À l’usine Areva du Creusot, des falsifications perduraient depuis des décennies !

En 2015, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait mis en évidence des « anomalies » sur la cuve de l’EPR de Flamanville. Soupçonnant que ces défauts ne soient pas des cas isolés, l’ASN avait demandé en avril 2015 à Areva de lancer un audit sur son usine du Creusot, où avait été fabriqué ce couvercle de cuve mais d’où sortent également toutes sortes de composants (composants de cuve, rotors de turbines…) qui équipent les creusot-forge-0011-a9112centrales nucléaire françaises. C’est ainsi qu’Areva a avoué à l’ASN avoir détecté des « irrégularités » dans les documents de fabrication d’environ 400 pièces produites depuis 1965. Selon EDF, 66 de ces pièces suspectes sont actuellement en service sur des réacteurs français. Comme le mentionnent Les Échos, huit dossiers concerneraient d’ailleurs un même réacteur.

 

Il s’agirait apparemment d’une opération de falsification à grande échelle. Selon Les Échos, qui citent une source interne, les procès-verbaux des dossiers de fabrications auraient été modifiés dès lors que les résultats obtenus lors de divers tests de résistance (chimique, mécanique, thermique, qualité des soudures…) s’approchaient trop de la limite autorisée.

Ces pratiques auraient apparemment pris fin entre 2010 et 2012. Tous les types de composants fabriqués à l’usine Areva du Creusot seraient concernés.

Quelles conséquences en termes de risques ?

Les résultats finaux de l’audit sont attendus d’ici fin mai. D’ores et déjà, EDF et Areva se veulent rassurantes ; toutefois, les conséquences en termes de sûreté de ces falsifications pourraient s’avérer importantes.

En effet, ces pièces qui ne correspondent pas au niveau de qualité affiché pourraient logiquement s’avérer plus fragiles que prévu face aux contraintes qu’elles sont censées subir. Les composants de cuves pourraient notamment se révéler encore plus vulnérables aux variations thermiques liées au pilotage du réacteur. Ceci est d’autant plus grave qu’aucun moyen n’est prévu pour parer à une rupture de cuve… qui sur le papier n’est pas censée avoir lieu puisqu’on postule que les pièces en question seront suffisamment robustes !

Cette vulnérabilité imprévue est d’autant plus inquiétante dans un contexte où près des deux tiers des réacteurs français ont déjà dépassé les trente ans, leur durée de fonctionnement initialement annoncée. Or le bombardement des neutrons accélère la dégradation de la résistance mécanique des métaux, si bien que les pièces métalliques qui sont au contact des substances radioactives sont particulièrement vulnérables au vieillissement. En particulier, les cuves des réacteurs, conçues pour une trentaine d’année à pleine puissance, ne se changent pas et deviennent de plus en plus fragiles. Au regard de cette nouvelle donnée, le projet d’EDF de pousser les centrales existantes jusqu’à 50 ou 60 ans de fonctionnement s’avère encore plus dangereux.

Bugey et Gravelines : deux réacteurs touchés par les malfaçons

[Mise à jour le 25/05/16] Le 25 mai, le Canard enchaîné a révélé qu’une note interne confidentielle d’Areva reconnaît que deux composants de générateurs de vapeur installés dans les réacteurs n°2 des centrales du Bugey (Ain) et de Gravelines (Nord) présentent des défauts. Ainsi, commentant la résistance de l’acier de la calotte inférieure du générateur de Gravelines-2, le Canard note : « Un test, dont les résultats ont été ignorés jusqu’à présent, a montré qu’elle était inférieure de près de 50 % aux normes en vigueur. »

Des tricheries impardonnables

Indépendamment des conséquences potentielles, ces tricheries à grande échelle, correspondant à des « pratiques non conformes », sont d’une extrême gravité. Dans quelle mesure peut-on supposer que ce système de falsification était connu et couvert en haut lieu ? Ces pratiques étaient-elles juste le fait de quelques ingénieurs, ou s’agissait-il d’un système à plus grande échelle ?

Cette affaire montre clairement les limites du système français de contrôle de la sûreté nucléaire, qui repose sur le postulat de la sincérité des industriels. Si l’exploitant ment, il est illusoire de penser qu’une Autorité de sûreté nucléaire qui dispose de trop peu de moyens humains et n’est pas équipée pour la répression des fraudes pourra repérer toutes les pratiques irrégulières !

