La principale lutte en Ukraine se déroule pour le pouvoir

Par Elsa Boilly pour Observateur-Continental

Kiev se rapproche du cycle électoral, des élections présidentielle et législatives. Le système de majorité unique établi par le président ukrainien Volodymyr Zelensky au sein de la Rada (parlement ukrainien) ainsi que son régime dans son ensemble doivent passer l’épreuve des élections. 

Zelensky y est réticent. Par conséquent, aussi étrange que cela puisse paraître, les questions de guerre (livraisons d’armes, mobilisation, etc.) passent au second plan et deviennent un moyen de mettre en œuvre la politique de Zelensky pour conserver le pouvoir. 

Zelensky est poussé à organiser les élections pour deux raisons:

1. L’échec de la contre-offensive et la réduction des livraisons d’armes.

2. La nécessité d’imiter la démocratie en Ukraine. 

Pour le premier point, tout est clair avec la contre-offensive, mais tout n’est pas clair avec les livraisons d’armes. Il y aura des livraisons, aucun doute là-dessus, cependant, les capacités militaires des forces armées ukrainiennes dépendront de leur quantité et leur composition (munitions, défense aérienne, missiles, avions, chars et/ou autres types d’armes). 

Kiev a besoin de tous les types d’armements, mais actuellement, l’Occident soit en éprouve un déficit et a l’intention de réorienter les armes et munitions vers Israël, soit une incertitude quant aux perspectives, comme dans le cas des chasseurs F-16. L’Ukraine a besoin d’avions, car le parc du matériel aéronautique hérité de l’ère soviétique diminue chaque jour, et Kiev a besoin de porteurs de missiles à longue portée, sur lesquels il mise. Cependant, compte tenu de la supériorité aérienne et de la défense aérienne de la Russie, la durée de vie des chasseurs américains ne sera pas plus longue que celle des vestiges de la technologie soviétique. Parmi les chars, il ne reste en Europe que des Leopard 1 obsolètes. Les Abrams américains pourraient aider, car les États-Unis en ont suffisamment, d’autant plus qu’il y a un désir de renouveler leur parc, en transférant des chars d’occasion à l’Ukraine. 

Pour le deuxième point, l’imitation de la démocratie. La situation des élections ukrainiennes évolue sur fond de crise d’efficacité de l’institution électorale et de légitimité. 

Si l’Ukraine se voit ordonner de tenir des élections, alors l’issue est évidente pour Zelensky, mais il existe plusieurs possibilités quant à savoir qui sera élu à sa place. Les opinions publiques et les stéréotypes comportementaux de l’élite ukrainienne permettent de modéliser les options de vote à l’élection présidentielle. Parmi les candidats susceptibles de participer à une véritable lutte politique: le président Zelensky lui-même, le commandant en chef des forces armées ukrainiennes Valeri Zaloujny, et l’ancien conseiller du chef de l’administration présidentielle ukrainienne Oleksiï Arestovitch. 

Ce dernier a déjà des sponsors, il n’y a aucun doute à cela, car les oligarques ukrainiens restants ont l’habitude de parier sur plusieurs candidats à la fois. Les idées du programme publié sur les réseaux sociaux d’Arestovitch correspondent au programme pré-électoral sous forme de publications de Zaloujny dans The Economist. Cependant, on se souvient encore de l’histoire récente de la victoire de Zelensky, qui a remporté les élections grâce à l’opinion des électeurs et l’argent de Kolomoïski, alors que ni les ressources administratives ni l’argent n’avaient aidé Petro Porochenko à l’époque. 

Mais maintenant, l’opinion publique est caractérisée par une fatigue évidente de la société ukrainienne de la guerre, ce qui pourrait conduire à ce que les électeurs ne votent probablement pas pour Zelensky, qui n’est plus « le président de la guerre », et n’est plus depuis longtemps « le président de la paix ». 

Ceux qui veulent la poursuite du conflit et de la guerre voteront pour Zaloujny, juste pour que les contre-offensives viennent plus tard, et en attendant, il y aura des livraisons d’armes. Mais rappelons-nous de la fatigue de la société à cause du processus de mobilisation sans fin et des pertes humaines. C’est là que l’inconscient collectif peut jouer son rôle, et les gens voteront pour les discours du manipulateur flagrant Arestovitch, qui a choisi de plonger la société dans une séance de psychanalyse et des illusions positives. Dans tous les cas, le destin de l’Ukraine est prédéterminé, c’est de combattre la Russie, aujourd’hui ou demain, demain ou après-demain. 

La tragédie de Zelensky est qu’il n’est toujours pas sûr et ne sait pas ce qu’on attendra de lui et ce qu’on fera de lui, les États-Unis l’enverront-ils à des élections au résultat inconnu pour lui, ou sont-ils prêts à fermer les yeux sur l’inconsistance de sa légitimité en cas d’annulation des élections. Washington ne semble pas non plus avoir une réponse claire à cette question, et au cas où les États-Unis n’excluent aucun scénario. Par conséquent, l’option d’annuler les élections en Ukraine avec la bénédiction de l’Occident est tout aussi réelle que les autres.

Elsa Boilly

Source Observateur-Continental

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