De la fiction à la dure réalité des chiffres : la France est-elle vraiment à l’abri de la faillite ?

De François Fillon à Michel Sapin, les politiques aux affaires n’hésitent pas à parler d’un état de faillite. Mais s’ils évoquent, c’est en théorie, tant l’idée leur paraît saugrenue que la France puisse dans les faits en être réduite à faire défaut. Un scénario que Gaspard Koenig n’a pourtant pas hésité à explorer dans son dernier roman, « La nuit de la faillite ». Avec un certain réalisme… et des arguments.

Fermeture définitive d'un magasin Virgin français en faillite.

Fermeture définitive d’un magasin Virgin français en faillite.  Crédit Reuters

Atlantico : En septembre 2007, François Fillon, alors Premier ministre, déclarait déjà : « Je suis à la tête d’un État en faillite ». La situation économique actuelle du pays est-elle encore plus préoccupante qu’il n’y paraît ?

Gaspard Koenig : Ce qui est amusant, c’est que Michel Sapin a dit la même chose en janvier de cette année : « Il y a un État, mais c’est un État totalement en faillite ». Comme si en arrivant au pouvoir, les gouvernants découvraient l’étendue des dégâts : l’Etat doit rembourser autour de 150 Milliards d’euros par an (son « besoin de financement »). Pour rappel, les recettes du même Etat sont d’un peu plus de 300 Milliards d’euros par an… Même si ces chiffres ne sont pas strictement comparables, cela donne une idée de la pression qui pèse sur la France pour rembourser la dette publique, et sans cesse réemprunter pour rembourser puisque le déficit est structurel. L’Etat est en roll-over permanent, sur la brèche. Pire encore, la dette ne finance pas l’avenir, mais à 95% les dépenses de fonctionnement. On ne s’endette pas pour investir, mais pour payer nos fournisseurs… en demandant à nos enfants de régler la facture finale.

Gérard Thoris : Lorsqu’une entreprise est incapable d’honorer l’une de ses échéances, elle est obligée de déposer son bilan. Vient alors une période intermédiaire où un administrateur judiciaire examine les comptes de l’entreprise pour savoir si elle a un avenir. Lorsque la valeur des actifs est inférieure aux dettes accumulées, l’entreprise peut être déclarée en faillite. Selon la législation en vigueur, les dirigeants en place ou un repreneur extérieur peuvent faire une offre de reprise. Leur démarche est fondée sur le fait que les actifs sont susceptibles de créer de la valeur ajoutée profitable sous réserve que tout ou partie des créanciers renoncent à leur dette.

On voit donc clairement qu’il faut distinguer les flux et les stocks. C’est parce que les flux de revenus sont inférieurs aux décaissements qu’une entreprise dépose son bilan. Mais c’est parce que les stocks d’actifs ont une valeur inférieure au stock de dettes que l’entreprise est mise en faillite.

En 2007, il n’y avait aucun problème ni de flux, ni de stocks. Certes, le budget de l’État était déficitaire mais le stock de dettes publiques était parfaitement gérable. François Fillon extrapolait à partir de l’idée que l’État « n’avait jamais voté un budget en équilibre en 25 ans ». Cependant, tant que la croissance économique nominale est supérieure au taux d’intérêt nominal, les flux de revenus (impôts et cotisations sociales) permettent d’honorer facilement les intérêts de la dette. Cela suffit pour que le stock de dettes ne s’accroisse pas et il n’y a aucun problème ni de cessation de paiement, ni de faillite.

Par contre, il était clair dès cette époque que, depuis 1996, les comptes sociaux allaient à la dérive.

Les comptes publics sont-ils fiables ? Quelles sont les bombes à retardement ?

Gaspard Koenig : Instinctivement, je dirais oui, l’administration fait bien son travail pour recycler la dette et l’Agence France Trésor (AFT) qui émet la dette souveraine. Ce sont les politiques qui sont collectivement coupables de n’avoir pas entendu les multiples rappels à l’ordre (dont le fameux de Michel Pébereau en 2004) et de ne jamais avoir considéré le sujet comme une priorité (la France n’a pas eu un budget à l’équilibre depuis quarante ans). A force de mettre la poussière sous le tapis, le tapis va s’envoler.

