L’histoire révèle la folie des grandeurs d’un des dictateurs les plus connus de l’histoire récente. Alors que le débat sur les reliques et monuments laissés par Saddam Hussein secoue l’Irak, il en est un autre qui jette de l’huile sur le feu des affrontements communautaires dans le pays. Témoignage incroyable de la mégalomanie de Saddam, le “Coran de sang” porte ce nom car il a été écrit avec plus de 24 litres du sang du dictateur, qu’il s’est fait prélever pendant deux ans, en présence d’un calligraphe qui recopiait le livre sacré des musulmans.
Le livre a été caché lors de la chute du dictateur par des imams qui pressentaient que le livre n’était pas n’importe quelle relique du dictateur. Alors que les statues de Saddam étaient mises à bas et que les monuments érigés par l’ancien régime étaient détruits comme autant de symboles du joug du tyran, cette œuvre incroyable était préservée des désirs de revanche de la population. Aujourd’hui, explique The Guardian , le “Coran de sang” est gardé dans une crypte de la grande mosquée de Bagdad, protégé par de nombreuses portes dont les clés ont été confiées à plusieurs personnalités religieuses, pour que personne ne puisse les ouvrir seul.
Car l’existence de cette relique pose aux autorités politiques et religieuses un problème bien plus compliqué que les tableaux ou les statues représentant le tyran. Ils ne savent pas s’ils doivent détruire ou exposer l’ouvrage. Même parmi les plus acharnés détracteurs de Saddam, les avis sont partagés. Certains veulent faire table rase et effacer de l’histoire de l’Irak tout ce qui se rapporte à Saddam Hussein. D’autres répondent qu’il faut le garder en témoignage de la folie d’un homme, prêt à prouver sa piété par un acte qui pourrait sembler sacrilège à d’autres.
Pour le moment, explique The Guardian, le livre reste enfermé car toute sortie du statu quo pourrait déclencher des violences dans un camp ou dans l’autre. Le détruire pourrait redoubler la colère des anciens baasistes, qui continuent à organiser nombre d’attentats et d’assassinats dans le pays. De leur côté, les sunnites désireux de mettre à jour la relique craignent que le gouvernement ne s’en prenne à eux s’ils venaient à la faire sortir de son caveau.
Le temps devrait apaiser les esprits dans cette affaire, estiment certains dignitaires, toujours trop effrayés par cette œuvre pour ouvrir les portes qui mènent à elle.