A saisir ! Esclaves européens en solde

Ils viennent trimer sur les chantiers, dans les transports ou les abattoirs, pour 3 à 6 € l’heure, au mépris de toutes les règles de sécurité. Et le plus légalement du monde. Car ces travailleurs « low cost » sont tous européens.

20 MINUTES/SIPA

20 MINUTES/SIPA
Augusto de Azevedo Monteiro voulait gagner sa vie. Il l’a perdue. Maçon détaché en France par EYP, une boîte portugaise, cet ouvrier usinait sur l’air très en vogue de la sous-traitance à bas coût dans la gadoue d’un chantier de Spie Batignolles, à Villeneuve-la-Garenne. Le 6 décembre, il est mort écrasé par une dalle qu’un coffrage hâtif à force de cadences infernales n’a pas su contenir.

Enfant d’Esposende, ville voisine de Braga irriguée par la crise et ses misérables affluents, Augusto de Azevedo Monteiro avait 35 ans, une famille et plus un euro rouillé en poche. Les 565 € brut de son dernier Smic flambés, ses allocations chômage taries, il avait opté pour une mission en France. « Notre pays agonise et nous constituons une main-d’œuvre bon marché, confie une salariée francophone d’EYP. On sait que Spie fait appel à nous parce que nous coûtons moins que nos concurrents français. »

Roumaines, polonaises, espagnoles ou portugaises, les plaques d’immatriculation des camionnettes de société ou d’agences d’intérim alignées sur le parking de Villeneuve-la-Garenne disent la géographie de la crise. A en croire le communicant de Spie, pourtant, « EYP a été préféré à deux candidats hexagonaux pour des raisons de disponibilité, rien d’autre ! » Les Portugais parlent plus clair : « Nous n’avons presque plus de clients locaux et, quand c’est le cas, ils n’honorent pas leurs factures, tranche l’employée d’EYP. Spie au moins paie nos prestations : la détresse des uns fait les bonnes affaires des autres, c’est comme ça…»

L'(a)moralité de cette histoire, les bâtisseurs français l’ont bien comprise : faute de pouvoir délocaliser leurs chantiers, ils importent à grandes pelletées des ouvriers certifiés low cost par des entreprises sous-traitantes ou des agences d’intérim implantées dans des territoires où le coût du travail s’évalue en nèfles. C’est « malin », c’est légal, c’est européen.

En 1996, les crânes d’œuf de Bruxelles bétonnent une directive autorisant le « détachement temporaire de travailleurs » entre pays de l’UE. Alimentée par la disette qui sévit au sud, facilitée par les écarts de niveau de vie entre anciens et nouveaux entrants, la braderie tourne depuis le milieu des années 2000 à l’opération déstockage. Soldes à l’année, prix discount garantis. « Cette pratique est compétitive car ces salariés voyageurs restent assurés dans l’Etat d’établissement de leur employeur, avance Fabienne Muller, chercheuse en droit social à l’université de Strasbourg. Or, pour un non-cadre, les cotisations patronales varient de 38,9 % en France à 24,6 % en Espagne, 18,3 % en Pologne, pour tomber à 6,3 % à Chypre ! » Inutile de tyranniser les calculettes pour comprendre qu’entre le détachement et les employeurs français l’attraction est fatale.

De 10 000 en 2000, les pèlerins du turbin sont, selon le ministère du Travail, 145 000 aujourd’hui. « Ils permettent aux entreprises utilisatrices de réaliser une économie allant jusqu’à 25 % », note un inspecteur du travail. Juteux, oui, mais pas assez. En février 2011, un rapport parlementaire éclaire la face cachée du phénomène et porte le nombre de détachés à 435 000 : moult itinérants, dont un tiers tribulent dans le BTP, échappent en effet aux statistiques à force de magouilles.

« Les Français avaient l’air de Playmobil tellement ils étaient protégés. »

Ouvriers, Bordeaux - PASTORNICOLAS/SIPA

Ouvriers, Bordeaux – PASTORNICOLAS/SIPA

En juin 2011, à l’issue d’une série d’accidents du travail non déclarés, Bouygues avait dû divorcer d’Atlanco : cette société de travail temporaire opportunément localisée à Chypre avait envoyé des brassées de Polonais sans couverture sociale sur le chantier de l’EPR de Flamanville, dans la Manche.

