La ville est une prison totale…

Vous aurez certainement des choses à dire sur cette injonction au changement. Pour illustrer ce texte incitatif, une vidéo d’une artiste pas connue des jeunes, Yma Sumac qui chante Pachamama, elle est surnommée à juste titre « le rossignol des Andes ». Sylvain parle de Chambery mais, ça peut s’appliquer à toutes nos villes..

Le dire haut et fort, le scander, le marteler. Le dire comme l’eau claire jaillit de la roche dans la face : la ville est une prison totale. On est incarcéré quand on vit dans les villes de l’homme occidental mondialisé, colonisé intégralement par l’esprit de la marchandise. Prison à ciel ouvert, prison sans mur apparent, mais prison totale.

La ville, c’est l’asile de fous. Quand on vit en ville, on ne sait pas, on ne voit pas comment on pourrait réussir à s’échapper. On cultive des plantes sur son balcon, on écrit un poème écolo-bucolique sur son ordinateur, et on regarde des vidéos sur youtube sur la permaculture ou Pierre Rabhi… On s’évade pour les vacances dans je-ne-sais-quel divertissement-produit que l’on consomme et dans des drogues de toutes sortes… Mais comment faire pour vraiment retrouver le cosmos, les feux-de-camp entre frères sous les étoiles pas seulement pour le 15 août avec les merguez ? Où aller ? Dans quelle forêt ? Sur quel champ ? Dans quelle campagne ? Avec qui ? Les codétenus qui vivent avec moi n’en savent pas plus long que moi. Je sais bien que des gens vivent loin des villes, mais comment les rejoindre ? Lesquels rejoindre ? Comment me faire intégrer dans un de ces lieux de vie en pleine nature ? Comment acheter de la terre, où acheter de la terre ? Et pourquoi acheter de la terre sachant que j’ai peur de m’enraciner, que je préfère vivre dans l’éternel espoir d’une vie meilleure en écoutant des chansons qui parlent des landes nues, au lieu de vivre la vraie-vie-bonne tout de suite qui me demanderait de me confronter aux éléments et à une dose géante de concrétude… Et puis surtout : je n’ai pas d’argent pour acheter de la terre, j’ai de l’argent pour m’acheter des montagnes de merdes et de dépendances mais dire « je-n’ai-pas-d’argent » c’est plus un mode d’être pour moi, un rapport au monde, qu’une réalité économique, du moins si j’appartiens à la « classe moyenne » (N.B : 10 ans de forfait de téléphone portable = 1 hectare de terre).
La ville est une prison totale, au moins le savoir d’un savoir conscientisé et sûr, car c’est le seul espoir de s’évader un jour.

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Je me suis totalement évadé de l’agglomération chambérienne il y a deux ans seulement pour rejoindre la forêt et une dose substantielle de sauvage. En m’évadant, j’ai tout trouvé : la plénitude, la complétude, et l’être générique, c’est-à-dire l’être du cosmos. Dans les villes, nous sommes les êtres du chaos. J’ai tellement de compassion aujourd’hui pour ceux qui demeurent incarcérés dans les villes. Je veux simplement leur dire de ne jamais oublier de réussir un jour à s’évader aussi. Je veux simplement leur dire qu’on se trompe totalement sur la notion de confort si souvent brandie par les uns et les autres pour ne pas bouger. Oui, nos prisons sont confortables. Si vous pouviez m’entendre, si une seule personne pouvait m’entendre : on trouve tout en rejoignant les forêts, on trouve le vrai confort, le seul confort, la définition du confort. Le réflexe de certains, c’est de se dire qu’il n’y a pas de bus, d’hôpital, de centre sociaux, de gare, et de centre commerciaux dans les forêts, que les forêts c’est bien joli mais qu’il n’y a personne et surtout rien à faire… C’est que vous n’avez pas encore compris que tout est à l’envers ici bas et que tout est faux dans la société des hommes. C’est pourtant simple : là où vous pensez qu’il y a tout (la ville) il n’y a rien, et là où vous pensez que c’est vide (la forêt), il y a tout. Il y a tout car toute la richesse du monde vient uniquement de la terre et les villes sont sous la perfusion permanente de choses importées depuis les terres arables, les mers et les forêts.

S’évader de la ville, c’est (comme) se déscolariser. S’évader de la ville, c’est (comme) passer par-dessus le portail de l’école. C’est se soustraire du joug des pouvoirs qui nous vident et nous aliènent, c’est se soustraire des flux qui nous emportent loin de nous-même et loin de la vie, c’est se soustraire des rouages de la grande broyeuse, c’est se soustraire de l’œil de Big Brother, c’est se soustraire du contrôle, de ce parc conçu pour le contrôle. C’est se soustraire de la compétition sociale infinie et mortifère, c’est vraiment se désincarcérer comme on extrait un être d’une voiture gravement accidentée. C’est se soustraire de tous les faisceaux de dépendance qui nous lacèrent. S’évader de la ville pour les forêts, les prairies, l’eau pure, l’air pur, les papillons, c’est se trouver d’un coup d’un seul, c’est trouver le jouir parfait de quand l’essentiel est toujours satisfait.