Les responsables politiques couvrent le scandale

Encore une fois, l’industrie nucléaire fait la démonstration de son statut d’exception : dans n’importe quelle entreprise, un tel scandale aurait débouché sur des démissions ou des renvois. Or cela n’a pas été le cas ici. Les responsables politiques eux-mêmes ne semblent pas exiger d’ « opération vérité ». Emmanuel Macron, présent sur le site la veille de l’annonce des falsifications, évoquait « des lendemains difficiles, des doutes, peut-être des accrocs  ». Faisait-il référence à cette affaire ? Était-il informé de ce scandale ? Dans tous les cas, aucune déclaration du Ministère de l’Industrie n’a été publiée à ce sujet : une complaisance inacceptable au vu de l’ampleur du scandale et de ses conséquences potentielles.

Quant à la Ministre de l’Environnement, théoriquement en charge de la sûreté nucléaire, elle a choisi de prendre la défense d’Areva. Interrogée par RTL, celle-ci a déroulé une argumentation aussi hasardeuse que complaisante envers l’industriel. Le scandale a perduré sur des décennies et n’a éclaté que grâce aux demandes de l’ASN ? Ségolène Royal loue la « transparence » du système français ! Areva est sommée de mener un audit interne après des falsifications en série ? Elle évoque une entreprise « responsable » ! Et alors même que l’ASN elle-même n’a pas encore connaissance de tous les résultats, Mme Royal se permet d’asséner avec beaucoup d’assurance que « les résultats sont bons, ce sont juste les documents qui ont été mal faits » !

Quelles suites ?

Pressentant que les anomalies de la cuve de l’EPR ne représentaient que l’arbre qui cachait la forêt, le Réseau “Sortir du nucléaire“ avait déjà interpellé l’ASN le 11 avril pour obtenir la liste exhaustive des pièces fabriquées au Creusot et potentiellement concernées par de tels problèmes, ainsi que le nom des centrales qu’elles équipaient.

 

Téléchargez la réponse de l’ASN suite à notre demande d’informations du 11/04

PDF - 200.2 ko
Réponse de l’ASN 11/05/16

 

Dans l’immédiat, il est impératif d’identifier où se trouvent ces composants, et que des contrôles approfondis puissent être effectués. Si les pièces en questions laissent alors subsister des doutes quant à leur fiabilité, ou s’il n’était pas possible d’effectuer ces contrôles, le principe de précaution exigerait que les réacteurs concernés soient arrêtés en urgence et définitivement.

Le Réseau “Sortir du nucléaire“ se réserve la possibilité de porter plainte. Dans tous les cas, il faut craindre que ce scandale ne soit pas un cas isolé et que de telles pratiques puissent se retrouver dans d’autres usines liées à l’industrie nucléaire…

Source: Sortir du nucléaire

 

29 Commentaires

  1. bonjour

    « il n’y a pas de petites économies »

    « homosapienssapiensdestructor » est dans un gros merdier essentiellement du au

    pouvoir et à l’avoir . Depuis des lustres l’ « humanité » est gouvernée par des

    assassins et des voleurs mis en place par des dictatures ou des fausses

    démocraties avec le consentement d’inconscients ou de conscients…..

    La non maîtrise de la connerie humaine, du nucléaire, des ogm, des nanos

    particules, des pesticides et autres sources condamne à plus ou moins longues

    échéance le plus grand des prédateurs…

    Quand l’homme disparaîtra…. bon débarras…..

  2. Les coupables, parce qu’évidemment il y en a !!!
    Seront-ils jugés, pour un truc du genre: « Tentative de génocide généralisé par empoisonnement » ?

    A ce niveau là, les processus et les normes de contrôles sont tellement élevés, que la faute involontaire, ou la négligence ne peuvent être invoquées.

    Dans cette affaire, une palanquée de salauds méritent la pire des peines !
    Mais bon, comme cela n’a toujours pas pété chez nous, ….à quoi bon demander justice !https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_wacko.gif

  3. voici la réponse de l’ASN , pour les avoir pratiqué , ce sont des gens sérieux et incorruptibles

    http://investir.lesechos.fr/actions/actualites/areva-l-audit-du-creusot-n-a-pas-detecte-a-ce-stade-de-malfacons-1556063.php

    • Je n’en serait pas si sur à ta place, l’ASN dépend de l’état et l’état est actionnaire d’EDF. De plus ils ont tandence à classer tout les incidents ou accidents au dessous de la réalité

