Et si la croissance était définitivement derrière nous ?

La baisse tendancielle du taux de croissance des pays dits « développés » sur le demi-siècle qui vient de s’écouler suggère que la crise actuelle est loin d’être une anomalie. En fait la véritable anomalie serait la croissance économique des 30 glorieuses qui a servit de base à la conception des politiques économiques modernes…

Le film se répète d’année en année. Au moment d’établir son budget, le gouvernement table sur la croissance pour boucler les comptes. 0,8 % du PIB en 2013, 1 % en 2014, 1,7 % en 2015. Puis l’indécrottable optimisme de François Hollande est démenti par les faits. En 2013, la croissance a finalement plafonné à 0,3 %. Cette année, elle ne devrait pas dépasser 0,4 %. Et, pour l’année prochaine, Bercy ne se fait plus d’illusions : le PIB ne devrait pas augmenter de plus de 1 %.

Et si la véritable croissance était derrière nous ? La question agite la communauté des économistes. François Hollande et les experts de Bercy semblent eux-mêmes se la poser. Selon Les Échos de vendredi, le retour promis à 3 % de déficit en 2017 repose sur des hypothèses un peu plus raisonnables que celles de la trajectoire budgétaire transmise à Bruxelles en avril. Au lieu de 2,25 % par an, Bercy aurait retenu 1,6 % en 2016 et 1,9 % en 2017. Mais il se pourrait que ces estimations soient encore beaucoup trop optimistes.

L’alarme des Américains

La croissance pourrait, en effet, être durablement faible et ne jamais revenir à ses niveaux d’avant-crise. L’hypothèse ne concerne pas seulement la France, mais l’ensemble des pays développés. Pour preuve, ce sont surtout des économistes américains qui ont sonné l’alarme, à commencer par Larry Summers, célèbre secrétaire au Trésor du président américain Bill Clinton et candidat malheureux à la présidence de la banque centrale. Selon ces oiseaux de mauvais augure, le déclin de la croissance est inexorable à long terme. Au point qu’il faudrait se préparer à un risque de « stagnation séculaire », susceptible de faire vaciller le modèle économique des sociétés occidentales.

Pour Larry Summers, la croissance est menacée aux États-Unis par une demande insuffisante, liée à l’accroissement continu des inégalités de revenus, les riches ayant une tendance à épargner une plus grande partie de leurs revenus plutôt qu’à consommer. Une mécanique qui finit par réduire les opportunités d’investissements des entreprises dans l’économie réelle. Gavées de cash dont elles ne savent plus quoi faire, elles préfèrent placer leur montagne de profits sur les marchés financiers, voire dans l’immobilier, au risque de générer des bulles, plutôt que d’investir. De quoi expliquer le succès, outre-Atlantique, du livre de Thomas Piketty Le Capital au XXIe siècle, centré sur la dynamique des inégalités.

Vers un ralentissement du progrès technique ?

Selon les tenants de la « stagnation séculaire », la tendance au déclin de la croissance, déjà engagée depuis des décennies, serait aussi entretenue par l’affaissement du progrès technique. C’est la thèse de Robert Gordon. L’économiste américain estime que les révolutions industrielles nées de l’invention de l’électricité, puis de la combinaison du moteur à essence et des canalisations domestiques, ont été infiniment plus importantes pour l’augmentation de la qualité de vie et de la productivité que l’électronique grand public. Et il ne voit pas de technologies futures capables d’inverser la tendance. Or, si les gains de productivité peuvent d’abord conduire à détruire de l’emploi (par l’utilisation plus intensive de machines, par exemple), ils constituent à long terme une source de croissance.

Beaucoup ne partagent pourtant pas un tel pessimisme sur le progrès technique. Barry Eichengreen, lui aussi économiste américain, ne croit pas qu’il soit durablement stoppé. « Les pessimistes ont prédit un ralentissement du rythme des inventions pendant des siècles et ils ont eu constamment tort », écrit-il. Ce spécialiste du système monétaire mondial voit un potentiel formidable dans le développement des robots intelligents ou de la génétique. Et rappelle que les débuts de l’électrification, dans les années 1890, ont été marqués par une période de faible augmentation de la productivité, parce que l’économie n’avait pas eu le temps de s’adapter pour profiter du progrès.

