Pourquoi les consommateurs aiment le bio mais en achètent peu ?

Source The Conversation

Variété de légumes et de fruits frais bio dans le jardin. Régime équilibré /123.fr

Le marché français du bio alimentaire pèse 9,7 milliards d’euros en 2018 et est en croissance de plus de 15 % par rapport à l’année précédente.

Le dernier baromètre de l’Agence bio, dont les résultats ont été dévoilés jeudi 20 février, montre que ce sont près de neuf Français sur dix (89 %) qui consomment des produits biologiques en 2020 contre un peu plus d’un sur deux en 2003, année de la première édition.

La perception des produits bio semble faire consensus en France : 87 % des Français considèrent qu’ils contribuent à préserver l’environnement et 82 % pensent qu’ils sont meilleurs pour la santé.

Un écart entre croyance et consommation

Pourtant le bio ne représente que 4,4 % de la consommation générale de produits alimentaires en 2017 et la fréquence de consommation demeure faible. Seuls 14 % des Français consommeraient bio quotidiennement et 25 % auraient une consommation diversifiée, c’est-à-dire régulière et variée de produits biologiques, selon l’étude INCA 3 de 2017. Comment expliquer un tel écart entre des croyances positives à l’égard du bio et une consommation quotidienne assez faible ?

Une étude qualitative publiée dans la revue de recherche Décisions Marketing s’est intéressée spécifiquement à ces consommateurs occasionnels et non consommateurs de produits alimentaires bio, qui représentent respectivement 42 % et 11 % de la population française.

À travers l’analyse de 25 entretiens, elle a permis d’identifier cinq types de discours que les Français utilisent pour conserver une cohérence cognitive entre une appréciation globalement positive des effets du bio sur la santé et des comportements qui s’en éloignent.

1. « Le bio théorique oui, le bio pragmatique, non ! »

L’analyse de ce type de discours fait ressortir une distinction forte entre, d’une part, un bio « théorique » (ce qu’il devrait être) et, d’autre part, un bio « pragmatique » (ce qu’il est réellement, le bio labellisé). C’est sur cette réalité commerciale des produits biologiques que s’opère une relativisation du bénéfice des produits bio sur la santé, voire un déni. L’association mentale entre le bio et ses effets bénéfiques sur la santé existerait bien, mais serait questionnée dans le contexte marchand actuel.

2. « Je m’interroge sur les pratiques agricoles, commerciales et de labellisation »

Trois types de pratiques sont aujourd’hui mises en cause par les consommateurs :

  • les pratiques agricoles qui ne permettraient pas d’obtenir un produit « 100 % bio » : est-il possible de produire sans traitement, de contrôler l’effet de facteurs exogènes comme la pollution de l’air ou des champs voisins ?
  • Les pratiques commerciales qui confrontent deux formes d’acteurs : d’un côté, ceux qui profiteraient de l’engouement pour le bio pour accroître leurs marges (grande distribution principalement) et, de l’autre, les consommateurs qui se feraient duper.
  • Enfin, les pratiques de contrôle mises en œuvre par les organismes de labellisation, qui soulèvent un certain scepticisme.
Pourquoi les Français sont parfois sceptiques quant aux produits bio. Baromètre de consommation et de perception des produits biologiques en France Agence BIO/Spirit Insight

3. « Mon plaisir ne passe pas par le bio »

Le plaisir est un critère de choix prépondérant dans les achats alimentaires. Certains consommateurs occasionnels opposent des aliments bons, beaux et qu’ils peuvent manger quand ils en ont envie aux aliments bio, aux goûts différents, à l’aspect moins attirant et dont la production est soumise à des contraintes saisonnières.

4. « Je voudrais bien acheter bio mais je ne peux pas »

Certains consommateurs expliquent leur faible consommation par des éléments indépendants de leur volonté : le manque de moyens financiers principalement ou le manque de temps pour cuisiner ou pour s’approvisionner.

5. « Je peux être en bonne santé autrement qu’en consommant bio »

Le bio peut permettre d’être en bonne santé, mais est-ce suffisant ? N’existe-t-il pas d’autres moyens de parvenir aux mêmes fins ? Le bénéfice santé du bio est ainsi neutralisé de deux manières. D’abord, manger bio ne suffirait pas. D’autres actions seraient nécessaires pour être en bonne santé comme manger équilibré ou faire du sport. Ensuite, il serait possible de manger sainement, souvent à moindre coût, sans consommer bio. Comment ? Par l’achat de produits locaux. Et si le producteur est présent, personne qui inspire confiance de par sa proximité, c’est encore mieux !

