On va encore nous dire qu’on fait de la pub pour l’UPR. Pourtant ce billet d’humeur est là pour bien souligner ce qui va se passer pour tous les assurés. Et si vous avez l’ACS (aide à la complémentaire santé) vous avez pu remarquer, que votre mutuelle, si elle n’est pas conventionnée par la Sécu vous a gentiment fait savoir par courrier, qu’à l’échéance de votre contrat, elle ne pourra plus vous assurer, elle vous incite à la contacter pour qu’elle vous dirige vers les mutuelles agréées par la sécu. Si vous devez renouveler votre demande d’ ACS, vous devrez obligatoirement choisir, parmi les établissements imposés par la Sécurité sociale (qui porte bien mal son nom). Quant aux autres assurés ce n’est pas mieux…
Titre original: Le billet d’humeur d’Isary Hanbelle, médecin généraliste et adhérente de l’UPR, sur les choix gouvernementaux en matière de santé publique
Après l’adoption récente du « Projet de Loi de Santé » (PLS) ou de « Projet de loi de modernisation du système de santé », il est important que nos concitoyens comprennent que le problème crucial de la démographie médicale devrait inciter tout gouvernement responsable et soucieux de l’intérêt général à avoir des relations apaisées avec le corps médical.
Au lieu de cela, le gouvernement a choisi d’agiter le chiffon rouge du « Tiers Payant Généralisé » (TPG). Et face à la levée de bouclier que cette perspective suscite dans le corps médical, le gouvernement ne fournit, comme seule explication, que cette opposition relèverait uniquement d’un réflexe corporatiste, bien entendu injustifiable.
Les Français, qui sont tous concernés par la pérennité de la qualité de notre médecine, naguère encore si réputée, doivent connaître le pourquoi du comment de ce désaccord de fond.
Si mes collègues médecins sont très majoritairement hostiles au TPG, c’est parce qu’ils ne sont pas nés de la dernière pluie. Nous anticipons que, derrière les belles paroles avec lesquelles cette politique est présentée, l’instauration du TPG va inéluctablement entraîner une modification du rapport entre la part des soins couverte actuellement par la Sécurité Sociale et la part des soins restante, actuellement couverte par les Mutuelles pour les Français qui en disposent.
Le curseur entre Sécurité Sociale et Mutuelles privées va ainsi se déplacer, discrètement, insidieusement, implacablement.
Dans quel sens à votre avis ? Compte tenu du discours ambiant et des nécessités constamment affirmées de réduire les dépenses de l’État, il n’est pas sorcier de comprendre que l’on va assister à un désengagement progressif de la Sécurité Sociale – avec une accélération des « déremboursements » qui sont devenus fréquents – une croissance continuelle de la part prise en charge par les Mutuelles.
Dans un premier temps, cela passera à peu près inaperçu. Les médias continueront leur habituelle propagande sur la nécessité de « réduire le trou de la Sécu » et les patients auront l’impression de n’assister qu’à un transfert indolore de prise en charge. On peut prévoir que le curseur commencera à bouger dans une relative indifférence.
Jusqu’à quand ? Jusqu’à ce que les Français voient bondir leurs cotisations de mutuelles (c’est déjà le cas pour beaucoup) et constatent qu’ils ne voient pas baisser leurs cotisations sociales sur leurs feuilles de paie.
C’est alors qu’ils commenceront à prendre l’affaire au sérieux et à protester. Et en guise de réponse à leur légitime colère, ils entendront leurs « chères » mutuelles leur rétorquer : « Allez consulter un médecin de notre réseau ! »
Il n’est qu’à voir le nombre vertigineux de publicités pour les mutuelles qui envahissent nos boites mail pour comprendre qu’ il n’y a pas là que de louables intentions liées à l’ intérêt subit pour notre bien être sanitaire collectif.
Voilà comment la prise en charge sera moins efficace et performante pour un prix qui, lui, va aller crescendo.
Pourquoi une prise en charge moins efficace ? Parce que vous n’aurez pas choisi le praticien du réseau de la mutuelle que celle-ci vous imposera. Bien sûr, il se peut que vous vous entendiez bien avec lui (ou elle) et que vous vous sentiez en confiance. Mais il se peut aussi que ce ne soit pas le cas. Bien sûr, il se peut qu’il soit installé près de chez vous. Mais il se peut aussi qu’il exerce à 20 kilomètres.
