Notre-Dame : pourquoi la générosité des milliardaires et des multinationales pose question. Par BastaMag.

On sait que depuis cette polémique sur les dons des milliardaires, certains ont refusé la défiscalisation de leur contribution. Si on défiscalise ces donations, c’est l’État et donc l’argent des contribuables qui devra compenser. Partagez ! Volti

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Par Olivier Petitjean pour BastaMag

Environ 700 millions de dons ont déjà été promis par plusieurs grandes fortunes et multinationales pour financer les réparations et reconstructions nécessaires suite au dramatique incendie qui a frappé la cathédrale parisienne, l’un des monuments les plus visités d’Europe. Ces dons, les ristournes fiscales dont ils pourraient bénéficier et les contreparties dont ces généreux donateurs pourraient profiter, font polémique. L’occasion de faire le point sur les questions et controverses que suscite le mécénat culturel prisé par les grandes fortunes françaises.

Après le spectaculaire incendie de Notre-Dame, les grandes fortunes et grands groupes français n’ont pas perdu de temps pour offrir leurs services. Bernard Arnault, PDG de LVMH, a promis 200 millions d’euros pour la rénovation du monument, de même que L’Oréal (propriété de la famille Bettencourt). La famille Pinault (groupe Kering) et le pétrolier Total ont annoncé 100 millions d’euros, l’afficheur JCDecaux 20 millions, la famille Bouygues 10 millions, la fondation du Crédit agricole 5 millions… [1] Autant de dons versés soit directement par les groupes, soit via leurs fondations d’entreprise, soit à titre individuel par leurs patrons. Les groupes de construction Vinci et Bouygues proposent également de mettre à disposition leurs employés et leurs compétences pour la reconstruction de Notre-Dame.

Cet élan de générosité fait déjà polémique. L’essentiel de ces promesses de dons seront ainsi défiscalisés à 60% pour une entreprise, à 66% pour un particulier, voire à 90% si le gouvernement décide de leur appliquer la ristourne prévue par la loi pour le mécénat relatif aux « trésors nationaux ». C’est ce qu’a demandé notamment l’ancien ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon – et conseiller de François Pinault – au lendemain de l’incendie.

Autrement dit, sur les 200 millions d’euros promis par L’Oréal ou par la famille Arnault, seule une petite partie sera effectivement à leur charge, le reste étant compensé par la réduction de leur ardoise fiscale [2]. Ce seront donc au final les pouvoirs publics qui acquitteront l’essentiel de ces sommes pour compenser les impôts perdus, pendant que les milliardaires et les multinationales pourront s’adjuger le mérite d’avoir facilité la restauration de la cathédrale – tout en ayant le pouvoir d’affecter les impôts qu’elles paient là ou elles le souhaitent. La famille Pinault, dont la fortune est estimée à 30,5 milliards d’euros, aurait cependant annoncé, suite à la controverse, qu’elle ne chercherait pas à bénéficier du dispositif.

Coût du mécénat culturel : presque un milliard d’euros par an

L’avalanche de générosité dont bénéficie la cathédrale parisienne intervient à un moment où les allégements fiscaux liés au mécénat culturel sont de plus en plus contestés. Le groupe LVMH et son PDG Bernard Arnault, dont la fortune est désormais estimée à 77,2 milliards d’euros, sont aujourd’hui l’objet d’une plainte, inspirée par un rapport au vitriol de la Cour des comptes, pour avoir abusé du dispositif lors de la construction de la Fondation Louis Vuitton. Inaugurée en 2016 dans le bois de Boulogne, ce lieu avait été présenté par Bernard Arnault comme un « cadeau à la France ». Selon les calculs de la Cour des comptes, son budget total de 790 millions d’euros a donné lieu à des déductions fiscales de 518 millions pour diverses sociétés du groupe du milliardaire. Les magistrats se sont aussi étonnés publiquement des factures hors normes affichées par LVMH et le maître d’œuvre du chantier, Vinci (lire notre article).

Une « Pinault Collection » doit ouvrir cette année dans le bâtiment de la Bourse du commerce, dans le 1er arrondissement de la capitale, où la famille Pinault exposera les œuvres acquises. Les Pinault, propriétaires du géant du luxe Kering – actuellement au centre d’un scandale d’évasion fiscale lié à sa filiale Gucci [3] – ont assuré qu’ils ne chercheraient pas à faire valoir leurs droits à une ristourne fiscale. L’opération n’en a pas moins été contestée, puisque la ville de Paris a acheté le bâtiment 86 millions d’euros, pour le louer ensuite à la famille milliardaire ses 3000 m2 pour seulement 60 000 euros par an (plus une redevance initiale de 15 millions d’euros). Une location quasiment cadeau au vu du prix de location moyen dans cet arrondissement [4].

Quelles « contreparties » pour les riches donateurs ? …/…

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Source BastaMag

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