Le différend franco-allemand sur l’avenir des centrales nucléaires divise l’UE

Par Olivier Renault pour Observateur-Continental

En janvier de cette année, la Commission européenne envisage de se prononcer sur le classement de l’énergie nucléaire en fonction de sa conformité aux critères écologiques. Mais, sur ce point, il existe des divisions au sein de l’UE qui sont menées par des points de vue opposés entre la France et l’Allemagne. 

En novembre de l’année dernière, le président français, Emmanuel Macron, a déclaré dans une allocution télévisée au pays que les autorités avaient décidé de reprendre la construction de centrales nucléaires. Paris qualifie sa stratégie de rééquilibrage des sources d’énergie. Parallèlement, le développement des énergies renouvelables (SER), principalement solaire et éolienne, et la politique de démantèlement accéléré des capacités de production à charbon se poursuivront. 

Observateur Continental a indiqué que le président Macron a appelé, en avril 2021, la Commission européenne à inclure les centrales nucléaires dans la taxonomie écologique, c’est-à-dire, reconnaître l’énergie nucléaire comme «verte» dans le but de remplir les engagements de la France pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. 

A l’heure actuelle, la France est juste derrière les Etats-Unis pour le nombre de réacteurs nucléaires en exploitation. La production nucléaire occupe la plus grande part du bilan énergétique national de la France parmi tous les pays du monde, environ 70 %. Il y a quelque temps, il était prévu de réduire la part des centrales nucléaires dans la fourniture d’électricité aux consommateurs français à moins de 50 % d’ici 2035. Cependant, ces plans sont sur le point d’être revus.

Les opposants à Paris s’inquiètent du fait que c’est la France qui mène le groupe des Etats membres de l’UE. La position de la France est soutenue par au moins neuf autres membres de l’UE, principalement la Hongrie, la Pologne, la Finlande et la République tchèque et ils exigent que la Commission européenne reconnaisse la production nucléaire comme acceptable du point de vue des objectifs pour la transition énergétique verte. En langage bureaucratique, on parle d’activité économique qui ne menace pas la durabilité de l’environnement.

A l’exception de la France, parmi les membres de l’UE, seule la Finlande a ouvert le 21 décembre 2021, le premier réacteur EPR en Europe dans la centrale nucléaire finlandaise de la presqu’île d’Olkiluoto. Cependant, les projets français et finlandais ont déjà dix ans de retard sur le calendrier initial de mise en service, et le coût des travaux de construction a triplé.

Le principal adversaire public de Paris est un autre pays de l’UE, l’Allemagne. L’establishment et la plupart des habitants de ce pays adhèrent au point de vue selon lequel l’énergie nucléaire ne peut être considérée comme une solution au problème du réchauffement climatique, car elle comporte trop de risques et c’est trop long et coûteux de construire une centrale nucléaire. Berlin se réfère à l’exemple de l’accident de la centrale nucléaire japonaise de Fukushima en 2011 pour fermer la moitié de toutes les centrales nucléaires d’ici fin 2021, et le reste d’ici la fin de l’année 2022.

L’un des leaders des Verts allemands, qui fait partie de la nouvelle coalition au pouvoir, Robert Habeck, qui est le ministre fédéral de l’Economie et de la Protection du Climat, est un opposant constant au développement des centrales nucléaires. Les Allemands affirment, également, que, selon leurs informations, la sûreté de la plupart des centrales nucléaires en Europe laisse beaucoup à désirer, soit d’un point de vue technique, soit en termes de situation géographique à proximité de territoires dont les caractéristiques géologiques augmentent la probabilité d’accidents en cas de séismes même de faible puissance.

La position de l’Allemagne est soutenue par l’Autriche, le Danemark, le Luxembourg et le Portugal. La lutte principale est autour de la soi-disant «taxonomie verte», concernant la classification des sources d’énergie industrielles en fonction de leur sécurité pour l’environnement et de l’enjeu de la lutte contre le réchauffement climatique. La décision sur le classement doit être prise par la Commission européenne. Le coût de l’émission est extrêmement élevé puisque l’inclusion de certaines sources de production dans la taxonomie sera un signal direct pour les investisseurs et les industriels de l’UE. 

Une décision positive donnera le feu vert à l’investissement d’énormes ressources financières dans les types de production qui répondent aux objectifs de l’agenda climatique de l’UE, au développement de technologies et de projets d’ingénierie pour les décennies à venir. Les médias européens ont rapporté à plusieurs reprises le report de la date de la décision finale sur l’acceptabilité environnementale de la centrale nucléaire. Désormais, on suppose que le verdict sera rendu en janvier 2022.

Rappelons qu’en 2018, le groupe intergouvernemental de l’Onu sur le changement climatique a préparé un rapport dans lequel il a appelé la communauté mondiale à s’engager à atteindre une consommation et des émissions de carbone zéro d’ici 2050. Selon les auteurs du rapport, l’humanité pourra éviter les pires conséquences du changement climatique si elle réduit les émissions de gaz à effet de serre à presque zéro d’ici le milieu du siècle.

En novembre, la Commission européenne a présenté une proposition pour soutenir l’initiative de l’Onu par les pays de l’UE. Il est censé prendre un ensemble de mesures qui devraient réduire les émissions de gaz à effet de serre à pratiquement zéro ; et de compenser les volumes résiduels d’émissions par des mesures agrotechniques et technologiques visant à extraire le carbone de l’atmosphère.