Notons néanmoins une vraie limite à la fiabilité des comptes : les engagements « hors bilan » ne sont pas comptabilisés (garanties souveraines, régimes sociaux, retraites, etc.). Ainsi le besoin de financement annuel réel monte à 350 Milliards d’eruros selon le FMI, en prenant en compte l’ensemble des administrations publiques et de la dette sociale.
Gérard Thoris : Le bilan le plus inquiétant est aussi le bilan le mieux caché. Il s’agit du déséquilibre des comptes sociaux. En 1996, Alain Juppé invente la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES). A l’époque, tout le monde fut content car il s’agissait de faire payer le déficit de la Sécurité sociale par les générations futures. Pas besoin d’augmenter les charges sociales et de jouer une nouvelle fois le psychodrame de savoir si ce sont les salariés ou les employeurs qui devraient en supporter la charge. On devrait savoir une fois pour toutes que ce sont toujours les salariés qui paient, sous la forme de perte de pouvoir d’achat s’ils ont un emploi, sous la forme du chômage s’ils le perdent du fait de coûts salariaux unitaires supérieurs à ceux des concurrents étrangers.

Mais, rétrospectivement, la création de la CADES est le premier moratoire de la France, organisé par elle-même pour elle-même. Lorsqu’une entreprise dépose le bilan, l’une des solutions possibles consiste en effet à obtenir des banquiers qu’ils allongent la durée des prêts pour diminuer le poids présent de l’amortissement de la dette. C’est bien ainsi que fonctionne la CADES. D’où l’intérêt de voir où l’on en est. Crée en 1996 pour 13 ans, la CADES sera théoriquement éteinte en 2025. A l’origine, elle devait amortir 44,7 Milliards d’euros en 13 ans ; aujourd’hui, sa capacité d’endettement a été portée à 234,6 Milliards d’euros (1).

Il ne s’agit pas, à proprement parler, de hors bilan puisque la dette portée par la CADES est intégrée dans la dette publique. Mais il s’agit d’un exemple prototypique de dette sans collatéral. Normalement, une dette sert à acquérir des actifs qui permettent d’assurer l’amortissement du prêt. Ici, la dette est constituée pour payer des dépenses courantes (soins de santé, prestations de retraite) dont le potentiel de croissance disparaît dans l’acte même de la prestation de service. A ce titre, la réforme des retraites vise d’abord à arrêter la création de dettes sans collatéraux.

Par contre, un bilan bien construit devrait constituer des provisions pour des risques futurs de dépréciation d’actifs. C’est le sens de l’exercice d’évaluation de la soutenabilité de la dette publique auquel la Commission européenne se livre régulièrement. L’exercice réalisé en 2009, avant que la crise économique ne produise ses effets en termes de croissance économique, supposait que la France fasse un effort budgétaire de 5,5 points de PIB pour financer les dépenses liées au vieillissement de la population tout en stabilisant la dette à horizon 2060. Cet exercice d’école n’est plus de mise, on s’en doute bien !

La France a tendance à considérer que la faillite est impossible. Les arguments généralement avancés en ce sens tiennent-ils ?

Gaspard Koenig : De quelles réserves insoupçonnées la France disposerait-elle ? Le gaz de schiste ? Cette illusion de l’infaillibilité est peut-être ce qu’il y a de plus grave et de plus impardonnable. On ne s’imagine jamais, faute d’imagination, que la digue du barrage peut céder. Et quand elle cède, ce sont des populations entières qui sont englouties.

N’oublions pas que notre dette est détenue à 2/3 par des étrangers, ce qui nous a permis de bénéficier de taux d’intérêt très avantageux. L’État n’a pratiquement aucun moyen de pression sur eux. Ils sont libres d’acheter aujourd’hui… et de vendre demain. L’État ne pourra pas, lui, brader du jour au lendemain ses actifs.

Suite de l’interview sur Atlantico.fr

24 Commentaires

  1. En faillite ?
    Pourquoi ?
    La France emprunte aux banque de l’argent que les banques n’ont pas.
    Pour être précis, pour prêter 100 € une banque doit en posséder environ 15 … donc 85 % du capital n’est pas dû et les intérêts doivent être calculés sur les 15 % vraiment possédés donc si on révise tous ces montants depuis 1973 les banques nous doivent énormément de fric.