Dans la foulée de ce couac nucléaire, le parquet de Cherbourg a ouvert quatre enquêtes. Pas moins ! Car, si les nomades de la truelle sont détachés, c’est d’abord de leurs droits. « Les textes prévoient qu’ils bénéficient du noyau dur de notre législation, salaire minimum et horaires de travail en tête. Or, c’est rarement le cas », tonne Laurent Dias, responsable de la CGT construction en Auvergne.

« La plupart du temps, les employeurs étrangers présentent des déclarations de détachement dûment remplies, enchaîne Renaud Dorchies, chargé de la lutte contre le travail illégal à l’Urssaf de Basse-Normandie. Mais, entre les salaires mentionnés et les sommes réellement versées, il y a un monde : beaucoup d’ouvriers rétrocèdent une partie de leur obole en rentrant chez eux, se voient infliger des retenues pour l’hébergement ou la nourriture théoriquement pris en charge… Jamais ils ne s’en plaignent : dans cet univers vicié, c’est malheur à celui qui l’ouvre. Aujourd’hui, on a des Bulgares qui se bousculent pour 300 € mensuels… »

Le limier de l’Urssaf a récemment épinglé une famille roumaine, fournisseuse de bras pour une entreprise nationale : « Père et fils avaient créé une société boîte aux lettres en Roumanie. Contrairement aux règles en vigueur, elle était dénuée de toute activité sur ses terres et déversait chez nous des soutiers payés à peine plus que le Smic roumain [180 €]. C’est une entourloupe classique. » Classique aussi, l’empilement des prestataires façon mille-feuille. « Sur les gros chantiers, ajoute l’enquêteur, on peut recenser huit ou neuf rangs de sous-traitants : les salariés ne savent plus à qui ils appartiennent ! »

Passé les bornes, y a plus de limites ? « Il est urgent de démanteler les montages illégaux qui faussent les règles de la concurrence, avance le cabinet de Michel Sapin, occupé à une révision de la directive de 1996. Nous plaidons aussi pour renforcer la responsabilité civile et pénale des donneurs d’ordre. » Les politiques français aboient… Leurs confrères anglais, polonais et autres ayatollahs de la flexibilité, crient au combat d’arrière-garde. Annoncé fin février, le remaniement de la directive a été reporté à des calendes qui pourraient être grecques.

Tant pis pour le dumping social alors que, en 2012, les dépôts de bilan dans le BTP ont bondi de 6 % ; tant pis pour les 40 000 emplois menacés d’ici à fin 2013. « Tant mieux pour le marché aux esclaves ! » raille le cégétiste Laurent Dias. Sherlock des parpaings, ce fils de réfugiés politiques portugais s’évertue à débusquer les anguilles sous échafaudages et tonitrue que « la « bolkensteinisation » des masses trimbalées d’un pays de l’UE à l’autre pour des clopinettes est actée ».

Merci à Badboy pour l’info

Source et article complet sur marianne.net

11 Commentaires

  1. Alors !
    Comprenez-vous la différence entre la Mondialisation et l’Internationalisation ?
    Choisis ton camp, Camarade…

    • On retrouve la même communauté derrière les théories et la promotion de l’internationalisme que du mondialisme.

      Magie de la manipulation : les esclaves tirent ainsi dans le même sens que leurs maîtres.

      • T’es marrant finalement Nevenoe.
        Allons, fais toi plaisir et fais moi rire en me précisant la communauté à laquelle tu penses ?
        Moi, j’ai déjà deviné !
        Et vous les ME ?

        Plus sérieusement, dans toutes les communautés, nous retrouverons des partisans de la Globalisation Mondialiste Néo-libérale, d’autres tenants de l’Internationalisation.

        Les échanges entre les communautés sont indispensables pour qu’elles puissent fonctionner. La seule véritable question pour pouvoir se positionner, est de se demander à qui cela profite-t-il ?
        Aux tenants du capitalisme et à la minorité qui se baffre sur le dos de la population mondiale, ou aux tenants d’une répartition des richesses créées au profit des populations.

        Ah ! A propos, Nevenoé !
        Ni Dieu ! Ni Maître !

        • C’est sympa les slogans, du prêt à penser à utiliser tout de suite.

          « dans toutes les communautés, nous retrouverons des partisans de la Globalisation Mondialiste Néo-libérale, d’autres tenants de l’Internationalisation. »

          Héhé sauf que la finalité est la même : plus de frontières et plus de nations.
          Les uns et les autres poussent dans le même sens malgré leurs idées divergentes mais techniquement le résultat est le même.
          Ainsi gauche comme droite dans toute l’Europe ont fait avancer l’UE tout en affichant des objectifs différents mais malgré tout le résultat est là.
          Et nous n’en sommes pas encore au bout, loin de là.