    • L’ASN ne peut pas être indépendant car elle reçois des fonds de l’état qui comme je les dit plus haut est actionnaire d’EDF

      Les moyens financiers

      http://www.asn.fr/L-ASN/Presentation-de-l-ASN/Les-moyens/Les-moyens-financiers

      • la structure financière on la connait , c’est en effet un organisme d’état , je n’imagine pas une seconde qu’ils soit capables d’enfouir un dossier ou de cacher des dysfonctionnements , ayant travaillé chez Areva pendant 30 ans , je peut dire que quand ils visitaient une installation , nos directeurs étaient équipés Pampers et pour y avoir été confronté , ils sont redoutables quand ils creusent un dossier.
        Donc Etat/EDF/Areva/ASN collusion d’intérêt ? je n’y crois pas .
        Et puis vous oubliez les lanceurs d’alertes , ça existe aussi dans ce milieu.

        • Et pourtant, a propos des 2 accidents nucléaires de Saint-Laurent-des-eaux ou les 2 coeurs ont à moitié fondu, sans parler du plutonium rejeté dans la Loire pendant plusieurs années

          Les mensonges de l’État, d’EDF et d’Areva sur le nucléaire

          http://www.saintpierre-express.fr/les-mensonges-de-letat-dedf-et-dareva-sur-le-nucleaire/

          Voilà ce qu’à dit à l’époque l’ASN et c’est scandaleux

          Ces deux accidents majeurs ont été classés par l’autorité de sureté nucléaire de l’époque comme incidents divers sans conséquences après vérifications. (voir l’article)

          En plus ces 2 accidents ont été cacher aux Français

          • Si je te comprend bien actuellement St LAURENT 1 et 2 fournissent 800 & 900 MW avec 2 réacteurs à moitié fondus.
            Quid des dégats aux riverains en aval de St Laurent : cancer , faunes mutantes etc etc. ???
            Le rejet , si il est illégal sur le papier a du être autorisé dans des doses acceptables en terme de santé publique et environnementale
            Que l’on soit anti nucléaire , soit , c’est compréhensible , mais dites vous bien qu’on va encore en manger pour 30 ans car rien n’est prêt pour son remplacement , et le belles idées ,derrière la voiture électrique et le ferroutage , il y a une centrale au bout.
            L’Allemagne , modèle écologique a choisi de faire du rejet CO2 , libre choix , mais pas bio non plus.

  4. Mobilisation le 5 juin contre l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure

    http://www.bastamag.net/200-000-pas-a-Bure-mobilisation-le-5-juin-contre-l-enfouissement-des-dechets

  5. Le vrai parcours du Nuage de Fukushima (True Cloud Fukushima way)

    http://www.youtube.com/watch?v=MXHEYEBPZ1g

  6. « Le bombardement des neutrons accélère la dégradation de la résistance mécanique des métaux, si bien que les pièces métalliques qui sont au contact des substances radioactives sont particulièrement vulnérables au vieillissement. » et c’est même un vrai miracle du recuit, que ces métaux bombardés des décennies durant résistent encore, alors que chaque atome du métal a été bombardé des centaines de fois !!

    L’électronique, elle, ne résiste et ne survit guère plus que les hommes dans les coeurs fondus des réacteurs de Fukushima, ce qui bloque toute possibilité d’intervention par robots, abandonnés morts dans ces réacteurs .

  7. « Ces pratiques auraient apparemment pris fin entre 2010 et 2012. » https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_yahoo.gif
    ça fait du bien de rire en ces jours de sinistrose.

    Plus sérieusement les centrales sont fiables, voici un documentaire pour l’attester http://www.youtube.com/watch?v=Rnz1xvblGvQ

  8. La centrale de Garona, en Espagne est du type Fukushima bonne pour péter avant 2031 et irradier toute la France avec les vents dominants :

    http://reporterre.net/Le-militant-Txetx-Etcheverry-poursuivi-pour-une-prise-de-parole-anti-nucleaire

    « la fermeture de la centrale de Garona, en Espagne, encore plus vieille que Fessenheim puisqu’elle est entrée en fonctionnement en 1971, a déclaré le militant. C’est le même modèle de réacteur que celui qui a pété à Fukushima. Il a été arrêté suite à plusieurs incidents mais l’entreprise propriétaire, Nuceonor, demande sa réouverture jusqu’en 2031 – pour une durée de vie de 60 ans ! » manifestation pour la fermeture de cette centrale est prévue samedi 11 juin à Gasteiz, dans le Pays basque espagnol ».

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