On nous fait prendre des vessies, pour des lanternes. Là où devraient finir les oligarques. Ah ça ira, ça ira, ça ira!!
Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Il est de bon ton, dans l’économie de marché administrée dans laquelle nous vivons, de ne parler QUE des bonnes nouvelles. En effet, il est essentiel de remonter le moral de tous au cric et de faire croire que tout va bien. Il y a bien quelques menus problèmes mais rien d’insurmontable en termes de communication. Il faut juste trouver une excuse plus ou moins plausible comme le froid l’hiver aux États-Unis ou le manque de froid l’hiver en Europe, ou encore l’Ukraine…
Je vous indique en lien en bas d’article les derniers chiffres (complets) d’Eurostat sur la croissance en Europe. De très nombreux pays importants sont sans ambiguïté en récession/déflation, appelez cela comme vous le souhaitez, avec par exemple le Portugal qui ne va pas bien, la France et sa croissance zéro ou encore bien plus grave, les Pays-Bas, véritable indicateur avancé de la croissance allemande en récession d’un beau -1,4 % ! Mais qu’à cela ne tienne, l’Estonie remonte la moyenne, du coup l’Europe est en croissance. Bonne blague mais surtout foutage de gueule économique magistral. Ne soyons pas dupes.
Oui les prix sont en réalité administrés. Ho pas d’inquiétude mes braves lecteurs, je ne vous parle pas du prix de vos pâtes ou de votre Caddy… là les prix sont libres, il faut bien que la piétaille serve à quelque chose et votre seule utilité sociale est de donner votre argent aux entreprises. Non, je parle du prix des actifs comme les actions et les obligations dont le prix ne peut et ne doit QUE monter. Toute baisse est rendue impossible par les politiques monétaires des banques centrales qui ont pour résultat d’empêcher le marché de faire son office à savoir fixer le prix.
En gros donc, tout monte. Tout sauf les salaires… d’où le phénomène d’indéflation que j’évoquais dans l’un de mes papiers. D’un côté les actifs sont en hausse et de l’autre les salaires et le pouvoir d’achat des gens sont en baisse sous la pression de la crise, d’un chômage endémique et de politiques de dumping salarial ou social.
L’inflation pour les uns et la déflation pour les autres. Encore plus et encore moins.
À propos d’encore un peu moins, il ne fait plus très froid aux États-Unis et pourtant l’emploi ne montre pas un dynamisme à toute épreuve, loin de là.
US/Eco : inscriptions hebdomadaires au chômage décevantes
Encore une fois, les chiffres d’une semaine sur l’autre n’ont pas grande importance car ce qui est important, c’est la tendance. Certes, la tendance sur le chômage américain est sans conteste baissière mais les statistiques sont tellement fausses que même Janet Yellen, la « gouverneuse » de la FED, a dit qu’il ne fallait vraiment plus regarder les statistiques de l’emploi… On croit rêver…
Cette semaine, les chiffres ne sont pas excellents puisqu’il y a eu 326 000 nouveaux chômeurs, en hausse de 28 000 par rapport à la semaine précédente. Pas terrible. Le « consensus », c’est-à-dire la moyenne des attentes des analystes des marchés, s’établissait à 310 000 nouveaux chômeurs. Raté. Mais ce n’est pas grave, tout va très bien et tout le monde achète des actions. De toutes les façons, vendre est interdit. Vous n’avez que le droit d’acheter.
Les chiffres, comme le titre de la dépêche l’indique, sont juste décevants, rien de bien grave, on vous l’a dit. Mais ce n’est pas tout.
Europe/PMI-La croissance est restée solide en mai en zone euro
Vous venez de lire le titre surréaliste de la dépêche de l’Agence de Presse Reuters concernant la croissance dans le secteur privé en Europe. Vous venez de lire : la croissance reste solide en mai en Europe. Super. Génial, quelle bonne nouvelle. Comme lire plus de 20 caractères d’affilée c’est fatiguant, 90 % des gens vont retenir « tout va bien croissance solide »… Ouf, et tous ces oiseaux de malheur qui osent dire que ce n’est pas si bon… ils sont « graves » tous ces « pessimistes »… ils cassent le moral de tout le monde, il faudrait les enfermer…
Alors en bon contrarien, je lis les petits caractères (toujours), et plus ils sont petits plus je fais attention. Je vous propose donc de regarder avec moi les chiffres qui permettent d’affirmer que la croissance est restée solide. Allez, venez, c’est drôle et on va bien se marrer.
Bon, ça commence super fort. Dès la première phrase du texte, on se bidonne, écoutez-moi ça (lisez-le à voix haute c’est encore plus drôle) : « La croissance du secteur privé est restée forte en mai, quoique en très légère décélération mais des baisses de prix radicales ont permis de limiter ce fléchissement. »
Hahahahahaha la croissance est forte mais comme elle décélère, on ne vous dira pas qu’elle baisse mais en fait elle baisse ! Et puis elle est très légère la « décélération » car je cite « des baisses de prix radicales ont permis de limiter ce fléchissement »… Vous serez d’accord avec moi, le mot « fléchissement » c’est tout doux, ce n’est pas inquiétant, c’est une « baissounette » de rien du tout ! Non, le plus drôle c’est que la croissance ne s’effondre pas uniquement parce que les baisses de prix ont été radicales hahahaha…. Là, c’est sûr que la croissance en Europe en mai, vue sous cet angle-là, elle a l’air vraiment hyper forte et robuste… et moi je m’appelle Gertrude.Bon, l’indice machin chouette ressort à 53,9 contre 54,0 en avril, ce qui est conforme au consensus. Donc ça baisse d’un poil… Et dans le détail, si l’indice des services est de 53,5 contre 53,1 en avril contre 53,0 attendu pour l’indice manufacturier, on recule juste à 52,5 contre 53,4 et un consensus de 53,2…
Du coup, l’analyse de l’économiste de Markit (c’est le nom de l’indice en question) est la suivante selon Reuters (qui a pour instruction de dire que tout va bien) :
« Cela ne change en rien l’image d’une zone euro ayant l’une de ses meilleures poussées de croissance des trois dernières année. Elle est généralisée, à l’exception de la France. »C’est sûr que là, nous sommes confrontés manifestement à une poussée de croissance phénoménale avec en réalité un léger « fléchissement » de cette même croissance et dont l’effondrement reste mesuré grâce uniquement à des « baisses de prix radicales »… Il n’y a pas qu’une poussée de croissance en Europe… il y a aussi une grosse poussée de connerie !
Préparez-vous et restez à l’écoute.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT pour Le Contrarien