Déclin de la productivité du travail ?

D’autres économistes relativisent le ralentissement de la productivité en invoquant des problèmes d’évaluation du phénomène. Si la comptabilité nationale prend en compte l’amélioration de la qualité des biens, elle ne sait en effet pas mesurer celle de la qualité des services. Le gain de temps généré par les commandes sur Internet n’est, par exemple, pas bien appréhendé. Beaucoup de nouveaux services gratuits, comme YouTube ou Google, ne comptent donc pour rien dans le calcul de la richesse nationale produite.

En attendant, le déclin des gains de productivité du travail, c’est-à-dire le rapport entre une production donnée et les moyens humains mis en oeuvre pour l’obtenir, apparaît en tout cas particulièrement fort en Europe. « Depuis les années 1970, les gains de productivité dans la zone euro ont continuellement diminué ; ils sont devenus aujourd’hui extrêmement faibles », écrit Patrick Artus, le directeur de la recherche économique de la banque Natixis.

Pour ce partisan de réformes structurelles ambitieuses, le « PIB potentiel »* de la France est donc durablement affaibli. En d’autres termes, le volume de richesses que l’économie française est capable de produire de façon récurrente par la simple combinaison du volume de travail et de capital disponibles ainsi que du progrès technique a diminué.

Nombreux sont les experts qui pensent en effet, comme Patrick Artus, que la crise financière, puis celle de la zone euro, a été d’une telle violence qu’elle a détruit de façon permanente des capacités de production. Pour eux, les usines fermées auront beaucoup de mal à être remplacées tandis que des chômeurs sans emploi depuis plus d’un an, voire deux, auront énormément de difficulté à se réinsérer un jour sur le marché du travail, même en cas d’amélioration de la conjoncture. Dans une note de juin, l’économiste de Natixis évalue ainsi que la crise a détruit 2,4 % du PIB potentiel de la France. Et il estime la « croissance potentielle à 10 ans » à seulement 0,8.

Lire la suite sur Le Point.fr

12 Commentaires

  1. Il y a quand meme de la croissance en france.
    Le Chomage, la misere, la richesse des politiques, les cadeaux aux grandes entreprises, la corruption .
    Donc il ne faut pas desespérer, il y a encores des choses qui croissent ici bas.

  2. Et si le point lisait le livre de Piketty. La croissance prévisible sur le long terme est de 1,6%. La moitié en productivité, l’autre moitié en augmentation de population.

    La croissance c’est de la connerie. Un mythe de rentiers.

  3. Bientôt la « croissance négative » comme diraient les experts. xD

    • Croissance négative ? alors on remets en question les mathématiques?
      Régression oui.

      • économie de l’usure ,c’est toujours le peuple qui trinque.
        l’arrogance des usuriers n’as point de limites ,se nourrissant de la spoliation des terres et des biens dont ils sont les seul a pouvoirs enchérir a la baisse « vente a la bougie »!

  4. Le problème du système capitalisme est la nécessité de croissance infinie pour survivre.

    Une croissance infinie n’étant pas possible alors le capitalisme a trouvé le moyen simple de détruire ce qu’il produit pour le reconstruire ensuite , cette méthode s’appelle la guerre.

    La guerre permet la destruction , la mise sous contrôle de pays par des remboursements de dommages de guerres , la suppression de la surpopulation qui coût en terme de retraite , de chômage , de soins etc …. vous avez compris le sens de mon intervention

    On efface tout et on recommence jusqu’à présent sans les armes nucléaires cela permettait au capitalisme de croître mais comme l’a dis Einstein « Je ne suis pas comment sera la troisième guerre mondiale mais il n’y aura plus beaucoup de monde pour voir la quatrième »

    Philippe

  5. on jette et on stocke,ce qui ce fabrique et qui ne se se vend pas

    hum..les politiciens de la promesse

    arrêtons la soumission consommatrice et usurière

    restons dans les fondamentaux

  6. Il nous reste la décroissance.

Les commentaires sont clos.