    Je propose donc qu’elles soient nationalisées d’autorité sans contre partie financière.

    • Et encore, il me semble avoir lu que l’effet de levier moyen des banques françaises étaient de 30 !
      Et je suis d’accord, le raisonnement est pris à l’envers sans que ça ne choque personne. Ce sont les banques privées qui doivent de l’argent aux gens.

    • Une usine à poison, même nationalisée, reste une usine à poison. Intrinsèquement, toute banque pécuniaire est vicieuse puisque sert la marchandisation plutôt que l’homéostasie.
      La vie est inestimable, vouloir la contrôler avec des flux monétaires n’est pas raisonnable.
      Heureusement, avec nos plasticités nous pouvons toujours progresser, voire nous transmuter…
      { ♥ }

    • Ce dont tu parle ce sont les emprunts aux entreprises et aux particuliers, ils peuvent preter jusqu’a un certain ratio, l’argent de base est cree par la bce prete aux banques qui prete au detail, leur marge doit prendre en compte les defauts de remboursement.

      La dete de l etat n’est pas detenue par les banques, elle est vendu sous forme d obligation notammement pour des fonds de retraites ou d’epargne. C’est sur c’est plus facile de braquer des retraites que de rembourser, c’est lache et immorale mais c est ce que va faire l’etat vu le courage de nos dirigeant.
      ce systeme (65% du pib qui passe par un etat irresponsable) est une usine a financer les conneries, ca s’arretera parce ceux qui bossent n’arriveront plus a payer

  2. L’UE travaille sur une directive qui limitera les retraits à 100 ou 200 euros par jour.

    Les gouvernements européens travaillent à un compromis sur la directive de l’UE pour le paiement de la garantie des dépôts des clients lors de faillites bancaires. Un document de travail de la présidence de l’UE, qui est assurée depuis le 1er Juillet par la Lituanie, montre que la directive pourrait être prête dès cette année.

    http://fortune.fdesouche.com/316233-lue-travaille-sur-une-directive-qui-limitera-les-retraits-dargent-des-clients-de-banques-en-faillite-100-ou-200-euros-par-jour

    • Ils doivent s’attendre à des Bank Runs … De son côté, le FMI (?) n’exclut pas un risque d’explosion sociale, et les dirigeants européens semblent inquiets de la désaffection des peuples envers « l’idéal européen » …

  3. Ca sent le sapin !

  4. Faillite morale et civique certainement.
    Belle décadence !

  5. Chaque seconde les intérêts de la dette publique de la France coûte 2490 €, soit plus de 43 milliards payés chaque année sur une dette publique totale de 1 788 800 000 000 environ en septembre 2011
    soit une dette de 25 830 euros par Français….

    Cette charge de la dette est agravée par un déficit de près de 174 milliards € en 2010

    http://www.planetoscope.com/comptes-publics/1184-compteur-des-interets-de-la-dette-publique-francaise-les-interets-payes-par-la-france.html

    http://tempsreel.nouvelobs.com/le-dossier-de-l-obs/20110630.OBS6191/a-qui-appartient-la-france.html

    la note de standartMarabou-fitch est AAA

  6. LA DETTE N’EXISTE PAS,les idiots de BFMTV comme DELAMARCHE et autres pantins OUI…
    La baudruche F HOLLANDE n’y est pour rien,c’est juste VIRTUEL.
    Nous sommes vendus .
    Rien n’est vrais dans cette illusion de dettes sauf NOUS les pollués,vaccinés,chemtraillés,fluorés,une armée de merde qui vas au MALI hahahah,ici en France c’est des FABIUS ,ATTALI et autres BHL qui empoisonnent .
    Si jamais il reste quelque chose de la France ce seras LA MERDE.

    • La dette n’existe pas?
      Et le salaire des fonctionnaires français, des gens au rsa, les allocations diverses et variées et tout le toutim, vu que les impôts de la petite quantité de gens qui les paie ne suffisent pas, ce n’est pas en s’endettant qu’on peut payer ça?
      Les intérêts de la dette sont injustes car privatisés, ça oui ok, mais quand on dépense plus que ce qu’on gagne, on fait de la dette, qui est réelle.
      Ce qui est injuste c’est la privatisation de la dette par les banques qui a créé cette situation impossible.