L’Enfer Chambérien est désormais situé à 35 kilomètres de ma forêt, je le regarde depuis ma colline sacrée et grâce à l’œilleton chirurgical de la TVNet Citoyenne, le seul média véritablement au service des prisonniers, qui creuse le tunnel de la grande évasion reportages après reportages.

Chambériens, ne soyez plus chambériens ! Mais des chambé-plus-rien ! Laissez-la cette grande pute insipide qui pue la mort ! Imaginez que vous la laissiez là, en plan, vide de vous tous, cette hideuse Babylone ! Qu’est-ce qu’une prison sans détenu ? Plus rien ! Laissez-les en panique vos Élus geôliers et tous les agents de l’État, à errer hagards, dans une ville vidée de ses usagers usagés barrés ! Imaginez que vous la vidiez de son sang, que vous l’abandonniez pour en faire une ville fantôme, une épave ? N’est-ce pas tout ce qu’elle mérite cette matrice de mort, ce Titanic ? Car la Révolution qui vient sera un exode urbain massif et irrévocable de tous ceux qui veulent retrouver la terre, « les vraies richesses » disait Giono. Quand vous aurez quitté Chambéry-la-laide pour la beauté, vous ne direz plus jamais que cette ville fut belle. Certains osent le dire (uniquement parce qu’ils y vivent et meurent !!) : « Chambéry, c’est quand même une jolie ville hein ! ». Ils le disent pour s’autopersuader, pour ne pas trop déprimer. Alors qu’à Chambéry, comme dans toutes les villes : tout est laid, car tout est faux, tout est laid car tout est pourri par les pouvoirs et le régalien qui jamais nous régale en rien. Dans les villes, tout est tranchant, tout est coupant, tout est vrombissant assourdissant accablant. Dans les villes, tout est artificiel-artificieux, tout est toxique. Dans les villes, la vie s’étiole, la vie meurt, la vie lutte comme un ours polaire souffrant de la fonte de la banquise cherchant désespérément ses appuis.

« Quittez tout et vous trouverez tout » disait un être spirituel. Il parlait notamment aux habitants des villes qui croient tout avoir parce qu’ils ont des restos, des cinés, des magasins, du mouvement et des gens autour d’eux alors qu’ils n’ont rien et qu’ils meurent. Celui qui dit « Quittez tout et vous trouverez tout » s’adresse à tous les scolarisés-urbanisés, tous les étatisés, qui ont intégré au plus profond d’eux-mêmes la domination des structures, à tous les domestiqués qui ont accepté de plier sous le bâton et la carotte, à tous les adeptes du faux omniprésent qui fait illusion.

Je terminerais en rappelant que les forêts sont potentiellement comestibles en fruits et baies de paradis, qu’il suffit de pas grand chose pour bâtir de véritables jardins-d’Éden abondants et nourriciers.

Que ces mots puissent initier un mouvement d’exode urbain, un mouvement de mort des villes au profit des forêts comestibles et jardins-forêts collectifs !
Une vie de chemins, une vie pieds nus.
Une vie entière dans le sein de notre mère. C’est à portée de main et de regard, c’est parti ! Il suffit de s’évader de la ville-prison.

Sylvain Rochex – www.descolarisation.org

11 Commentaires

  1. Au risque de paraître égoïste, je dirais que je ne suis pas pour que les gens des villes viennent vivre en campagne à cause du risque de détruire notre belle nature déjà assez abimé par la main de l’homme.

    Bon de toute façon, je ne pense pas que tous les gens qui vivent en ville veulent vivres en campagne, beaucoup ne connaissent que la ville pour y être né et n’ont aucune envie d’en partir.

    Pour d’autres, la campagne est synonyme d’ennuie et de manque de travail ce qui les empêche de tenter l’aventure ailleur.

    Mais je le répète, tout le monde ne doit pas habiter en campagne et c’est tant mieux que bon nombre de moutons préfèrent s’agglutiner en ville et se bronzer la caouane l’été sur les berges de la seine !

  2. j’ ai vécu en centre ville toute mon enfance avec les sorties dominicales à la campagne où mon père nous apprenait à faire des aubes que l’ on calait dans les rus, on ramassait des pissenlits ou des rosés des prés avant de retourner dans notre appartement. On avait la chance que les fenêtres donnaient sur une grande place avec des platanes. et puis, quelques années après mon mariage, on a eu la chance de trouver une vieille ferme à restaurer dans la région de Marines, au milieu des bois et des vaches. Du pur bonheur et depuis, je ne réhabiterais jamais en centre ville
    Maintenant, . je suis au bord de l’ étang de Berre avec des pinèdes tout autour et un jardin,
    j’ ai ramassé mes premières asperges sauvages cette semaine,

  3. « là où vous pensez qu’il y a tout (la ville) il n’y a rien, et là où vous pensez que c’est vide (la forêt), il y a tout »

    Bienvenue dans le monde des évadés Sylvain !