Et puis le praticien de la mutuelle qui vous aura examiné le lundi ne sera peut-être pas celui qui vous recevra le jeudi avec vos résultats d’examen.
Assurément, rien de cela ne sera générateur d’économies de dépenses de soins. Car la bonne connaissance de ses patients que seul le « médecin de famille » acquiert avec le temps, affine de façon indéniable la pertinence des diagnostics et des demandes d’examens complémentaires.
Moins efficace et plus coûteuse, cette nouvelle répartition des tâches aura enfin d’autres impacts majeurs – dont les conséquences sont potentiellement ravageuses :
• que deviendra l’indépendance de prescription des dits praticiens de réseaux à l’égard de ces chères mutuelles ?
• que restera-t-il de l’attrait de la profession médicale, si elle devient une médecine placée sous la tutelle inquisitoriale des Agences Régionales de Santé (ARS) d’une part et des mutuelles, focalisées sur la nécessité de dégager des profits, d’autre part ?
• que va devenir la liberté d’installation des médecins si ce sont les ARS qui en décident ?
• que va devenir la secret médical, conformément au serment d’Hippocrate, si les données médicales de chaque patient doivent être transmises à des groupements de professionnels ou à des mutuelles ?
Toutes ces interrogations et ces inquiétudes viennent du corps médical qui a l’expérience quotidienne du « terrain ». Elles sont à des années-lumière des orientations retenues par les concepteurs du « Projet de loi Santé » qui s’inscrivent dans le cadre idéologique de l’euro-atlantisme ultra-libéral.
Car ce qui constitue au bout du compte la trame de tout cela, c’est le discrédit de principe pour la traditionnelle médecine libérale à la française et en revanche l’éloge de principe du recours au privé pour résoudre tous les problèmes. Qu’on le veuille ou non, et malgré toutes les dénégations, la ligne de mire est une évolution de la médecine française vers une médecine différenciée selon les revenus, selon l’anti-modèle américain.
Dans ce domaine comme dans tant d’autres, on détruit ce qui existait et marchait globalement bien, le tout sous couvert de « modernisation ».
Dans ce domaine comme dans tant d’autres, le gouvernement aurait été bien avisé de laisser un peu plus la parole à ceux qui sont au charbon et un peu moins à ceux qui ne savent même pas qu’il y a du charbon.
Isary HANBELLE
Isary Hanbelle est le pseudonyme d’une adhérente et militante active de l’UPR, qui exerce comme médecin généraliste libéral dans sa vie professionnelle.
L’UPR compte actuellement 112 médecins et étudiants en médecine parmi ses adhérents.Source l’UPR sur le projet de loi santé
Merci pour cette explication.
Une partie des Français ont compris les implications de la privatisation sous-jacente de la médecine avec la mise en place du contrôle grandissant des mutuelles.
Nous assistons à la privatisation de nos services de répartition ( suivi des chômeurs , mutuelle d’entreprise , retraite complémentaire ) , cette privatisation ne réduira pas nos cotisations sociales mais ajoutera de nouvelles cotisations a destination du privé pour une moindre qualité de services.
Philippe
je suis une des rares -mais sont-elles si rares ? – personnes qui n’ont pas de mutuelle et cela me convient. j’ai « économisé » beaucoup d’argent en n’ayant pas à payer de cotisations, d’autre part ayant déserté depuis trois décennies l’allopathie, les quelques remèdes homéopathiques qu’il peut m’arriver de prendre, ne coûtent rien à personne. Je sais, vous allez me répondre « oui, mais si tu dois être opérée ou hospitalisée pour une raison quelconque ? » j’en prends la responsabilité -dont je suis fière car qui est encore « responsable » à notre époque d’assistés ? – et je ne me résignerai qu’à contre-coeur à aller à l’hôpital car ses méthodes de soins ne sont pas les miennes.
Quand je me suis cassé deux vertèbres, j’y ai été conduite, mais j’ai refusé tout soin autre que les radios, et je l’ai quitté quelques heures à peine après. Et je m’en suis bien portée ! pas de traitement médical non plus pour une angine de poitrine que j’ai soignée seule alors que le cardiologue voulait de prescrire non seulement la pose d’un stent, mais un traitement à vie !
