Je vous en ai parlé ICI et Christelle nous donne les détails de cette « mascarade ». Il y a un deux poids deux mesures, quant à la reconnaissance du droit des peuples à l’auto-détermination. Avec le risque que ça mette un peu plus d’huile sur le brasier ukrainien. Partagez ! Volti
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Christelle Néant pour Donbass Insider
Hier, 30 octobre 2018, a eu lieu à l’ONU une réunion du Conseil de Sécurité concernant les élections qui doivent avoir lieu dans le Donbass le 11 novembre 2018. La réunion demandée par les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Suède, les Pays-Bas et la Pologne a été une parfaite démonstration du double standard appliqué par l’Occident en matière de politique internationale, transformant cette session en véritable mascarade.
Et si l’Occident s’affole autant devant ces élections, c’est que ces dernières font surtout paniquer Kiev. Les autorités ukrainiennes craignent une nouvelle démonstration de soutien aux autorités des Républiques Populaires de Donetsk et de Lougansk (RPD et RPL) lors de ces élections, comme lors du référendum de 2014 qui avait avalisé la création des deux jeunes républiques.
Kiev a peur que la réalité et les faits ne viennent troubler sa jolie propagande bien huilée « d’occupant russe », jetant à terre le château de cartes qu’est devenue l’Ukraine. Alors Kiev menace, arguant que ces élections vont à l’encontre des accords de Minsk (ce qui justifierait une reprise à grande échelle du conflit par l’Ukraine), une litanie reprise en cœur par les représentants occidentaux lors de ce Conseil de Sécurité de l’ONU. Mais une litanie qui fait fi de la réalité.
Car les points 4, 9 et 12 des accords de Minsk, parlent clairement et sans ambiguïté aucune des élections locales, c’est-à-dire des élections municipales, qui elles sont toujours post-posées ad vitam æternam à cause du fait que Kiev n’a jamais appliqué les points des accords de Minsk qui doivent permettre à ces élections d’avoir lieu.
La RPD et la RPL, de leur côté, ont respecté les accords de Minsk en post-posant ces élections, et en organisant une simple « répétition » de ces dernières en octobre 2016 (le vote de 2016 avait d’ailleurs été délibérément nommé « primaires » et pas « élections »).
Mais là il ne s’agit en aucun cas d’élections locales, il s’agit d’élire les chefs d’État et les députés des deux républiques populaires. Cela n’a strictement rien à voir. Quand Kiev et ses patrons occidentaux, hurlent à l’ONU que ces élections violent les accords de Minsk, au mieux cela montre qu’ils n’ont pas lu le texte en question (ce qui semble douteux pour la France et l’Ukraine, vu qu’ils ont signé le dit document), et au pire qu’ils font là preuve de la malhonnêteté la plus crasse.
Une malhonnêteté prouvée par le refus de permettre à la présidente de la Commission Électorale Centrale de la RPL, Elena Kravtchenko, de venir représenter les républiques lors de ces discussions. Discuter du Donbass à l’ONU est une chose, en discuter avec les principaux concernés semble en être une autre dans cette organisation pourtant censée favoriser le dialogue pour éviter les guerres !
Ce refus de permettre aux deux républiques populaires d’être représentées a reposé sur l’argument fallacieux que madame Kravtchenko ne représentait pas un gouvernement mais « une entité séparatiste illégale », et que cela créerait un dangereux précédent. Le tout, en insistant pour que les accords de Minsk soient appliqués.
Est-ce que ces gens à l’ONU se rendent compte du degré de stupidité et d’illogisme de leurs paroles (sans même parler de leurs actes) ? N’ont-ils réellement pas lu, ou font-ils semblant de ne pas avoir lu ces mêmes accords de Minsk ?
Parce qu’il faut être aveugle ou d’un niveau d’hypocrisie sans bornes, pour ne pas voir ou se rappeler, que ces accords ont été signés par les chefs de la RPD et de la RPL, et que ces accords impliquent un dialogue direct entre Kiev et les deux républiques populaires ! Dialogue auquel Kiev s’est toujours refusé, justement sous le prétexte de ne pas légitimer les deux républiques.
Mais si l’ONU décrète que ces entités sont illégales, alors les accords de Minsk, qu’elles ont signés, le sont aussi ! Fin de l’histoire. Et c’est là que toute la propagande occidentalo-kiévienne se casse la figure après s’être pris les pieds dans le tapis. Car un accord ne peut être légal que si les signataires ont l’autorité légale pour le faire.
