Que l’actualité mouvementée, ne nous empêche pas de connaitre comment le gouvernement s’y prend, pour continuer à creuser les inégalités à coup de réformes. .
Le « modèle social » français est souvent présenté par la presse et les médias en général comme très généreux mais lorsqu’on y regarde de plus près, le système est souvent limité et injuste.
C’est le cas notamment des allocations familiales qui ne sont pas versées à toutes les familles et qui sont grignotées chaque année par l’inflation quand leur montant n’est pas purement et simplement gelé par le gouvernement…
Les prestations familiales sont destinées à compenser les charges de famille des personnes physiques françaises ou étrangères, résidant en France et représentent aujourd’hui, en masse financière, environ 15,6 milliards d’euros (chiffres 2012). Parmi ces prestations familiales, les allocations familiales arrivent en tête pour 12,5 milliards d’euros et sont versées par les Caisses d’Allocations Familiales (CAF) à près de 5 millions de foyers.
Toutes les familles n’en bénéficient pas
Les allocations familiales* restent attribuées qu’à partir du deuxième enfant depuis que le décret-loi du 29 juillet 1939 a supprimé l’allocation au premier enfant au profit d’une prime à la première naissance.
La France reste ainsi avec cette vieille idée, non vérifiée sociologiquement à ce jour, qui consiste à favoriser les naissances en ne donnant pas d’allocations aux familles dès le premier enfant. Tout se passe comme si les frais occasionnés par un premier enfant étaient négligeables alors que cela coûte aussi cher, sinon plus proportionnellement, que de deux enfants et plus !
Conséquence : les couples venant de débuter dans la vie ou en difficulté financière dont l’un des conjoints est au chômage ou en temps partiel subi, les personnes seules, divorcées ou veuves ayant un seul enfant à charge, subissent de plein fouet cette injustice sociale.
Cela est d’autant plus inacceptable qu’on compte aujourd’hui 8,8 millions de personnes pauvres au sens des critères retenus par l’union européenne (60% du revenu médian), qui vivent avec moins de 977 € mensuels. Sans compter les 2,6 millions de salariés payés au SMIC (1133 € nets mensuels sur la base de la durée légale de 35 heures hebdomadaires au 1er janvier 2014).
Autre incohérence notable, si les allocations familiales sont attribuées à partir du deuxième enfant en métropole, elles sont versées dès le premier enfant dans les DOM, comme s’il y avait un principe à géométrie variable et deux catégories de Français !
Elles sont versées sans aucune condition de ressources
Le versement des allocations n’étant pas soumis à condition de ressources, les familles modestes, avec deux enfants à charge au moins, perçoivent exactement les mêmes montants que les familles aisées vivant très confortablement (cadres supérieurs, professions libérales) ou les 2 millions de millionnaires en euros que compte la France et qui n’en ont pas véritablement besoin.
Au nom d’une apparente égalité de traitement des familles, les notions de solidarité ou d’aide sociale sont ainsi bafouées en permanence et ce « principe d’égalité » creuse en fait, chaque jour, un peu plus les inégalités sociales.
Lionel Jospin, ancien 1er Ministre, avait tenté de faire une réforme mais en fixant maladroitement un plafond de ressources couperet trop bas, au-delà duquel les familles n’y avaient plus droit. A cause de cet effet de seuil, cette réforme déclencha à juste titre la réprobation de nombreuses familles.
Plus subtilement, en son temps, Alain Juppé avait proposé de continuer à les verser à toutes les familles avec l’obligation de les intégrer dans la déclaration annuelle de l’impôt sur le revenu mais ce projet de fiscalisation n’a jamais vu le jour.
La solution la plus juste consisterait sans doute à établir une grille d’allocations d’un montant différencié en fonction des revenus, de ne plus les attribuer au-delà d’un certain plafond de revenu jugé excessif (par exemple 20 fois le SMIC mensuel) et de les verser aux familles dès le premier enfant.
Leur montant est réduit chaque année..
Le montant des allocations est fixé au 1er avril de chaque année en fonction d’un certain pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF). C’est ainsi que l’allocation pour 2 enfants est égale à 32% de la BMAF, pour 3 enfants à 73%, pour 4 enfants à 114% et ce pour l’ensemble des différentes prestations familiales. Cette BMAF devrait être revalorisée chaque année en fonction du taux d’inflation mais en réalité il n’en est rien.
Sous le gouvernement de François Fillon par exemple, le montant de la BMAF était de 395,04 € en 2011. Elle est passée à 399 € au 1er avril 2012, soit une augmentation de 1 % alors que le taux d’inflation était de 2,1% pour l’année 2011, ce qui correspond à une baisse du montant des allocations de 1,1% !
Sous le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, le montant de la BMAF de 399 € en 2012 est passé à 403,79 € au 1er avril 2013, soit une augmentation de 1,01 % alors que le taux d’inflation était de 2 % pour l’année 2012, ce qui correspond à une baisse du montant des allocations de 1 % !
