Business et profits en danger?….
L’Anuga de Cologne, rendez-vous agroalimentaire mondial, refuse l’exposition de foie gras pour sa prochaine édition, en octobre. La filière française est sous le choc
«Il faut arrêter ça, sinon c’est le début de la fin !» La Landaise Marie-Pierre Pée, secrétaire générale du Cifog, l’interprofession nationale du foie gras, ne cache pas son émotion ni son inquiétude. Car l’événement est de taille. L’Anuga de Cologne, l’un des plus gros salons agroalimentaires mondiaux, a décidé de ne pas accepter l’exposition de foie gras pour son édition d’octobre 2011. C’est une première.
Une dizaine d’entreprises, dont une majorité du Sud-Ouest, sont concernées par cette interdiction : Delpeyrat (groupe landais Maïsadour), Rougié (groupe béarnais Euralis), Castaing (Saint-Sever), Valette (Gourdon), la Quercynoise (Gramat)…Selon Marie-Pierre Pée, l’explication fournie par les organisateurs de l’Anuga est que leur décision obéit à des impératifs de « sécurité ». Autrement dit, ils craignent l’intrusion de militants du bien-être animal, très actifs en Allemagne et particulièrement virulents sur la question du gavage. Dans ce pays, la production de foie gras est interdite depuis 1993.
Le Cifog en a été informé il y a plus d’un mois mais est resté discret, le temps de préparer la riposte. Elle est venue la semaine dernière sous la forme d’un courrier adressé par le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, à son homologue allemande Ilse Aigner. «Si cette exclusion était confirmée, je ne pourrais pas envisager de participer à l’ouverture de l’Anuga», écrit-il. On est au bord de l’incident diplomatique.
Il n’y a manifestement que ce levier qui pourra faire bouger les choses, car la marge de manœuvre est étroite : «Nous avons consulté nos avocats. Comme le salon de l’Anuga est organisé par une société privée, libre d’accueillir qui elle veut, il n’y a guère de recours juridique possible», explique Giampaolo Schiratti, directeur général du pôle alimentaire du groupe Euralis.
« Alimentation forcée »
Les arguments que mettent en avant les associations anti-gavage ne sont pas nouveaux. Le gavage, selon eux, s’apparente à de « l’alimentation forcée ». De surcroît, la France ne respecterait pas la réglementation communautaire en continuant à gaver les canards dans des cages individuelles, alors que la cage collective, qui rendrait l’animal moins stressé, est obligatoire depuis 2010.
Sauf que la France a obtenu une dérogation qui lui donne jusqu’à 2015 pour s’adapter, avec des financements européens à la clé. Dès lors, Bruno Le Maire a beau jeu de faire valoir auprès d’Ilse Aigner que notre pays «applique rigoureusement la réglementation communautaire sur le bien-être animal».
Delpeyrat ira quand même
En attendant les effets éventuels des démarches au plus haut niveau, chez Euralis, on reste dans l’expectative : «On n’a pas compris. L’Anuga est une vitrine importante pour nous dans la perspective des fêtes de fin d’année. C’est un endroit où l’on rencontre beaucoup de nos clients étrangers. Ce n’est pas juste», déplore Giampaolo Schiratti.
Chez Delpeyrat, on a décidé de participer malgré tout. «Nous avons déjà payé notre stand. Nous devions être présents avec deux produits, le jambon de Bayonne et le foie gras», explique le directeur général, Thierry Blandinières. Il poursuit : «Nous mettrons donc le jambon en avant et, sans faire de provocation, nous parlerons aussi foie gras avec nos clients chinois, japonais, singapouriens… Nous avons une totale légitimité à être là. L’Anuga est un salon international, pas uniquement un salon allemand. On ne peut pas nous interdire.»
S’agissant de l’impact économique que fait planer l’interdiction, Thierry Blandinières se déclare «pas plus inquiet que cela». Pour la bonne raison que l’Allemagne, comme la Grande-Bretagne, «n’est pas un marché d’exportation prioritaire». Pour le groupe landais comme pour ses concurrrents. Ils misent davantage sur le sud de l’Europe et l’Asie. «C’est vrai», admet Marie-Pierre Pée, tout en mettant les acteurs de la filière en garde : «Si l’Allemagne est un petit marché, elle ne représente pas moins de 300 à 400 tonnes de foie gras par an. C’est loin d’être négligeable. On ne peut pas laisser faire.»
Les anti-gavage exultent
Du côté des anti-foie gras, on se frotte les mains. L214, une association française, a même adressé une « lettre de félicitations » à l’ambassadeur d’Allemagne à Paris. Un de ses animateurs, Sébastien Arsac, ne se montre « pas surpris » de la tournure des événements : «Cela fait déjà plusieurs années que le salon de l’Anuga est sollicité pour ne pas accueillir le foie gras. En Allemagne, des mouvements comme Peta et Vier Pfoten (« quatre pattes ») mènent un combat de long terme qui a déjà produit des effets : on ne trouve plus de foie gras ni de produits issus de canards gras dans les supermarchés du pays, seulement dans les épiceries fines. Il faut savoir que pour beaucoup de non-Français, le gavage est considéré comme une torture, les gens trouvent cela choquant.»
Comment contrer ? «Nous avons affaire à une minorité radicale. Pour notre part, nous continuons à expliquer que la filière respecte les normes, que nous investissons beaucoup dans l’accueil des canards dans nos installations», affirme Giampaolo Schiratti. Même approche du côté de Thierry Blandinières : «Sur le gavage, on essaye d’avoir une attitude positive. Il existe une capacité de la filière à se remettre en cause. Nous mettons beaucoup d’argent dans le passage aux cages collectives.»
La viande en général
Reste qu’à leurs yeux, le foie gras n’est qu’un prétexte : «Nous sommes une petite entité, c’est donc plus facile de nous taper dessus. Ces actions sont le fait de lobbies végétariens inscrits plus largement dans un combat anti-viande», souligne le patron de Delpeyrat. Sébastien Arsac trouve le propos un peu caricatural mais ne dément pas : «Bien sûr, cette affaire questionne sur le sujet de la viande en général.»
Depuis 2010, « le repas gastronomique des Français » est inclus par l’Unesco dans la « liste représentative du Patrimoine culturel immatériel de l’humanité ». Le foie gras y figure en bonne place. Un bouclier apparemment plus symbolique que protecteur.
Auteur : Jacques Ripoche
Source : www.sudouest.fr partagé avec terresacree.org
J’approuve car je suis contre la Torture alimentaire..
Enfin une bonne nouvelles pour ces animaux qui ne subiront plus la torture du gavage. A quand l’interdiction de la vente de foie gras en France ? Il faudrait que ces bourreaux soient gavés comme leurs animaux, voire s’ils sont en bonne santé après le gavage …Le mal être des animaux est une réalité quotidienne, le gavage n’en est que la partie immergée … (transport, abattage, confinement pour les poules pondeuses, vaccinations, hormones et j’en passe).