En mai 2019, les principaux pays de l’UE ont appelé le reste de la Communauté à intensifier fondamentalement leurs efforts pour lutter contre le changement climatique. En particulier, ils ont évoqué l’affectation d’un quart du budget total de l’UE pour la période 2021-2027 à ces fins. En outre, il a été proposé d’interdire l’attribution de subventions de l’UE à tout projet susceptible d’aggraver la situation des émissions de gaz à effet de serre dans l’environnement.

Un appel a été lancé pour soutenir l’engagement de la Communauté envers le plan visant à atteindre zéro émission d’ici 2050 comme échéance.Puis, le Centre commun de recherche de la Commission européenne (CE) a publié un rapport décrivant l’énergie nucléaire comme une source d’énergie sûre et à faible émission de carbone, comparable en termes de performances environnementales à l’éolien et à l’hydroélectricité.

Les émissions de dioxyde de carbone par habitant en Allemagne sont presque le double de celles de la France. Cependant, les Allemands ferment les centrales nucléaires tout en démolissant des villages pour construire de nouvelles mines de charbon. La dépendance croissante vis-à-vis de la production d’électricité conventionnelle entraînera de nouvelles augmentations des émissions. Dans le même temps, sur fond de forte hausse des prix de l’électricité, plusieurs autres pays de l’UE suivent le mauvais exemple de l’Allemagne et reprennent le travail de centrales à charbon déjà fermées. 

Olivier Renault

Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n’engagent que la responsabilité des auteurs

Observateur-Continental

La coopération militaro-technique entre la France et les Etats-Unis toujours étroite mais conflictuelle (Url: http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3461

L’UE réclame une place à la table des négociations entre la Russie, les Etats-Unis et l’Otan (Url:
http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3456)

Volti

10 Commentaires

  1. Si notre gouvernement ne s’était pas préoccupé , dans les années 80, d’intérêts financiers privés , il ne nous aurait pas précipités dans la très coûteuse construction de centrales nucléaires qui nous mènent tout droit à des dizaines de catastrophes du type Tchernobyl avec des milliers d’années de pollution des sols et des nappes phréatiques . Le dépeçage d’EDF , sa privatisation, les économies d’entretien et la prolongation sans fin de la durée de vie de ces centrales ( les 30 ans de vie prévus au départ sont largement dépassés pour celles qui furent construites au début des années 80 avec leurs fuites quasi constantes de matières dangereuses dans l’air et dans la nappe phréatique , d’où de nombreux cancers de la glande thyroïde ) mettent en grand danger les populations locales . On nous avait prétexté d’avoir , grâce au nucléaire, l’indépendance énergétique de la France , pourtant alimentée en uranium par le Niger , comme si le Niger était un département français .
    Toujours le nez dans le guidon , ils n’envisagent rien d’autre que la fuite en avant , bref la coûteuse et calamiteuse construction de nouvelles centrales nucléaires .
    Cet énorme budget consacré à la fabrication d’électricité aurait été au départ et serait , aujourd’hui encore , bien mieux employé en utilisant l’avantage de nos milliers de kilomètres de côte atlantique et la fidèle force quotidienne des marées pour construire DES DIZAINES DE CENTRALES ELECTRIQUES MAREMOTRICES , une énergie naturelle gratuite, non polluante et moins épisodique que l’éolien .

  2. petit graphique de la production d’électricité en fonction du moyen de production

    Supprimez le nucléaire et dite adieu aux industries et préparez vous à une drastique augmentation du prix ainsi qu’un quota bien limité pour les ménages.
    C’est le retour au en 1900…

    • Et comment faisions nous avant les années 80 ?
      Certes la consommation à augmenté (en conneries, vu que l’industrie c’est écroulé…), mais quand même.

      • les dépenses des ménages ont augmentés, etc etc….
        comme on ne sait stocker l’Energie (production flux tendu) je suppose que la production est utilisée…
        Maintenant, a bon escient ??? humm c’est la grande question.

      • avant les années 80 y a moins de 50 millions d’habitants, y a pas d’étranger, peu d’aide sociale.
        avant les années 80 il n’y a pas d’informatique, pas d’objets connectés la seule chose branchée c’est le frigo & la télé et le chauffage n’est pas électrique il est au bois et au fioul lourd.

        avant les années 80 y a pas de pompes à chaleur de merde qui fonctionnent plus en dessous de -5° qu’aucun fabriquant n’expliquent à l’installation et ce sont les mêmes connards en tesla qui pleurent dans le nord canada parce que la voiture ne chauffent pas à -30°C

        Le nucléaire a fait muter le chauffage du fioul à l’électrique, couper le jus pas cher ici c’est un suicide.
        faites-le, je suis pour la destruction de cette Europe de chimpanzés.

        • Voilà quelqu’un qui maîtrise son sujet. https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_good.gif

          Déjà à 0° le rendement est merdique.
          Dans les années 80, l’état subventionné les bi-chaudières électro-fuel.https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_wacko.gif
          Il y aurait tellement à dire…

        • Ceci dit, les pompes eau/air, ou eau/eau ont un rendement stable de 3à 4, à condition que la partie primaire souterraine fut bien dimensionnée.

        • La politique du “tout électrique” sponsorisée par les gouvernements successifs(dessous de tables d’AREVA !) va surtout couter très chere aux générations suivantes.

Les commentaires sont clos.