Puis, cerise sur le gâteau, le nouveau Premier ministre, Manuel Valls, a prévu carrément le gel de toutes les prestations sociales pendant au moins dix-huit mois. Les allocations familiales ainsi que les retraites, les aides à la garde d’enfant et au logement baisseront donc encore plus qu’avec la technique précédente d’indexation partielle par rapport à l’inflation !
De plus, comme il n’y a pas de petites économies, dit le proverbe, le législateur a eu la bonne idée de grignoter encore quelques euros sur le dos des allocataires grâce à une retenue de 0,50 % opéré au titre de la contribution au recouvrement de la dette sociale (CRDS)**.
Aujourd’hui, si le gouvernement de Manuel Valls a décidé une désindexation complète des prestations sociales, c’est parce que c’est une mesure aussi discrète que massive. Elle permet de dégager immédiatement plusieurs milliards d’euros d’économies, sans déclencher de protestations massives.
Une réforme des modalités d’attribution des allocations familiales devrait pourtant être mené prioritairement par un gouvernement de gauche mais celui-ci préfère rogner le pouvoir d’achat des Français qui les touchent, sans avoir besoin de s’attaquer à la réforme de la répartition de ces prestations.
François Hollande, qui s’est encore félicité récemment devant la presse, d’être un réformiste notoire devrait se rappeler qu’il existe d’autres moyens plus efficaces et plus justes pour réduire les déficits publics comme la lutte contre la fraude fiscale qui coûte chaque année à la France entre 60 et 80 milliards d’euros ou la réduction drastique des niches fiscales qui vont coûter au pays en 2014 plus de 80 milliards d’euros…
* Montants des allocations familiales du 1er avril 2014 au 31 mars 2015 :
– Pour deux enfants : 129,99 €– Pour trois enfants : 296, 53 €
– pour 4 enfants : 463,08 €
– par enfant supplémentaire : 166,55 €
**Montants nets réellement perçus par les allocataires, après déduction de la CRDS :
– pour 2 enfants : 129,35 €
– pour 3 enfants : 295,05 €
– pour 4 enfants : 460,77 €
– par enfant supplémentaire : 165,72 €
Auteur (son site) pour Agoravox
Lire les articles de’Albert Ricchi
- Traité de libre-échange transatlantique : les renards dansent autour du poulailler…
- Elections européennes du 25 mai : les sornettes de François Hollande et de Manuel Valls…
- Pacte de responsabilité et de solidarité : la réforme fiscale vite oubliée par Manuel Valls…
Commentaire Par AlbatrosE suite à l’article:
Excellent article. J’ajouterai un point.
Quand les enfants sont mineurs, donc dépendants des parents, on verse des allocations qui ne dépendent pas du revenu.
Et quand ils deviennent majeurs, donc censés indépendants, on définit leurs bourses d’études en fonction du revenu des parents.
C’est le monde à l’envers, c’est complètement pourri. C’est exactement l’inverse qu’il faut faire : des allocations pour les enfants mineurs en fonction des revenus, des bourses identiques pour tous les étudiants.
Ce genre de détail sordide résume toute la pauvre mentalité bureaucrassique franchouillarde. Il est à parier que si on proposait une telle évolution, on aurait des milliers de connards à manifester contre.
Je souhaite réagir sur plusieurs points.
1. Est-ce que la France a besoin d’enfants (français) ? Je n’en suis pas sûr, il y a aujourd’hui suffisamment de candidats immigrés pour compenser une perte éventuelle de natalité. En conséquence de quoi l’effort national n’a pas d’intérêt particulier à favoriser financièrement les naissances.
2. Quand on décide d’avoir des enfants (j’en ai 3), on est sensé les assumer, c’est à dire faire sans les allocs. Se prendre en charge en résumé, ainsi que ses enfants.
3. Je paie des impôts, beaucoup plus que beaucoup. Au nom de quoi je n’aurais pas droit à toucher au moins la même chose que les autres ? Quand je mets mes enfants au périscolaire – structures et encadrants payés en quasi totalité par mes impôts – on me demande à moi 5 fois plus qu’à d’autres (qui manque de moyens ne participe pas du tout au financement de ces structures). Question de principe, je les ai mis dans le privé où je paie quasi moitié prix, et j’attends avec sérénité le moment où le public n’existera plus (on n’en est plus loin d’ailleurs).
4. Je serai curieux de savoir le pourcentage de familles aisées qui bénéficent des allocs ; je pronostique « dérisoire », et je trouve déplorable d’en seulement parler. C’est une de ces questions de principe qui font que certains comme moi ont juste encore envie de partir. Ce que j’ai fait pour la sécu : à force de tirer sur la corde elle a craqué, et aujourd’hui je ne contribue plus du tout à la sécu en France.
A bon entendeur, salut !
Oui, Salut et bon vent.
Cordialement bien sur.