Jeudi 16 mai, Gilles-Eric Séralini, professeur de biologie moléculaire, chercheur à l’université de Caen, et auteur de l’ouvrage Tous Cobayes*, était l’invité du Café des Sciences à Plounéour-Ménez (29) devant plus de deux cents personnes. Membre de l’équipe auteure d’une étude unique au monde de l’impact des substances toxiques accumulées sur l’organisme vivant, il est venu évoquer les résultats alarmants de leurs recherches et pointer du doigt le manque de transparence, quant à la mise sur le marché et l’utilisation de pesticides. Le professeur et chercheur en biologie Robert Bellé, à l’origine du Café des Sciences du Pays de Morlaix était présent pour l’accueillir. Décryptage.
L’étude de Gilles-Eric Séralini et son équipe de chercheurs en biologie moléculaire s’est déroulée de 2008 à 2011. Et a commencé par un constat banal : « Etant donné que les pesticides ont des effets à long terme sur les êtres vivants, pourquoi ne pas les évaluer à long terme ? Jamais personne ne l’avait fait avant nous » explique Gilles-Eric Séralini lors de sa conférence jeudi 16 mai à Plounéour-Ménez. Les chercheurs de l’université de Caen ont donc testé in vivo sur les rats – dernier mammifère utilisé pour tester des produits avant de les commercialiser – l’impact des pesticides présents dans les cellules vivantes.
« En partant du postulat que plus un principe est actif, plus il peut avoir des effets secondaires, il est impossible d’avoir un gros impact sur une cellule, sans avoir d’effets secondaires » a justifié le chercheur. Et d’ajouter : « On cherche dans l’intimité de nos cellules, des modifications directes de nos gênes. Nous sommes dans un niveau au-dessus de la génétique : l’épigénétique. C’est l’habillage chimique des gênes. » Selon le chercheur, les gênes fonctionnent « nus ». S’ils sont habillés, c’est-à-dire enveloppés de pesticides, cela a un impact nocif sur leur fonctionnement : des maladies chroniques se développent.
Des tests inexistants
Ainsi, cent mille mesures ont été testées sur les rats, via des pesticides dilués tel qu’ils le sont dans l’eau du robinet. « C’est comme si nous mesurions l’impact de l’eau du robinet sur l’organisme d’une personne qui en a bu toute sa vie » explique le chercheur. Les résultats sont alarmants: après deux années d’expérience, seulement quatre-vingt-dix rats sur deux cents ont survécu.
« En 2013, nous avons trouvé des composés toxiques dans le Roundup, présents aussi dans beaucoup d’autres pesticides appelés le POE-15. Ce sont des produits classés inertes par leur fabricant, du coup, aucune agence ne leur a demandé de les tester sur du long terme » déplore Gilles-Eric Séralini. Les tests en France sont effectués sur seulement six rats pendant trois semaines, suivis d’un test d’irritation, de rougeurs, d’impacts oculaires. « Les industriels inscrivent simplement sur la notice: tenir hors de la portée des yeux ou de la peau, mais personne ne teste leproduit sur le long terme », dénonce le chercheur avant d’ajouter : « c’est une honte scientifique innommable de détenir toutes les compositions des pesticides du monde secrètes. Il est difficile d’obtenir les études, car le groupe Monsanto a la propriété intellectuelle ».
Un combat scientifique
L’équipe de scientifiques a essayé de se procurer les résultats d’analyses de sang des rats des produits contenant du Roundup ou du POE-15. A force de pressions, les chercheurs ont appris, qu’il n’y avait aucune analyse. « Toutes les normes réglementaires ont été faites sur le glyphosate, (un herbicide règlementé et évalué par les autorités, ndlr), mais pas sur le reste » a déclaré le chercheur. « Il y a une sous estimation de l’impact de ces pesticides de l’ordre de cent mille fois, puisque le glyphosate, le produit réglementé, est de dix mille à cent mille fois moins toxique que le Roundup » a-t-il fait savoir. Or, les OGM sont les plus gros consommateurs de Roundup au monde, car ils sont biologiquement conçus pour les supporter.
« Je ne culpabilise pas les agriculteurs »
Gilles-Eric Séralini affirme également que « les plus gros vendeurs de pesticides, sont les plus gros vendeurs de médicaments ». Selon lui, on peut trouver des produits Monsanto dans presque toutes les pharmacies individuelles, et quatre-vingt-dix pour cent des brevets OGM seraient passés entre les mains du géant américain, dont l’activité principale est de revendre ces brevets.
A ce titre, le biologiste a expliqué « (qu’il) ne culpabilise pas les agriculteurs qui ont un magnifique métier de production primaire de la nourriture, mais un système qui les oblige à être dépendants des subventions pour vivre, et qui autorise les produits chimiques et qui les rend malades. »
Pression, critiques, diffamation…
L’étude sur l’impact des pesticides de Gilles-Eric Séralini a fait l’objet de nombreuses critiques dans le monde scientifique. Ses opposants, des membres du groupe Monsanto, mais aussi des toxicologues, ou encore des pharmaciens ont, entre autres, dénoncé une « pseudo-science ». L’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) estime « qu’il n’est pas possible de tirer de conclusions valables sur l’occurrence des tumeurs chez les rats testés ». L’Agence Nationale de Sécurité sanitaire (Anses) a également réfuté l’étude du professeur, indiquant l’existence de « faiblesses » dans les travaux, mais appelle à engager des recherches sur le long terme concernant la consommation d’OGM associés à des pesticides. Ayant reçu des lettres de menaces, Gilles-Eric Séralini est malgré tout sollicité dans près de trente pays du monde pour y donner des conférences.
* Tous Cobayes, Gilles-Eric Séralini, Flammarion, 2012.
Une étude inédite
C’est la première fois au monde, qu’un groupe de recherche public dépense trois millions deux cent mille d’euros avec une équipe de moins de dix personnes, pour tester des produits déjà commercialisés.
A noter qu’un OGM est une plante agricole conçue pour supporter et s’imprégner de pesticides. Tout ceci dans le but de développer l’agriculture intensive qui va tuer toutes les autres plantes, sauf l’OGM récolté.
Quatre-vingts pour cent des OGM produits sont élaborés pour supporter les pesticides, les vingt pour cent restants sont faits afin de produire de l’insecticide. Pour comprendre l’effet des polluants combinés sur les cellules humaines, Gilles-Eric Séralini et son équipe ont travaillé sur des cellules de placenta, de cordon ombilical, puis sur des lignées cellulaires et embryonnaires humaines.
Plus d’infos
Documentaire : « Tous Cobayes » de Jean-Paul Jaud, 2012.
« L’étude du professeur Séralini sur le maïs OGM va être évaluée »
« Toxicité confirmée pour un OGM et pour le pesticide Roundup, plaintes en diffamation aux critiques »
Source: bretagne-durable.info via sott.net
Hello Benji,
As-tu trouvé la trad sur Terrence Ingram ?
Oui, mais je trainais un peu ce soir, j’allais m’en occuper. 😉
Yo ! Merci, à tous les deux, c’était de la bonne info :o)
J’ai trouvé la réaction de Poutine plus qu’intéressante …