Quand l’État français s’assied sur la liberté de la presse

Que c’est beau la démocratie, beau également la liberté de la presse!!! Vous avez aimé Sarkozy dans le domaine? (voir le documentaire « Sarkozy vampire des médias ») Et bien vous allez adorer Hollande qui n’est pas vraiment mieux puisqu’il respecte la tradition! Comment voulez-vous que l’on soit correctement informés avec de telles méthodes!

Le président parle, les journalistes applaudissent. C’était en France, il y a peu. À la fin des conférences de presse du général de Gaulle, les journalistes applaudissaient. Ils ne le font plus aujourd’hui. Mais le président de la République règne toujours sur les médias français. Beaucoup trop, en fait, pour une vraie démocratie libérale. C’est comme ça depuis de Gaulle. Mitterrand ne s’est pas gêné, tout comme Chirac ou Sarkozy. Sous Hollande, rien n’a changé. Le changement, pour la presse, ce n’est pas maintenant.

François Hollande a beau promettre du nouveau, il est comme les autres. Ainsi donc, quelques semaines après son élection, il vient de faire sauter le président de l’Audiovisuel extérieur de la France, Alain de Pouzilhac, à la tête de France 24 et RFI. Le même sort est réservé, d’ici peu, aux patrons de Radio France et France Télévision, Jean-Luc Hees et Rémy Pflimlin. Ils sauteront eux aussi. Perpétuant cette vieille tradition française : la nouvelle majorité dégomme les patrons du service public.

Certes, il y a du nouveau cette année. Pour marquer sa différence, François Hollande propose aux présidents de démissionner. Officiellement, Alain de Pouzilhac a donc remis sa démission à l’État actionnaire. Dans les faits, le Président l’a viré. Motif officiel : un désaccord sur la stratégie de fusion RFI – France 24 voulue par le patron, et dont l’État actionnaire ne veut plus entendre parler. Une stratégie pourtant incontournable dans une perspective multimédia : radio et télévision sont appelés, à terme, à faire le même produit. Un État surendetté peut-il se permettre le doublon de deux chaînes internationales faisant le même job ? Poser la question, c’est y répondre. La nouvelle majorité s’y oppose pourtant, alignée sur les syndicats. Juste pour exister politiquement. Une brave dame sans la moindre expérience professionnelle médiatique se prend soudain pour Murdoch. Aurélie Filipetti explique aux professionnels que la fusion est exclue. Elle décide ainsi, sur décret présidentiel, du fonctionnement d’une entreprise contre le bon sens économique d’une part, mais surtout contre l’indépendance d’un média libre.

Ceci a l’air normal en France. En fait, c’est un vrai scandale, totalement incompréhensible vu d’un pays libre : comment voulez-vous assurer la liberté de la presse si les patrons des «médias d’État» (et leur stratégie) changent selon les majorités ? Hollande avait promis un changement majeur : il ne nommera pas les présidents, c’est promis. Le CSA s’en chargera. Belle séparation des pouvoirs. Chapeau. Le président ne nomme plus. Par contre, il peut toujours faire virer qui il veut. Avec une nouveauté majeure : par la grâce présidentielle, Hees et Pflimlin pourront terminer leur mandat. Quelle révolution !

C’est grave, mais il y a pire : le jour de l’éviction de Pouzilhac, le patron du Figaro est aussi viré. Quel rapport ? Aucun, en apparence. Le Figaro, premier quotidien national français, est un journal libre. Et de droite. Comment se peut-il que l’élection d’un président de gauche le fasse sauter, lui aussi ? C’est pourtant bien le cas : Étienne Mougeotte a fait campagne contre Hollande. Normal pour un journal de droite. Mais le propriétaire du Figaro, l’avionneur Serge Dassault, dépend des commandes de l’État français. Il doit donc avoir les faveurs du président, fût-il socialiste. Il sacrifie donc son loyal – et compétent – directeur. Difficile d’imaginer que cette décision fut prise sans passer par l’Élysée…

À nouveau, cette information est passée quasi inaperçue, jugée « normale », en France. Mais vu d’un pays libre, c’est affolant. Un rédacteur en chef viré pour ces opinions, pour s’être opposé au chef de l’État, c’est une procédure courante dans les dictatures. Pas en démocratie.

