L’apartheid de l’eau en Palestine

Par Nancy Murray pour Mondoweiss via Mondialisation.ca

Pour illustration

Le livre de James Fergusson nous fait découvrir l’hydropolitique de la domination israélienne sur les ressources en eau palestiniennes, de la Cisjordanie à Gaza, en passant par la Palestine de 1948.

IN SEARCH OF THE RIVER JORDAN
L’histoire de la Palestine, d’Israël et de la lutte pour l’eau
par James Fergusson
293 p. Yale University Press, New Haven/Londres (2023), $30.

James Fergusson, journaliste et auteur britannique de renom, titulaire d’une maîtrise en hydrogéologie, sait comment raconter une histoire et tisser un récit captivant en s’appuyant sur les voix du terrain. In Search of the River Jordan, son septième livre, est une enquête sur l’inégalité de l’eau en Israël-Palestine, écrite dans le style d’un récit de voyage souvent passionnant.

Avant d’entreprendre ses voyages à travers la bande de Gaza, la Cisjordanie, Jérusalem, les hauteurs du Golan riches en eau (convoitées par les sionistes depuis le début du XXe siècle) et l’État d’Israël de 1948, qui se déroulent en plusieurs étapes dans une période de trois ans, il est pleinement conscient de la « disparité flagrante de l’accès à l’eau ».

En effet, les Israéliens disposent en moyenne de 240 litres d’eau douce par habitant et par jour, tandis que les Palestiniens disposent en moyenne de 72 litres par habitant, ce qui, dans certaines régions, ne représente que 25 litres par jour (bien en deçà du minimum de 50 à 100 litres requis par l’OMS pour garantir la satisfaction des besoins fondamentaux).

Comment en est-on arrivé à ce point ? Et quelles sont, se demande Fergusson, « les perspectives de rétablir un semblant d’égalité dans l’accès à l’eau » ?

La source d’Al-Matwa – du village de Salfit – est polluée par les colonies israéliennes environnantes. La source était autrefois une destination populaire pour les habitants palestiniens de la région, qui y randonnaient ou pique-niquaient en famille le long du ruisseau alors limpide. Aujourd’hui, les eaux usées qui s’écoulent de la source, l’odeur nauséabonde qui imprègne la vallée et les moustiques qui y pullulent ont rendu la vallée largement déserte – Photo : Jaclynn Ashly/Al Jazeera

Fergusson déclare d’emblée : « Ce livre n’est pas une énième dénonciation d’inspiration libérale du sionisme ». Arrière-arrière-petit-neveu d’Arthur Balfour, le ministre britannique des affaires étrangères qui, en 1917, a promis aux Juifs un « foyer national » en Palestine, il ne cache pas les liens qu’il a longtemps entretenus avec Israël et cherche à comprendre pourquoi « les Palestiniens, ainsi que leurs soutiens à l’étranger, accusent Israël de ‘militariser’ l’eau », alors que “les Israéliens nient le fait ».

Que trouve-t-il ?

Il est contraint d’admettre que « dans de nombreux endroits, l’eau semblait effectivement avoir été militarisée », comme l’accusent les critiques.

Oui, la technologie de l’eau d’Israël est « véritablement impressionnante ». Mais « la réussite d’Israël a été fondée sur plusieurs décennies d’oppression de ses voisins. Un peuple a été cruellement déplacé et ses terres expropriées, de même que ses rivières et les eaux souterraines sous ses pieds, une accumulation de ressources qui a rendu possible le surplus d’eau actuel d’Israël et sans laquelle la révolution technologique de l’eau n’aurait jamais eu lieu ».

Tout au long du livre, ce qu’il appelle sa prédisposition à l’égard d’Israël semble considérablement se dégonfler. Si, comme il l’écrit, « l’espoir de Balfour – sa compréhension – était que la terre, ainsi que ses ressources, seraient équitablement partagées dans un esprit de respect mutuel entre voisins », les faits sur le terrain montrent un résultat absolument différent.

Lorsque Fergusson vfinit par retrouver le monument vandalisé de Blanche « Baffy » Dugdale, son arrière-grand-mère sioniste – nièce de Balfour et sa biographe – que Ben-Gourion avait comparée à la Déborah biblique, il y voit « un signe de la dérive du projet sioniste » et admet que « l’Israël moderne m’inquiète certainement ».

Et cela devrait troubler les lecteurs de ce livre très instructif qui auraient pu être attirés par son assurance qu’il ne s’agissait pas d’une « polémique libérale ».

Gaza : la pire crise de l’eau de la région

Son récit commence par sa visite dans la bande de Gaza en 2018-19, qui, écrit-il, ressemble à un « camp de prisonniers » et à une « catastrophe en gestation ». Il passe une semaine à s’entretenir avec des hydrologues, des responsables municipaux et des habitants, notamment des femmes qui passent les deux tiers de leur temps à chercher un accès à l’eau lorsque, comme pendant la période où il se trouve sur place, l’électricité est limitée à quatre heures par jour.

Son guide, Ahmad Yaqubi, ingénieur hydrologue et ancien directeur général de l’Autorité palestinienne de l’eau, l’emmène voir « une zone de catastrophe environnementale » où les eaux usées se déversent sur les plages parce qu’il n’y a ni électricité ni carburant pour faire fonctionner les stations d’épuration. …/…

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Nancy Murray

Article original :  Mondoweiss 23 juillet 2023 –

Traduction : Chronique de Palestine

*

Nancy Murray est membre de l’Alliance for Water Justice in Palestine et milite pour la paix et la justice au Moyen-Orient depuis 1988, date de sa première visite en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

La source originale de cet article est Mondoweiss

Copyright © Nancy Murray, Mondoweiss, 2023

Volti

Un Commentaire

  1. Les Nazis n’ont cessé de perfectionner leurs camps de concentration depuis 1945.
    Pourquoi Amnesty parle d’apartheid en Israël ?
    https://www.amnesty.be/campagne/apartheid-israelien/israel-palestine-apartheid
    Yasser Arafat nous disait, à propos des négociations avec les dirigeants israéliens, du temps où les accords d’Oslo étaient encore de ce monde : « Ce qui est extraordinaire avec eux, c’est qu’ils vous volent votre voiture et après ils vous proposent de discuter pour vous vendre une roue. » C’était l’époque où Ariel Sharon disait aux jeunes aspirants colons : « Prenez les collines et contrôlez les sources. »
    https://www.humanite.fr/monde/palestine/israel-palestine-lapartheid-de-leau-582975
    L’occupation des territoires palestiniens depuis 50 ans par Israël engendre des violations des droits humains systématiques à grande échelle. L’une de ses conséquences les plus dévastatrices est l’impact des politiques israéliennes discriminatoires sur l’accès des Palestiniens à un approvisionnement adapté en eau potable.
    https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/2017/11/the-occupation-of-water/

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