Les requins se mangent entre eux quand la disette se profile… Et ô surprise, il y a une banque française…
WASHINGTON (Reuters) – L’agence fédérale américaine de supervision des prêts hypothécaires a porté plainte vendredi contre 17 grands établissements financiers internationaux pour un total de pertes de 41 milliards de dollars sur des obligations liées aux subprimes.
L’Agence fédérale de financement du logement (Federal Housing Finance Agency), qui supervise les géants Fannie Mae et Freddie Mac, reproche à ces établissements parmi lesquels figurent Bank of America, JP Morgan Chase, Goldman Sachs, Deutsche Bank ou encore Société générale, d’avoir vendu des obligations adossées à des crédits immobiliers en présentant ces opérations sous un jour inexact.
Le directeur de la FHFA, Edward DeMarco, cherche à minimiser les pertes de Fannie Mae et Freddie Mac, qui ont dû être nationalisés à la faveur de la crise de 2008. Fannie et Freddie garantissent les obligations adossés aux crédits immobiliers.
Les banques ont fini en nette baisse à Wall Street. Bank of America a perdu 8,34% à 7,25 dollars, JP Morgan Chase 4,6% à 34,63 dollars et Goldman Sachs 4,55% à 107,06 dollars. L’indice KBW du secteur bancaire a perdu 4,5%.
La FHFA et divers investisseurs affirment que les banques, en titrisant les crédits immobiliers octroyés aux particuliers dans le but de les vendre aux investisseurs, n’ont pas fait toutes les vérifications nécessaires et ont dissimulé, ou n’ont pas présenté correctement, la qualité des prêts sous-jacents ainsi que la capacité des emprunteurs à payer.
Au fur et à mesure que les emprunteurs ne pouvant faire face à leurs échéances sont devenus plus nombreux, la valeur des titres adossés à leurs prêts a baissé, entraînant des pertes pour les investisseurs.
La FHFA poursuit ainsi JP Morgan pour des pertes sur titres totalisant plus de 33 milliards de dollars. La plainte à l’encontre de la Société générale est plus modeste : près de 1,3 milliard de dollars.
Dans sa plainte contre Merrill Lynch, la FHFA écrit : « Le défendeur a faussement exposé que les crédits hypothécaires sous-jacents respectaient certaines normes de garanties ou lignes directrices, y compris des présentations qui ont exagéré de façon importante la capacité des emprunteurs à rembourser leurs crédits immobiliers (…) ».
FACTEURS D’INQUIÉTUDE
L’agence fédérale de financement immobilier a déjà porté plainte contre UBS en juillet, cherchant à récupérer au moins 900 millions de dollars encourues sur 4,5 milliards de dollars de dette.
Certains craignent que la nouvelle affaire officialisée vendredi n’entrave le règlement que sont en train de négocier les plus grandes banques avec les procureurs généraux des 50 Etats américains sur la question des abus qui ont eu lieu en matière de crédit immobilier.
Les banques pourraient en effet être réticentes à conclure ce règlement global si elles savent que d’autres organes de l’Etat sont susceptibles de leur réclamer aussi de l’argent.
Les principales banques américaines sont déjà confrontées à la possibilité de devoir débourser plusieurs dizaines de milliards de dollars en règlement de litiges relatifs à leur activité dans le crédit hypothécaire et à leurs pratiques en matière de saisie immobilière.
De tels débours réduiraient davantage leurs niveaux de capital et pourraient réduire leur capacité à prêter alors même que le marché immobilier est en berne et que l’économie américaine dans son ensemble montre des signes de ralentissement.
Les valeurs bancaires pâtissent aussi des signes montrant que la Réserve fédérale pourrait commencer à vendre de la dette à court terme figurant dans ses livres pour acheter des titres de plus longue échéance dans le but de faire baisser les rendements à long terme, dans le cadre de mesures de relance.
Une telle action, connue en anglais sous le nom « operation twist », pourrait affecter les marges des banques qui se financent à court terme et prêtent à long terme.
Signe de l’inquiétude qui entoure le secteur bancaire, la Réserve fédérale américaine a demandé à Bank of America de présenter les mesures qu’elle prendrait si les conditions d’activité se dégradaient, rapporte vendredi le Wall Street Journal, citant des personnes proches du dossier.
Les pertes résultant de la détérioration accélérée des crédits immobiliers subprimes et autres ont obligé le gouvernement à nationaliser Fannie Mae et Freddie Mac le 7 septembre 2008. Depuis, les contribuables américains ont dépensé plus de 140 milliards de dollars pour maintenir à flot ces deux piliers du financement immobilier.
Danielle Rouquié pour le service français, avec Wilfrid Exbrayat et Natalie Huet
Source: reuters