnisation que l’article 4 de la réforme de l’assurance chômage de décembre 2022 souhaite modifier. En effet, d’après le texte, les employés qui abandonnent leur poste seraient alors considérés comme démissionnaires et ne pourraient donc plus exercer leur droit à l’assurance chômage. Le décret d’application de cet article devrait intervenir d’ici à la fin du mois de mars.

D’ailleurs quand on détaille l’étude de la DARES, l’organisme public indique même que « Les individus abandonnant leur CDI ont moins recours à l’assurance chômage que ceux mettant fin à leur CDI par une rupture conventionnelle : parmi ces derniers, les proportions d’inscription à Pôle emploi et d’ouverture de droit sont respectivement de 73 % et 60 %. »

En clair, tous ceux qui « bénéficient » d’une rupture conventionnelle avec l’accord de l’employeur donc, sont nettement plus nombreux à se faire indemniser par Pôle Emploi que ceux qui abandonnent leurs postes.

Ce n’est donc en aucun cas un sujet financier ici.

Nous avons à faire à une question d’obéissance. 

Nous avons à faire à une question de soumission à l’employeur.

Nous avons à faire à un retour de ce qu’il y a de pire dans une « collaboration », à savoir le travail qui se transforme en prison, en obligation, en soumission.

Il peut y avoir des comportements de la part de « patrons » de « chefs » de « managers » qui sont intolérables et inacceptables et ou l’abandon de poste dans la seconde est le seul recours possible et envisageable.

Cela va de l’insulte ou de la violence physique ou verbale, à la sécurité physique du salarié, ou à l’ordre illégal, sans oublier bien évidemment dans le cas des dames, quelques avances un peu trop appuyées. Le droit à l’abandon de poste est ce qui différencie aussi l’esclavage du salariat.

Passer par un décret, sans débat et sans réflexion autour de ce sujet n’est pas une erreur. Cela démontre parfaitement la volonté de certains puissants de contraindre les salariés.

Bien évidemment la femme harcelée sexuellement pourra toujours partir, elle est libre n’est-ce pas, mais sans indemnités chômage. Ce n’est pas franchement un progrès social mais bien une régression majeure dont bien peu comprennent la gravité, la portée philosophique et la dangerosité pour les salariés.

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu.

Préparez-vous !

Charles SANNAT

Articles récents

Volti

9 Commentaires

  1. Vu la faune qui sévit sur les M.E, ce sujet écrit par Mr Sannat va stimuler certains pourfendeurs idéologues.https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_cool.gif

  2. ” Un décret en mars…”

    TOUTES les dérives vers une dictature, prises en MARS…
    sont des dérives OCCULTES!

    Mars est la période par Excellence pour débuter des pratiques Occultes!

  3. Moi ça me semble plutôt logique.
    Quand on prend un engagement on le respecte. Dans les deux sens.

    Le préavis est fait pour s’en aller de façon propre et respectueuse.

    Pensez aux petits indépendants qui engagent une ou deux personnes. Et que tout leur travail peut être bousillé par ce type de comportement sauvage. On ne remplace pas quelqu’un du jour au lendemain dans beaucoup d’emplois.
    Et dans le même créneau, un certificat médical ça se prend quand on est malade, pas pour prendre des vacances sur le dos des autres.

    • Tu cherches à partir “de façon propre et respectueuse” quand toi-même tu es respecté. S’il s’agit simplement de sauver ta peau, tu te barres, c’est tout.
      Là encore, il faut nuancer. Je te rejoins quand il s’agit de “j’en foutre”.
      Quelles proportions des uns et des autres ? Aucune idée.

    • “Le préavis est fait pour s’en aller de façon propre et respectueuse. ”

      Dans les deux sens comme tu dis, on s’en va de façon respectueuse quand ton patron te traite de façon respectueuse…

      L’effet pervers de cette mesure, c’est qu’il existe d’autres façons de quitter un emploi sans l’abandonner. Etre licencié pour faute grave ou lourde ne prive pas des droits au chômage. Mais ça fait perdre l’indemnité de licenciement et l’indemnité de préavis.

      Du coup, quitte à perdre ses indemnités, le salarié qui voudra abandonner son poste de manière détournée aura 2 options. Soit obtenir un licenciement à l’amiable avec son patron pour préserver ses indemnités, soit pourrir l’entreprise pour lui faire payer l’absence d’indemnité, la faute lourde (faute d’une particulière gravité, révélant une intention de nuire à l’employeur) ne privant pas du droit à l’ARE.

      J’suis pas patron, mais à choisir, je préfèrerai un employé qui se barre du jour au lendemain plutôt qu’un employé qui pourrit la boite jusqu’à ce qu’il se fasse virer. Parce que la nuisance volontaire, ça peut couter vachement plus cher à l’entreprise que des indemnités…
      Par contre, je suis employé,et si mon patron peut être certain d’une chose, c’est que si il me pèle le jonc à vouloir m’empêcher de partir si je le veux, et à tout faire pour ne pas me payer d’indemnités, il peut être certain que je vais tout faire aussi pour foutre un bordel incroyable avant de me faire lourder.

  4. Et le droit de grève ? Des patrons roublards ne vont-ils pas transformer cela en abandon de poste ?

  5. Si je comprends bien, actuellement les employeurs ont le droit de résilier leurs contrats d’embauche et de licencier des milliers d’employés pour gagner davantage , c’est moralement acceptable . Par contre , dès le mois de mars, si un employé mécontent résilie son contrat de travail et se barre , c’est très mal et il doit être sanctionné en n’ayant pas droit au chômage . Deux poids, deux mesures , c’est la loi du plus fort , la loi du plus riche .

Les commentaires sont clos.