Ces cinq discours sont souvent mobilisés simultanément et permettent aux consommateurs de faire coexister la norme « bio : bon pour la santé » avec des comportements qui s’en éloignent en la rendant non applicable au contexte marchand actuel (discours 1 et 2), au contexte individuel (discours 3 et 4) et en évoquant un objectif, être en bonne santé, qu’ils peuvent atteindre autrement (discours 5).

Les principaux freins à la consommation de produits biologiques. Agence Bio
Déconstruire des biais cognitifs

Réduire l’utilisation de ces croyances neutralisatrices n’est pas chose aisée. Chercher à contrer l’une d’entre elles pourrait en effet amener les consommateurs à se réfugier derrière d’autres. Néanmoins, plusieurs recommandations peuvent être formulées à destination des acteurs du développement de l’agriculture biologique en France et/ou des producteurs/fabricants d’aliments biologiques.

L’un des axes majeurs de réflexion vise à réduire l’écart entre « bio théorique » et « bio pratique » dans l’esprit de ces consommateurs. En lien avec les préconisations du Conseil économique social et environnemental formulées en 2018, un plan de communication à visée informative répondant aux principaux arguments avancés par les consommateurs semblerait pertinent.

La question des canaux de communication à utiliser serait un élément clé dans la mesure où ces consommateurs ne sont pas en recherche active d’informations sur le sujet. De leur côté, les producteurs/fabricants auraient également tout intérêt à ne pas se reposer que sur le label bio. Le « fétichisme du label » semble bien moins marqué auprès des consommateurs occasionnels et non consommateurs.

Montrer la complémentarité entre le bio et d’autres indicateurs du « bien manger » (le produit local, le circuit court, la vente directe et la qualité nutritionnelle) semblerait aussi un levier important pour lever les confusions dans l’esprit des consommateurs. Plusieurs recherches ont, par exemple, montré l’existence d’associations erronées entre « produit local et produit bon pour la santé » ou entre « produit transformé bio et produit moins calorique ».

The Conversation

Voir :

Malgré le succès du bio, des travailleurs confrontés à la pénibilité et à l’incertitude

Contre l’uniformisation des semences, produisons de la biodiversité

10 Commentaires

  1. C’est une étude intéressante. Je rencontre souvent des personnes qui me rétorquent: Oh, tu sais, le bio… ça ne veut rien dire… et puis l’eau et l’air sont pollués…
    Je dois dire que ces réflexions m’énervent un peu. Certes, il y a bien d’autres pollutions. Mais on retrouve la même pensée pour les ondes. Quand arrivera-t-on à comprendre que c’est mathématique ? Tout s’additionne. Donc l’astuce consiste à diminuer chaque élément pour en diminuer la somme. Et pourtant, je ne suis pas matheuse !
    Il ne s’agit pas de rêver d’une bio à 100% mais de tendre vers le plus bio possible.

    Ah oui, et puis on me dit: bah, c’est de l’arnaque !! On sait bien que ce n’est pas bio, les poulets ne le sont qu’à partir de x semaines… (je n’ai plus les chiffres en tête)… et le bio en Espagne (là, j’évite !)…
    Oui, il y a de l’arnaque. Bien sûûûrrr !!!
    Là encore, comme pour toute le reste, il faut dénoncer, mais aussi choisir ses producteurs, discuter avec les commerçants, attirer leur attention… leur montrer qu’on veille.

    La seule solution pour moi est de plébisciter le bio un max (selon le porte-monnaie aussi) pour arriver à augmenter les surfaces agricoles. Ainsi, le non-bio se retrouvera le plus loin possible, polluant le moins possible. Jusqu’à ce que les agriculteurs non convaincus, ou hésitants, y arrivent aussi.
    Encore une fois, la solution est entre nos mains. Au pire, on peut acheter le bio des supermarchés, même si on est loin du compte. Et vérifier aussi les prix. Car il arrive que le « vrai » bio (encore une fois… il s’agit de s’en rapprocher) soit moins cher que ce qui ne l’est pas. Oh, pas souvent, ok. Mais ouvrons l’oeil.

    Et côté goût, il est souvent bien meilleur. Pas toujours, d’accord. Mais souvent. Alors essayez, achetez une fois ou deux du bio, goûtez la différence: carottes et bananes par exemple. Même si les bananes… c’est loin…

    • Sinon on peut aussi produire sa nourriture, c’est la voie que j’ai choisi.

      J’ai un petit terrain avec ce que je loue (80M2), et quelqu’un dans mon patelin vient de proposer de faire ce que je veux de quelques milliers de M2.