C’est grave. Mais il y a pire, encore. Comme le rappelait récemment Jean Quatremer dans son excellent Sexe, mensonges et médias (Plon, 2012), l’ensemble de la presse française est passée sous contrôle de l’État, et donc de la majorité du moment, en acceptant le très pervers système d’aide à la presse. Comme le dit Quatremer, «on ne peut prétendre être un contre-pouvoir si l’on dépend du pouvoir». Or, c’est tragique à dire, mais la vérité est là : la presse de la patrie des Droits de l’homme n’est pas libre. Ou que très relativement. Entre les présidents gaulliens, les intérêts des actionnaires, et les dépendances structurelles, la presse française est sous le contrôle de l’État. Comme dans les plus belles républiques bananières, en plus discret. Donc plus pervers. Après les écoutes de Mitterrand et les obsessions médiatiques de Sarkozy, Hollande avait l’occasion de marquer un changement. Occasion manquée. Les journalistes français peuvent continuer à applaudir leur président. Et tant pis pour la démocratie.

Source: Contrepoint.org

16 Commentaires

  1. Un petit rien pour la soirée

    http://img11.hostingpics.net/pics/164866test6.jpg

    c’est de moi, c’est fait rapidement, je trouve le rendu plutôt sympa, ça plaira pas à tout le monde en tous cas ! je souhaitais quand même le partager. Ca ne servira pas à grand chose on est d’accord.

    • Joli,
      « Ca ne servira pas à grand chose on est d’accord ».

      …Mais ça fait toujours du bien !…

      • je prévois de faire ça au propre, plus grand et avec un meilleur coup de crayon, on verra ce que ça donne :).
        J’ajouterai aussi d’autre petite image, si tu as des idées et si vous avez des idées sur ce qui peut-être ajoutez allez-y

        (nb; les délires reptiliens etc.. je laisse tomber c’est pas ma tasse de thé)

        • Le cote patchwork est sympa.
          Si tu veux mon avis et il n’engage que moi, tu peux essayer de donner plus de cohérence à l’image en reliant les différents symboles et parties d’une manière ou d’une autre.
          Enfin c’est toujours un plaisir de voir ce genre de choses et bon courage si tu continues.

  2. Faut bien filer un bon boulot aux copains, non ?

    Les socialistes sont connus pour être très soidaires avec leurs amis, malgrés leur cinéma de division.

    Avant, avec les autorisations de constructions immobilières, d’ouvertures de magasins, de zones « industrielles » et d’aide au développement (personnel sans doute), il y avait des villes et des villages qui ont fait très très fort quand militerand était empereur.

    • Tous les élus de TOUS les partis sont solidaires avec leurs « amis ».

      Ils n’ont pas le choix, sinon ils ne pourraient pas y faire carrière.
      Parler d’amitiés dans ces contextes est un peu sommaire (même s’il en existe sûrement) ce sont plutôt des « alliances » qui se déterminent au fil des circonstances, des opportunités, des ambitions et autres redevabilités.

      C’est un système de dépendances, le corrompu devient à son tour corrupteur. Ce type d’ambition nécessitant les moyens en proportion.

      On n’a jamais vu plus ou moins de moralité dans l’un ou l’autre de n’importe quel parti. Parfois il y a des personnes plus intègres, mais elles ne vont jamais très loin ou ne durent pas.

      Après, si on aime l’enfumage, on peut croire ce qu’on veut, et même essayer de le faire croire, lol

  3. C’ est pas moi qui plaindrait le départ du derlo de France 24 qui était au service de la propagande impériale faschiste.

  4. En politique, comme dans beaucoup de domaines, si tu suis le droit chemin tu ne rencontre personne.

  5. Alors Benji! Tu hotes les articles moins reussi maintenant? Il est vrai que ce n´était qu´une discussion de basse cour mais néanmoins se terminait par un lien d´un Andrée qui lui était un fait verifiable et trés intéressant!

    http://youtu.be/oeFmpQpccuc

    J´ éspére que tu as eu le temps d´en prendre part ainsi que la petite traduction que j´avais faite!

  6. Ouais, mais ce n’est pas forcément contre la liberté de la presse. Pflimlin est un grand manitou dans le réseau mafieux gouvernmentale, il a beaucoup oeuvré aux profits de quelqu’uns. QUe ce gars soit viré, je trouve ça bien heureux.

  7. Cet article n’a que peu d’intérêt dans la mesure où la problématique n’a pas lieu d’être. En effet, de nos jours la presse n’est pas muselée en première instance parce que telle tête dirigeante est choisie par le président en fonction, mais bien parce que les banques et les multinationales possèdent tous les organes de presse et choisissent pour les citoyens les dirigeants de leur pays. Ce que je veux dire c’est que on s’en fout de savoir qui dirige tel journal, l’important est de savoir qui possède les journaux sus-cités. Tout simplement parce que la main qui donne est au-dessus de la main qui reçoit. D’ailleurs je vous laisse un schéma édifiant résumant les différentes implications sous forme d’arborescence (peut-être n’est-il pas tout à fait à jour par contre).
    http://www.info-libre.fr/wp-content/uploads/2012/06/presse.jpg

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