De plus, l’argument mis en avant par les occidentaux à l’ONU pour refuser que madame Kravtchenko puisse s’exprimer, revient à nier que la RPD et la RPL rentrent pleinement dans la définition d’un État souverain de jure.
Cette théorie déclarative veut qu’un État pour être considéré comme tel au regard du droit international doit avoir :
1) un territoire défini ;
2) une population permanente ;
3) un gouvernement ; et
4) une capacité à entrer en relation avec d’autres États.
Or la RPD et la RPL ont un territoire défini, une population permanente, un gouvernement, et ont prouvé leur capacité à entrer en relation avec d’autres États, via les accords signés avec l’Ossétie du Sud, la création prochaine d’ambassades respectives, la création de centres représentatifs en Europe, et la participation au comité d’intégration Russie-Donbass.
Donc, déclarer que madame Kravtchenko ne représente pas un gouvernement mais une entité séparatiste illégale, est un énorme mensonge. Que les Occidentaux ne reconnaissent pas les gouvernements des deux républiques est une chose, mais ils existent de facto et ils fonctionnent. Nier leur légalité n’y changera rien. La RPD et la RPL sont des États souverains de jure.
Quant au côté séparatiste, il est bon de rappeler que l’ONU ne s’offusque des sécessions que lorsqu’elles ne vont pas dans l’intérêt des États-Unis. Quand cette sécession va dans leur intérêt (comme dans le cas du Kosovo), là bizarrement les référendums sont reconnus et personne ne hurle au séparatisme illégal dans le camp occidental.
Ce double standard et le côté complètement ubuesque de cette réunion, ont été soulignés par les chefs de la RPD et de la RPL, ainsi que par les ministres des Affaires étrangères des deux républiques.
Ainsi, Denis Pouchiline, chef de la RPD par intérim a souligné qu’il n’était pas normal de discuter des élections dans le Donbass sans que les deux républiques ne soient représentées, vu que ce sujet les concerne directement. Il a aussi souligné que l’offuscation de l’Occident ne marche que lorsque les républiques populaires font quelque chose qui ne lui convient pas, et que lorsque Kiev tire sur des civils, des ambulances, etc, là l’ONU est d’un silence de mort….
« Le fait que les élections du chef de l’État et du parlement dans le Donbass soient discutées à un niveau aussi élevé que le Conseil de sécurité de l’ONU, convoqué par les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Suède, les Pays-Bas et la Pologne, mais en l’absence des représentants de la RPD et de la RPL, sème la confusion. Je ne comprends pas pourquoi ces pays n’organisent pas de réunions du Conseil de sécurité lorsque des habitants innocents du Donbass meurent sous les bombardements ukrainiens, lorsque l’Ukraine étrangle le Donbass avec des blocus et fait tout pour faire échouer les accords de Minsk, empêchant le désengagement des forces et du matériel, sabotant l’échange de prisonniers, ne mettant pas en œuvre le volet politique des accords de Minsk.
Il n’y a pas de réaction de l’Occident quand ces choses arrivent. Après tout, lorsque les saboteurs des services de sécurité ukrainiens ont assassiné brutalement le chef de la RPD Alexandre Zakhartchenko, aucun d’entre eux ou d’autres pays occidentaux n’a exprimé de regrets ; ils ne vont pas discuter de l’effet de ce meurtre sur le règlement de paix », a déclaré Denis Pouchiline.Le chef de l’État par intérim a aussi tenu à rappeler que si ces élections sont organisées, c’est par la faute de l’Ukraine, qui, en assassinant Alexandre Zakhartchenko, a créé un vide sur le plan légal, que ces élections doivent maintenant combler.
« Après que des agents des services de sécurité ukrainiens ont mené l’attentat terroriste qui a tué Zakhartchenko, la République a été confrontée à un problème de fin anticipée du mandat du chef de l’État. Nous ne pouvions tout simplement pas permettre la vacance du pouvoir. Pour assurer la continuité de la gouvernance de l’État, nous avons programmé les élections du chef de l’État et du parlement », a souligné le chef de l’État par intérim.
Denis Pouchiline s’est aussi exprimé sur ce qu’il pense de la méthode employée par l’ONU.
« Le Conseil de sécurité a prévu de discuter des élections dans le Donbass sans les représentants de la RPD et de la RPL, ce qui est pour le moins incorrect et non objectif », a-t-il ajouté.