      • On parle souvent des fonctionnaires mais savez-vous que les fonctionnaires sont répartis sur 3 catégories : Etat, Collectivités territoriales et Hospitalière.
        Certains après 23 ans de carrière de bons et loyaux services ne gagnent pas plus de 1.200 euros net par mois.
        Ca s’est fait
        Ensuite si en 1973 on nous a promis contre un vote des avantages, est-ce qu’ils nous ont dit que ses avantages (CAF, SS,Retraites etc) seraient de l’argent que la France n’avait pas, NON. On s’est tous fait avoir même la génération Miterrand ! On nous a endettés sans notre consentement. Ils ont signés les avantages à Crédit. Maintenant ce sont nos enfants, petits enfants voir arrières petits enfants qui vont payer !
        J’ai voté et je m’en mord les doigts, j’y ai cru à ce monde meilleur.
        Maintenant que reste-t-il à faire ? Faire attention à ce que l’on possède même si c’est pas grand chose, retirer le plus de liquide possible des banques ( si on en a) et comme d’hab vivre au jour le jour. Si ça clash, nous les petites gens, on saura mieux se débrouillés que les Nantis.Il est vrai qu’en cas de chaos, la violence prendra le dessus, mais faut pas trop prendre le peuple pour des abrutis !

        • J’ai jamais dit que les fonctionnaires étaient bien payé.
          Mais par rapport à l’Allemagne, par habitant on en a 80% en plus. Ce n’est pas rien. C’est du chômage déguisé. Et oui,ce n’est pas dans la fonction publique hospitalière qu’on trouve les gens en trop, on aura deviné 😉
          Les fonctionnaires ont toujours été une variable utilisé par le gouvernement pour faire baisser le chômage. Mais tout ça a un prix.

  7. Pour nous libérer de l’usure cupide, si nous réussissions à créer une société sans monnaie ? http://www.voter-a-m.fr/
    { ♥ }

    • bonne idée,supprimons les vampires de Banquiers,on a pas besoin de ces gens,c’est idiot d’avoir des couillons qui fabriquent notre infortune avec nos idiots qui votent et d’autres qui font la politique,demain ils empoisonneront notre EAU ,hahaha,non,c’est prévus comme bouffer de la merde avec des chemtrail ,faisons une pétition bordel,montrons qu’on a des couilles comme Laurent Louis.et l’autre devant la Banque,,s’il reste des gens ce seront PAS EUX.

      • Avant de vouloir changer le Monde, cf. la loi d’attraction/ karma, il serait nécessaire de changer nos mondes respectifs. Arrivons-nous déjà à vivre une seule journée de 24H sans plus penser à l’argent ?

  8. faut supprimer la bourse !!!

    • Supprimons la bourse! A toi de jouer mon gars! Je crois que je vais vraiment arrêter d’être des moutons enragés! Je dois être trop évolué et dépassé par la surdose de merde qu’on m’injecte dans la rétine! Le monde est trop divisé pour que je puisse m’entendre avec lui!

    • Complexe de castration?

  9. Bonsoir,

    HS : Vidéo provenant de national géographic channel

    http://video-documentaire.com/videos/paranormal-matiere-de-l-espace/

    Qu’en pensez vous ? Pourquoi la justification de dire que c’est pas un chemtrail (insinué)? En tout cas des similités troublantes …

  10. pour shunter les banquiers suffit juste d’utiliser dans un max d’échanges une monnaie qu’ils ne reconnaissent pas… aujourd’hui sans attendre ! comme les politiques défiscalisons…

    troc, s.e.l, j.e.u, métaux précieux ou non précieux (ex: cuivre, étain, zinc, …)

    les échanges prendront un peu plus de temps certes mais ca tombe bien puisque si vous ne l’êtes pas déjà vous finirez chômeur, alors du temps vous en aurez…

    « Qui veut faire quelque chose trouve un moyen ; qui ne veut rien faire trouve une excuse. » Proverbe arabe

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