Délais d’attente écrasants, dépassements d’honoraires de plus en plus fréquents, désengagement de l’état. Pour beaucoup de patients, se soigner est devenu un luxe, si bien qu’un Français sur trois admet y avoir renoncé en 2013 pour raisons financières.
Source: Baromètre Santé et Société Europ Assistance-CSA 2013. Cliquez sur l’image pour la voir en grandEncore plus inquiétant, ce sont les associations, les centres de santé et les permanences d’accès aux soins qui prennent maintenant le relais pour des soins courants…
Il y a deux mois, ils avaient une maison et une voiture. Aujourd’hui, ils logent dans une résidence de l’Armée du Salut et se soignent dans la Permanence d’accès aux soins de santé (Pass) de l’Hôpital Saint-Louis, à Paris. Arlette, 58 ans, et Bernard, 53 ans, ont tout perdu. Pourtant, ce qui leur arrive est assez banal. Elle souffre de tension artérielle, diagnostiquée lors d’un examen de routine. Lui, agent d’entretien de la mairie de Paris, est hospitalisé huit jours pour diabète. Tous les deux ont besoin de médicaments, mais leur mutuelle ne les couvre presque pas:
«Tout ça coûte de l’argent, témoigne Arlette, qui est au chômage. Les factures s’accumulent, du jour au lendemain on ne peut plus payer le loyer donc le propriétaire nous met dehors.»
Après plusieurs semaines à dormir dans leur voiture, épuisés et malades, ils échouent chez une assistante sociale qui les guide vers les associations et le système de Pass. Un service gratuit et ouvert à tous dans un coin de l’hôpital public, composé d’infirmières dévouées mais débordées qui se sont organisées en collectif. Les médecins y consultent dans de petits box, tous les quarts d’heure.
La salle d’attente est comble. Des visages fermés. Une vingtaine de personnes tenant dans leurs mains des petits billets jaunes attendent consciencieusement leur tour. Arlette est là, anxieuse. Elle a rendez-vous dans trente minutes. Son mari, un petit homme trapu qui laisse apparaître une barbe négligée derrière le journal qu’il feuillette, l’accompagne pour la première fois depuis sa sortie de l’hôpital.
«On n’a pas encore de CMU alors on refait les dossiers de la sécurité sociale mais il faut attendre trois semaines, explique Arlette. D’ici là, on n’a pas le choix. L’avantage, c’est qu’ici on ne paie rien, pas même les médicaments.»
Malgré les longues files d’attente, ils finissent par recevoir des soins de qualité. Tout cela est tacite, bien organisé.
«En principe, ces gens n’ont rien à faire ici, confie un des internes de l’Hôpital Saint-Louis, qui tente d’orienter un maximum de patients vers le système traditionnel. Mais on les soigne quand même, sinon ils continueraient à s’enliser dans la misère sociale.»
Un «parcours labyrinthique»
Comme eux, aujourd’hui, de plus en plus de gens exclus qui ont potentiellement des droits abandonnent le système de santé classique pour se tourner vers des solutions alternatives. Ils font partie d’une classe «intermédiaire»: déjà pauvre, mais en dehors des seuils. Il faut gagner moins de 606 euros par mois pour obtenir la CMUC, la couverture maladie universelle complémentaire. En France, le seuil de pauvreté est de 814 euros à 977 euros. Et 98% des gens qui renoncent ou diffèrent leurs soins vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Travailleurs pauvres, personnes âgées ou handicapées, jeunes étudiants précaires, mères seules… Leurs profils sont variés. Ce sont pour la plupart des accidentés de la vie. «Pour eux, le parcours est labyrinthique», tranche le Dr Jean Nau, responsable du centre de soins de Médecins du Monde à Parmentier, dans le 11e arrondissement de Paris.
Autrefois, les patients vulnérables se tournaient vers les urgences ou les ONG pour la médecine mal remboursée, comme l’optique et le dentaire. «Il y a une rupture», juge Marc Paris, du Collectif inter associatif sur la santé (Ciss), qui défend le droit des patients.
«Aujourd’hui, ce sont des soins courants que les patients demandent dans ces structures!»
Les soins courants, c’est une consultation chez un médecin généraliste. Elle coûte 23 euros. L’argent est avancé par le patient. Et 14 euros (70%) sont remboursés par la sécurité sociale, le reste revenant à la charge du patient ou de sa mutuelle. «Quand il n’y a pas de complémentaire, il y a son propre argent, quand il n’y a pas son propre argent, il y a les ONG», résume Marc Paris, du Ciss. Pour les 7% de Français qui n’ont aucune mutuelle complémentaire, le choix est un non choix. Les services alternatifs, c’est l’assurance d’être soigné sans débourser d’argent.
Changement de système
Entre 2001 et 2009, le coût des soins a augmenté de 50%. Laissant sur le carreau les classes moyennes inférieures et les classes populaires, dont les économies sont devenues trop minces pour se soigner correctement dans le système traditionnel. «Le désengagement de l’Etat correspond à une volonté claire de détruire le système de santé égalitaire et solidaire hérité du Conseil national de la résistance», juge le Dr Jean-François Corty, directeur des missions France à Médecins du Monde, qui s’inquiète de la montée d’un «krach sanitaire» en France. La situation empire et le système devient de plus en plus inefficace.
Un constat partagé par Philippe Batifoulier, économiste à l’Université Paris X Nanterre:
«Il existe une volonté politique de transfert de l’assurance publique vers l’assurance complémentaire (mutuelles, compagnies d’assurance, NDLR).»
Sans hausse de revenus, les gens voient leur budget santé exploser. Et la proportion de ces dépenses dans le budget total des ménages augmente dans le même temps: elle s’élève à 2% chez les plus aisés, pour culminer à plus de 10% chez les classes populaires.
Une fréquentation en hausse
«On voit revenir des gens qu’on n’avait plus vu depuis les lois de 1998 sur la CMU», certifie le Dr Jean-François Corty, dont l’association, Médecins du Monde, soigne 40.000 patients par an dans ses dispensaires.
«Ils ont la sécurité sociale mais pas assez d’argent pour payer le reste à charge (qui est pris en charge par les mutuelles ou le patient directement, NDLR).»
«La CMUC protège autant qu’une bonne mutuelle privée. Ceux qui sont entre les deux se tournent aujourd’hui directement vers les centres de santé», renchérit le Docteur Thierry Clément, médecin chef du centre de santé Edison dans le 13e arrondissement, un des 95 centres gérés par la mairie de Paris, qui assure que la fréquentation est en hausse surtout pour ceux qui ont des droits –21% des patients.
Source et article complet: Slate via Actuwiki
Ce graphique me semble plus que louche…. 33% en France et seulement 23% aux usa ?????
et bien si c’est vrai, les français ont donc plus de chance d’échapper à Big Pharma , ce qui en soit est une probabilité supérieure de bonne santé !
Mais aussi de perdre leurs dents que la pauvreté abîme prioritairement.
qu’une alimentation déficiente abîme les dents via un certain nombre de carences ou surdosages ok mais on a pas besoin d’être riche pour bien manger. bien sûr, l’évolution de l’urbanisme renforce le problème de l’accès à une nourriture saine, premier de nos médicaments….
Juste, mais le résultat est là et lorsque le mal est fait, les réparations sont encore plus onéreuses, le regard des autres la santé générale davantage affectés.