Léonid Passetchnik, chef de la RPL par intérim, a exprimé une position très proche de son homologue de Donetsk, en soulignant que l’Occident s’arroge le droit de décider pour les autres pays.
« Les membres du Conseil de sécurité de l’ONU réunis aujourd’hui ont discuté de la légitimité des élections dans le Donbass. Mais ils n’ont pas pris la peine d’inviter des représentants du Donbass. Ainsi, nous voyons à nouveau la position hypocrite de l’Occident qui consiste à décider pour les autres. La discussion du Conseil de sécurité sur les élections du 11 novembre dans le Donbass est absurde en l’absence des représentants de la RPL et de la RPD.
Je rappelle à mes homologues occidentaux que les habitants du Donbass ont fait leur choix par eux-mêmes en 2014 et sont prêts à le reconduire le 11 novembre prochain. Nous sommes tout à fait prêts à organiser les élections légitimes qui doivent avoir lieu conformément à la Constitution et à nos lois, ce qui ne constitue pas une violation des accords de Minsk. Le paquet de mesures ne prévoit que des élections locales. Les articles 4, 9 et 12 stipulent que les modalités des élections locales (municipales) doivent être coordonnées par Kiev et le Donbass. Le Donbass n’a pas organisé de telles élections et n’a pas de plans en ce sens », a déclaré Léonid Passetchnik.Vladislav Deinego, ministre des Affaires étrangères de la RPL, s’est lui aussi exprimé sur le double standard appliqué par l’ONU.
« La réunion du Conseil de sécurité de l’ONU a examiné la légitimité des élections dans le Donbass en l’absence des représentants du Donbass. Cela va à l’encontre des normes du droit international et du bon sens. Les élections dans le Donbass ne sont pas contraires aux accords de Minsk et se déroulent avant tout dans le respect de la Constitution et des droits constitutionnels des citoyens, qui sont stipulés dans les normes du droit international. Discuter d’élections sans nos représentants n’est pas professionnel, c’est le moins qu’on puisse dire », a déclaré Vladislav Deinego.
Tous les observateurs internationaux (et dont je fais partie) qui surveillent ces élections sont unanimes sur le fait que ces dernières ne violent absolument en rien les accords de Minsk, que l’Occident ne sort du placard comme argument que lorsque cela l’arrange (et qu’il interprète comme ça l’arrange), et qui l’oublie opportunément lorsque l’Ukraine viole ouvertement ce qu’elle a signé.
Je redirai donc ici ce que j’ai déclaré à mes collègues de l’agence DAN, à savoir que ces élections ne violent en rien les accords de Minsk, et qu’elles ont lieu de manière conforme à la constitution de la RPD et de la RPL. J’ajouterai que ces États sont des États souverains de jure, et qu’ils ont le droit d’exister au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, que l’ONU et l’Occident le veuillent ou non.
Si l’Occident veut continuer à pouvoir brandir les accords de Minsk devant l’ONU ou d’autres instances internationales, il ferait bien de commencer par lire ces accords, arrêter de les interpréter n’importe comment, et surtout exiger de Kiev qu’elle applique ces accords, au lieu de prétendre de manière hypocrite qu’elle le fait, quand les faits montrent tout le contraire.
Il serait bon aussi que les représentants à l’ONU relisent la charte de ce dernier ainsi que le droit international et l’appliquent au lieu d’inventer des prétextes fallacieux pour justifier d’imposer leur vision au reste du monde.
Hier à l’ONU, l’Occident a dévoilé toute l’étendue de son double standard, mais surtout, il a prouvé toute l’inutilité de cette institution. En refusant d’écouter la représentante de la RPL sous un prétexte bidon, l’Occident a démontré que le but de l’ONU n’est pas de dialoguer pour maintenir la paix. Le but de l’ONU est de palabrer pour ne rien dire et surtout pour ne rien faire, pour faire croire qu’on veut la paix.
La preuve ? La réunion d’hier n’a débouché sur rien. Ni déclaration, ni décision. Une perte de temps et d’énergie, du brassage de vent, et de quoi alimenter les médias occidentaux en pseudo-arguments contre ce qui est l’expression même de la démocratie, à savoir des élections permettant de désigner le gouvernement et le parlement de deux pays.
La réunion d’hier a démontré, s’il en était besoin, que l’ONU est bien un « machin » totalement inutile, et qu’il est plus que temps de le réformer en profondeur si on ne veut pas qu’il finisse comme la défunte SDN avec les mêmes conséquences.
Christelle Néant