    @Le veilleur, pas d’inquiétude, la nature fera le tri pour ne garder que ses véritables enfants. Les personnes dépourvues d’humilité face à son immensité et sans respect pour sa générosité s’y perdront …

    M.G.

  4. Et puis, quand on habite Paris, voilà ce qui peut arriver :

    Un parisien part en vacances à la campagne.
    Un jour, il voit un troupeau de vaches, mais il est surpris qu’elles n’aient pas de cornes. Complètement fasciné par cette anomalie, il finit par aller voir le fermier d’à côté et lui demande :
    – Dites mon brave, pourquoi ces vaches n’ont-elles pas de cornes ?
    Le fermier le regarde longuement, puis après une grande réflexion il lui répond :
    – Ben en fait, y’a trois raisons qui font que les vaches è z’ont pas d’cornes.
    – Ah bon !
    – Oui ! La première, c’est qu’è naissent sans cornes… mais là, c’est pô l’cas.
    La deuxième, c’est qu’è s’battent et qu’è s’les cassent… mais là, c’est pô l’cas.
    Enfin, des fois, y’en à qui choppent une maladie, l’véto y dit que c’est la décalcification, et les cornes, è tombent… mais là, c’est pô l’cas.
    – Mais alors, pourquoi donc ces vaches n’ont pas de cornes, mon brave ?
    – Ben en fait, si ces vaches è z’ont pô d’corne, c’est surtout pac’que c’est des chevaux……

  5. Je comprend l’auteur mais bon il est un peu excessif, on peut très bien vivre en ville et être épanoui.
    La campagne peut être une prison autant que le mode de vie urbain. Et notamment pour certains jeunes.

    C’est sûr que ceux qui vivent à Paris (ou en banlieue) dans un appart de 38m2 , se tapent une heure de métro par jours, et gagnent 1200 euros j’ai du mal à comprendre pour le coup. En fait Paris est la seule ville que je trouve trop rebutante.
    Du reste il y’a pleins de petits bourgs, et des villes de taille moyenne. Pas besoin de partir non plus dans des jugements de valeurs sur les gens (ville= prison des débiles et campagne= liberté des éclairés)

  6. Se faire un sanctuaire, peu importe le lieux.
    Aimer cet espace occupé.

  7. Je laisse Paris au Parisien …. quand on sait que plus de la moitié des cadres parisiens veulent fuir Paris et seraient prêts à une baisse de salaire pour accéder à un poste en province…. on se dit qu’il ne doit pas bon y vivre … la pollution, le stress, les transports en commun qui puent sans compter l’insalubrité que l’on trouve dans certains quartiers … ce n’est vraiment pas Top…. A moins qu’un Parisien me prouve le contraire ?

  8. Moi, je laisse les citadins dans leurs villes, fort égoïstement de ma part je l’avoue ! Mais pour avoir vécu 30 ans dans la montagne, un endroit formidable, très beau et encore très pur, je peux dire que ceux « des villes » même petites qui viennent y passer la journée ou la fin de semaine, sont une catastrophe écologique ! papiers partout, canettes vides partout, mégots et paquets de cigarettes vides partout ( pour ces derniers les chasseurs sont les champions, ces soi-disant protecteurs de la nature !) champs de fourrage dévastés par leurs passages, alors que nous, les autochtones nous en faisons scrupuleusement le tour respectant ainsi le travail des paysans dont c’est le seul revenu. Pour les citadins ce n’est que de l’herbe et se rouler dedans est un tel plaisir pour les enfants… qu’il n’y a pas raison d’en faire tout un foin – sans jeu de mot- !
    Dans les sous-bois la mousse dans laquelle pousse les chanterelles est régulièrement piétinée, arrachée etc… lors des recherches champignonnières annuelles… ils ne savent pas ces « pôvres » qu’il ne faut pas bouger les souches dans les sillons desquelles les chanterelles, encore elles, poussent tous les ans. Si on les déplace elles ne reviennent plus… mais allez faire comprendre cela à des « sauvages incultes » ! sans compter les champignons arrachés et laissés sur place par ceux qui ne les connaissant pas disent « ils ne sont pas bons » quelle erreur pour beaucoup ! sans compter que certains, effectivement non comestibles ou dangereux, sont la nourritures de beaucoup de petites bêtes.

    Bref, je considère ce genre de citadins comme dangereux et souhaite qu’ils restent chez eux dans leurs villes.

  9. Paris c’est comme le Mordor, avec l’oeuil de Sauron pausé sur la tour (babylonienne) eiffel qui vous guette à chaque instant..
    Fuyez, pauvres fous !!!

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