      Résultat, j’ai investit dans 350€ de graines (et récupéré des boutures et greffons ça et là) pommes et poires de terre et ail, et de matos (pelle, grelinette, pompe, MPPT, panneau solaire, tuyau d’arrosage…), j’ai creusé une mare, récupéré la terre pour butter (beaucoup d’eau ici), lancés les semis au chaud chez moi, mis à stratifier des graines de fruitiers et de croissance (pommiers, asiminiers, paulownia, etc…)

      C’est un investissement initial, certes, mais un investissement à vie, je n’ai choisi que des variétés reproductibles, et je devrais atteindre largement de quoi me nourrir à l’année et plus, ça sera bio, local, de saison, et hors saison, le séchage, la stérilisation, et les lactofermentations, feront le boulot.

      Et ce n’est pas chez moi, ce n’est pas ma terre, mais j’aurais déjà une pépinière et un stock de graines pour essaimer mon futur terrain et aider les autres. 🙂

      Je conseille à ceux qui voudraient du fruitiers sans se ruiner, d’aller sur la bourse d’échange http://fruitiers.net , aussi. Beaucoup de diversité et même sans échanges, beaucoup de gens donnent !

  2. https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_good.gif D’accord avec toi Biquette. Je ne peux pas toujours acheter tout ce que je voudrais en bio mais il y a des choses que je n’achète jamais en conventionnel. Notamment les pommes (hyper traitées) et j’essaie d’acheter local le plus possible. Pas toujours faisable malheureusement. Les bananes et le café, pas encore trouvés à ma porte https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_yahoo.gif Quant au prix, c’est souvent l’argument majeur de ceux qui ne veulent pas du bio. Et parfois ils se trompent. Certaines choses ne sont pas plus chères qu’au super-racket. Personnellement, j’achète ma viande (je ne suis pas végétarienne) directement à la ferme bio du coin. C’est tant du kg, même prix pour tous les morceaux et quand on fait le détail ça revient moins cher qu’à la boucherie. A chacun de voir. Et le printemps arrive, alors, vive le jardin (pour ceux qui ont la chance d’en avoir un).

  3. J’avais lu qu’il faudrait enlever un bon centimètre de pommes pour avoir le moins de résidus possible, quand elles sont traitées.
    Tiens, le vin (je n’en bois pas mais autant le savoir) c’est 27 traitements différents. Avis aux amateurs…
    Alors mieux vaut en boire moins, et du sans traitement (enfin, au minimum).
    Oui, il faut surveiller les prix, tu as raison.
    Et oui… le jardin… super. D’ailleurs, c’est le moment des semis. J’ai commencé. Les courges et courgettes pointent déjà leur museau.
    Ah, j’en profite pour rappeler à qui fait les semis, de mettre de la poudre de cannelle (ou de charbon) au pied pour en éviter la fonte. Mais… je vois que le sujet n’intéresse pas grand monde… Peut-être plus tard dans la soirée…

  4. Pour en revenir au bio, le vrac est même moins cher qu’en grande surface à produit égal : et même si le bio n’est pas parfait, que certains y voient une façon de gagner bcp d’argent en surfant sur ce nouvel Eldorado, c’est un moindre mal. Je consomme un maximum local, chaque année je tente une nouvelle production dans mon jardin (minuscule mais c’est mieux que rien), et bientôt les poules dans qq semaines : j’ai hâte https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_wink.gif

  5. mouais, bravo les filles
    je salue les intentions et la bonne volonté
    maintenant, on n’ a pas tous le temps d’ éplucher les étiquettes en supermarché pour essayer de deviner ce qui est bio et pas bio…!!!
    Et faire son jardin…avec de l’ eau bio, du compost bio, des semences bio…faut avoir le temps !
    Je salue donc un bel esprit de résistance…mais , dans la pratique, c’ est quand même bien prise de tête !!!

  6. Quand je mange par hasard du bio, je détecte son énergie vitale extrêmement plus élevée qu’un produit non bio
    Même un plat surgelé bio, a une quantité de force vitale beaucoup plus élevé

    Et le mieux du mieux en Energie extrême vitale :
    Je vais chez des amis qui ont un jardin, mais a part de la pelouse, je pensais qu’ils ne cultivaient rien

    Je mange leur salade, ça me donnait l’impression de manger de la pure énergie. ça fondait en énergie…
    Je leur dis « ou vous l’avez acheté ? »
    « donnez moi l’adresse du magasin, s’est du bio, mais a haute énergie vitale »
    ça les fait rire
    « on vient de la cueillir a l’instant dans notre mini potager derrière le garage… » https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_whistle3.gif

    Le ressentit n’est pas imaginaire ^^
    Le bio a une qualité énergétique en force vital bien plus élevée, considérablement plus élevé
    Et quand on vient de les cueillir, je dirais que c’est maximal

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