Tu as raison graine de piaf, combien d’argent les gens dépensent par mois pour se payer une mutuelle, cette argent économisé leur permettraient de se payer des soins le moment venu et peut-être que ce moment ne viendra jamais mais nous sommes tellement formaté par la peur qu’il nous arrive quelques chose un jour qu’on en oublie de raisonner. A qui profite le crime ? voilà la bonne question à se poser.
Il en va de même des assurances maisons et voitures, pour ma part je suis assuré au minimum pour ma voiture dont je me sers qu’une fois par semaine, autrement dit je ne paie quasiment rien, l’argent que j’économise me permettra de remplacer par exemple ma glace si elle se fend le moment venu mais peut-être qu’elle ne se fendra jamais.
Avec des « peut-être » je tomberai malade un jour ou des « si » j’ai un accident un jour, on finit par se ruiner, en cause, le formatage des assurances et de l’entourage. Pour moi, penser que vous tomberez malade un jour accentue déjà la possibilité de le devenir, il n’y a pas de mystère juste des évidences.
+ 1000 !
mais ne pas oublier que nous sommes une génération « d’assistés » cela depuis quand même un certain temps.On s’assure contre ceci ou cela, contre tout en fait, ce qui me fait penser qu’un beau jour ce sera contre la mort ! au fait, c’est déjà fait puisque « l’assurance vie » existe
J’ai pris une mutuelle « minimum », chez Axa, seuls les frais d’hospitalisation sont pris en charge,
y compris transports sanitaires… J’économise ainsi 130 euros/mois de mutuelle et reste couverte en cas de pépin de santé grave.
Il est évident que si un jour ma santé décline je changerai de système, car en fait, on change de mutuelle quand on veut.
On peut aussi voir les choses de façon positive : on peut se dire que les mutuelles seront bien plus soucieuses de combattre et juguler les divers abus qui ont lieu actuellement envers la Sécu (notamment de la part des grands groupes pharmaceutiques qui profitent d’une rente certaine sur le dos de la Sécu), et qu’elles seront incitées à la faire du fait d’une concurrence accrue entre les mutuelles.
Ou…on peut voir les choses différemment.
-Seuls resteront les abus à la charge de la sécu et quelques autres menues conneries paravents.
..Le tout, financé par tous!
Et pour le reste,… »voyez avec votre mutuelle ».
Comme on dit:
« Qui vivra verra ».
..Et pour les autres:
« Tant pis pour eux ».
Ps: Bizarrement quand un médicament n’est plus remboursé par la SS, son prix augmente de façon incroyable!
Et, que penser des honoraires de dispensation que maintenant les pharmaciens récupèrent sur les médicaments ?
Dès janvier ce sera 1,02 euro de plus que vous pourrez payer sur une boîte de médicament, et par boîte !
Merci à Marisol Touraine pour cette initiative prise dans le cadre des orientations de la loi Bachelot (loi HPST) qui taxe encore un peu plus ceux qui ne vont pas nécessairement chez un médecin et qui pratiquent l’automédication en général…
Quant aux médicalents délivrés avec une ordonnance ce sont les mutuelles qui payent encore la diférence et c’est pour une grande part pour cette raison qu’elles ont augmentées leurs cotisations, cette situation devient de plus en plus ubuesque, on se demande si vraiment tous ces politiques réfléchissent aux conséquences de leurs orientations.
Moi, personnellement je me refuse à acheter un médicament (1) qui est taxé par le pharmacien c’est du grand n’importe quoi !
Voir l’article passé sur « La Vie Hospitalière » :
http://autonomes.blogspot.fr/2015/12/honoraires-de-dispensation-les.html
1) Et puis il ne faut pas oublier que maintenant les pharmaciens peuvent vendre certains médicaments aux prix qu’ils veulent ! Ainsi j’ai déjà trouvé une différence de près de 2 euros sur une huile essentielle…il y a de l’abus et c’est à la limite du vol légalisé…
ne jamais acheter d’huiles essentielles dans une pharmacie ! d’bord elles sont rarement, très rarement bio,donc pas naturelles, ensuite non chemotypées ce qui est indispensable pour leur efficacité.
Je me demande combien je vais payer un tube de granules homéopathiques qui vaut à peu près 2 euros ? tiens, quelqu’un que je connais à une copine chez Boiron, je lui demanderai de me les commander, bonne idée.