Je vous dis souvent « nous ne savons pas pour le moment, mais nous finirons par avoir l’information », et encore une fois, vous allez avoir la confirmation de ce principe que vous devez garder dans un coin de votre esprit, car c’est cela qui permet de faire des hypothèses et de les vérifier même si c’est plusieurs années plus tard.
C’est une dépêche AFP qui revient sur une note récente publiée par la BCE et qui lève le voile (très partiellement, rassurez-vous) sur les gros mouvements d’argent, les très gros même, autour des achats et ventes de dettes souveraines.
Sans être des informations top secret-défense, cela n’en reste pas moins des informations qui ne sont pas divulguées.
Dans cette note, la BCE « analyse les mouvements dans la composition des portefeuilles des principales catégories d’investisseurs depuis le début des achats massifs de la BCE (QE). Plus précisément sur la période qui va du deuxième trimestre 2015 à la fin de 2016 ».
Les informations qui nous sont données (officiellement) ne sont donc pas de toute première fraîcheur, puisqu’elles datent de 3 à 4 ans. Mais ce n’est pas grave. Au contraire même, car cela permet de confirmer les analyses faites à l’époque et qui restent d’actualité, à savoir que si les banques, les investisseurs (les gros poissons) se défont logiquement de ces actifs risqués que sont les dettes d’États par rapport aux rendements qu’ils offrent, les compagnies d’assurance, elles, en reprennent !
Et qui les compagnies d’assurance représentent ? Vous !
Avec quel argent les compagnies d’assurance vie achètent-elles donc de « bonnes obligations » bien moisies ? Avec le vôtre !
Ces investisseurs qui ont vendu massivement de la dette à la BCE
D’après l’AFP, c’est donc les acteurs étrangers « qui ont le plus cédé de dette d’États européens à la BCE. Mais la plupart des investisseurs ont profité de l’opération pour réduire le risque de leur portefeuille ».
Pour avoir une idée de la volumétrie dont on parle, sachez que la BCE, depuis le lancement de son programme de rachat de dette, a acheté pour plus de 2 000 milliards d’obligations souveraines !!
Oui, vous avez bien lu.
2 000 milliards d’euros ! C’est l’équivalent du PIB de la France ou encore de notre dette, l’un et l’autre étant devenus sensiblement semblables !
C’est donc les investisseurs situés hors zone euro et dits « non-résidents qui ont vendu le plus de titres avec 687 milliards d’euros refourgués à la Banque centrale européenne, c’est dire le degré de confiance international accordé à l’euro et aux dettes souveraines européennes.
Selon la note, donc pour 2016 au plus tard (enfin c’est ce que j’en déduis), les investisseurs non-résidents ne détenaient plus que 36 % de l’encours de dette d’États de la zone euro.
Conclusion ? La BCE nationalise les dettes de la zone euro ! Enfin dans les faits, c’est bien ce qu’il se passe et c’est logique, car même si on ne veut pas vous le dire, ces dettes ne seront jamais remboursées, et il faut être assez benêt pour croire l’inverse.
Tous ceux ayant deux sous de jugeote sont donc depuis des années en train de sauver… leurs sous ! Et vous ?
Je dis « et vous », mais les « et vous » ont tout de même vendu pour 78 milliards d’euros d’obligations, en particulier en Europe du Sud, mais cette décollecte n’est pas tant liée au fait que les épargnants avaient peur de la faillite qu’ils avaient besoin de leur argent pour boucler des fins de mois rendues très difficiles par la récession qui touche l’Europe du Sud.« Parmi les grands vendeurs, on compte également les banques européennes (-267 milliards), les OPCVM (-103 milliards) et les ménages (-78 milliards), particulièrement dans les pays d’Europe du Sud. À l’inverse, notent les auteurs de l’étude, «les assurances sont restées acheteuses nettes des obligations souveraines européennes». Ce sont en effet les seuls investisseurs institutionnels à afficher un solde positif, particulièrement dans les pays qualifiés de « vulnérables « par l’étude (Europe du Sud et Irlande). »
Un biais domestique fort pour les assureurs
« Une tendance qui profite principalement à la dette de leur État d’origine. L’étude constate que ce biais domestique, bien connu pour les banques, est également très marqué pour d’autres secteurs. «C’est très fortement le cas par exemple pour les assurances des pays «vulnérables», qui détiennent 86 % de leurs titres éligibles en titres domestiques», souligne le rapport. »
En gros, si vous avez un contrat d’assurance vie en fonds euros, il a de fortes chances de ne contenir que de bonnes obligations de votre État… un État qui, un jour, ne remboursera pas ou en monnaie de singe et, pour rester dans la métaphore animalière, vous finirez comme le dindon de la farce, ce qui est toujours le cas pour les épargnants dans toute crise de dette.
Autre enseignement fondamental que l’on peut retirer de cette analyse officielle de la BCE, c’est qu’il n’existe plus de marché de la dette, et donc plus de prix possible pour l’argent.
C’est cela que je vous avais expliqué dans mon article consacré à l’épargne qui est devenue totalement inutile.
C’est la BCE qui assure la liquidité du marché obligataire et donc intervient en dernier recours pour maintenir l’illusion que tout va bien.
En réalité, quand vous faites un retrait sur votre assurance vie, c’est la BCE qui vous fait le chèque avec de l’argent qui n’existe pas et qu’elle « imprime » de toutes pièces.
Avouez que présentée ainsi, la réalité n’est pas aussi rose que ce que l’on voudrait bien croire pour notre repos de l’âme.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !
Charles SANNAT pour Insolentiae
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