          L’UE est l’exemple concret de la collusion, volontaire ou pas peu importe, entre le mondialisme libéra et l’internationalisme.

          • La conscience d’une nationalité perdurera toujours sous une forme où sous une autre, en fait, c’est accessoire lorsque les nationalismes ne conduisent pas à la haine des autres nations et donc au conflit armée.
            Mes origines familiales sont ancrées dans le terroir où je vis en cultivant les paysages qu’ont détruit mes prédécesseurs en laissant faire et en profitant pleinement du confort apporté par « les trentes glorieuses ».
            J’ai pleinement conscience cependant que je suis un habitant de cette planéte et que je suis concerné par tout ce qui se passe dessus.
            Je suis un citoyen du Monde qui souhaite que chaque nation puissent en arriver à réformer leur constitution pour passer au tirage au sort.
            De même, en ce qui concerne les institutions supra-nationales et internationales.
            Je suis un citoyen de cette planéte, de nationalité française, résidant en métropole, francophone, et laïque.
            Je souhaite que la France reprenne la grandeur et l’aura qu’elle a acquise avec la Révolution et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
            Je souhaite que la France soit à l’origine d’une Déclaration Universelle des Droits et Devoirs de l’Individu.
            Que nous montrions l’exemple au Monde en adoptant une constitution basée sur le tirage au sort.
            Que nous ne reproduisions pas les erreurs qui nous sont néfastes, pour nous et notre planéte.
            Et que nous nous employons à les corriger et à réparer les dégats.
            L’objectif étant de permettre à chaque individu de vivre libre, en éradiquant la faim, la misére, l’exploitation de la terre, des animaux et des individus, en permettant l’accés aux soins, à l’éducation et au travail pour tous selon ses capacités, choix et aptitudes,…

  2. cette europe des esclaves au service de …. ?
    à méditer
    Nous ne voulons pas de femmes dans le centre d’examen !??
    http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/nous-ne-voulons-pas-de-femmes-dans-138092

     » Revenons à notre histoire :

    Les garçons ont refusé d’être surveillés par des femmes durant les épreuves, le responsable de leur établissement d’origine a même téléphoné à son collègue du public demandant que réparation soit faite.

    Ce dernier, sans aucun problème a remplacé séance tenante les deux femmes par deux hommes…

    Et voilà des chefs d’établissement qui ne respectent pas les lois de la République tous les élèves « doivent ( pourtant) se soumettre aux règles d’organisation de l’examen »….

    Va-t-on revenir pour complaire aux religieux de toutes obédiences aux établissements scolaires pour garçons face à d’autres réservés aux filles ? »

    • et ça manque de parité (de femmes) dans les métiers du bâtiment, que fait la ministre du droit des femmes? (si si ça existe réellement en france)…

  3. Encore un article transmis hier à Badboy et qui s’affiche sur le site, le circuit fonctionne !

    En complément, voici celui-ci pas piqué des hannetons :
    http://www.denissto.eu/node/570
    Je vous en conseille la lecture, vous serez tous édifié :
    thème la GPA… pauvre gosse, et ils veulent nous imposer cette porcherie !

  4. et ils font quoi les syndicats ???? a par babiller , ils peuvent pas bloquer les chantiers ou exercent ces entreprises esclavagiste ???
    encore un exemple que l’Europe est une énorme escroquerie ; et que les syndicats sont bel et bien vendu au patronna voyou ./
    c’est quant le réveille des français , ???? merde .

    • Les syndicats ?

      Entre la CFDT dont l’ex patronne est présiente du club le Siècle, la CGT aux ordres du PCF à la botte des sionistes et FO dont le fondateur André Bergeron dit « Jamais FO ne serait devenue ce qu’elle est sans l’aide des Américains » et qu’il n’en a jamais rien eu à foutre des ouvriers, que son seul souci était la défense des intérêts d’Israël …

      Au début le délégué CGT de Peugeot dit la vérité.

      Ensuite, certainement recadré par sa hiérarchie, il oublie l’embargo sur l’Iran et accuse la famille Peugeot

      http://www.youtube.com/watch?v=4Kypue_1-nM

Les commentaires sont clos.