Le criminel, c’est l’électeur ! Par Albert Libertad (1er mars 1906)

À lire ou à relire mais surtout à méditer. Beaucoup de revendications en France ce samedi, comme celui d’avant, étouffées par les exactions d’une frange violente, préoccupée à casser et brûler. Ce qui arrange bien les médias, qui ont fait leurs choux gras de ces violences. La voix du peuple a été mise entre parenthèse, pas assez “vendeur” pour l’audimat. Tout comme pour les gilets jaunes, ces “casseurs” connus et reconnus font bien le jeu de l’oligarchie, et décrédibilise toute action populaire pour se faire entendre. Ça justifiera bien, d’autres mesures liberticides non ? À qui la faute ? Partagez ! Volti

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Albert Libertad/Wikipédia

Joseph Albert, dit Albert Libertad ou Libertad, né le 24 novembre 1875 à Bordeaux et mort assassiné par empoisonnement à l’Anthrax 12 novembre 1908, à l’Hôpital Lariboisière à Paris, après y avoir été admis à la suite d’un tabassage par la police en Suisse alors qu’il allait y donner conférence, est un militant libertaire français, anarchiste individualiste Il est parmi les fondateurs, en 1902, de la Ligue antimilitariste et participe à l’essor du mouvement des « Causeries populaires ».

Wikipédia

Par Maud pour Agoravox (**Proposé par Maud, le 5 mai 2017 à l’occasion des élections présidentielles. Texte qui devrait interroger, vu la situation de la France en 2020 et ce n’est pas fini!!** )

1906, Albert Libertad publie ce texte virulent dans l’Anarchie, un journal qu’il a lui-même fondé une année auparavant. La charge est violente à l’égard des électeurs. Les mots sont crus et la lecture brutale. Mais le texte est à la hauteur de l’accusation. L’électeur est coupable de collaborer à sa propre aliénation politique. Une lecture intéressante à la veille du second tour de l’élection présidentielle et un petit renvoi d’ascenseur à tous ceux qui jugent l’abstention dangereuse. En voilà un autre, mes amis les électeurs, en votant vous acceptez le contrat présidentiel de la V république, merci de ne pas venir râler après.


LE CRIMINEL, c’est l’Electeur !

C’est toi le criminel, ô Peuple, puisque c’est toi le Souverain. Tu es, il est vrai, le criminel inconscient et naïf. Tu votes et tu ne vois pas que tu es ta propre victime.

Pourtant n’as-tu pas encore assez expérimenté que les députés, qui promettent de te défendre, comme tous les gouvernements du monde présent et passé, sont des menteurs et des impuissants ?

Tu le sais et tu t’en plains ! Tu le sais et tu les nommes ! Les gouvernants quels qu’ils soient, ont travaillé, travaillent et travailleront pour leurs intérêts, pour ceux de leurs castes et de leurs coteries.

Où en a-t-il été et comment pourrait-il en être autrement ? Les gouvernés sont des subalternes et des exploités : en connais-tu qui ne le soient pas ?

Tant que tu n’as pas compris que c’est à toi seul qu’il appartient de produire et de vivre à ta guise, tant que tu supporteras, – par crainte,- et que tu fabriqueras toi-même, – par croyance à l’autorité nécessaire,- des chefs et des directeurs, sache-le bien aussi, tes délégués et tes maîtres vivront de ton labeur et de ta niaiserie. Tu te plains de tout ! Mais n’est-ce pas toi l’auteur des mille plaies qui te dévorent ?

Tu te plains de la police, de l’armée, de la justice, des casernes, des prisons, des administrations, des lois, des ministres, du gouvernement, des financiers, des spéculateurs, des fonctionnaires, des patrons, des prêtres, des proprios, des salaires, des chômages, du parlement, des impôts, des gabelous, des rentiers, de la cherté des vivres, des fermages et des loyers, des longues journées d’atelier et d’usine, de la maigre pitance, des privations sans nombre et de la masse infinie des iniquités sociales.

Tu te plains ; mais tu veux le maintien du système où tu végètes. Tu te révoltes parfois, mais pour recommencer toujours. C’est toi qui produis tout, qui laboures et sèmes, qui forges et tisses, qui pétris et transformes, qui construis et fabriques, qui alimentes et fécondes !

Pourquoi donc ne consommes-tu pas à ta faim ? Pourquoi es-tu le mal vêtu, le mal nourri, le mal abrité ? Oui, pourquoi le sans pain, le sans souliers, le sans demeure ? Pourquoi n’es-tu pas ton maître ? Pourquoi te courbes-tu, obéis-tu, sers-tu ? Pourquoi es-tu l’inférieur, l’humilié, l’offensé, le serviteur, l’esclave ?

Tu élabores tout et tu ne possèdes rien ? Tout est par toi et tu n’es rien.

Je me trompe. Tu es l’électeur, le votard, celui qui accepte ce qui est ; celui qui, par le bulletin de vote, sanctionne toutes ses misères ; celui qui, en votant, consacre toutes ses servitudes.

Tu es le volontaire valet, le domestique aimable, le laquais, le larbin, le chien léchant le fouet, rampant devant la poigne du maître. Tu es le sergot, le geôlier et le mouchard. Tu es le bon soldat, le portier modèle, le locataire bénévole. Tu es l’employé fidèle, le serviteur dévoué, le paysan sobre, l’ouvrier résigné de ton propre esclavage. Tu es toi-même ton bourreau. De quoi te plains-tu ?

Tu es un danger pour nous, hommes libres, pour nous, anarchistes. Tu es un danger à l’égal des tyrans, des maîtres que tu te donnes, que tu nommes, que tu soutiens, que tu nourris, que tu protèges de tes baïonnettes, que tu défends de ta force de brute, que tu exaltes de ton ignorance, que tu légalises par tes bulletins de vote, – et que tu nous imposes par ton imbécillité.

C’est bien toi le Souverain, que l’on flagorne et que l’on dupe. Les discours t’encensent. Les affiches te raccrochent ; tu aimes les âneries et les courtisaneries : sois satisfait, en attendant d’être fusillé aux colonies, d’être massacré aux frontières, à l’ombre de ton drapeau.

Si des langues intéressées pourlèchent ta fiente royale, ô Souverain ! Si des candidats affamés de commandements et bourrés de platitudes, brossent l’échine et la croupe de ton autocratie de papier ; Si tu te grises de l’encens et des promesses que te déversent ceux qui t’ont toujours trahi, te trompent et te vendront demain : c’est que toi-même tu leur ressembles. C’est que tu ne vaux pas mieux que la horde de tes faméliques adulateurs. C’est que n’ayant pu t’élever à la conscience de ton individualité et de ton indépendance, tu es incapable de t’affranchir par toi-même. Tu ne veux, donc tu ne peux être libre.

Allons, vote bien ! Aies confiance en tes mandataires, crois en tes élus.

Mais cesse de te plaindre. Les jougs que tu subis, c’est toi-même qui te les imposes. Les crimes dont tu souffres, c’est toi qui les commets. C’est toi le maître, c’est toi le criminel, et, ironie, c’est toi l’esclave, c’est toi la victime.

Nous autres, las de l’oppression des maîtres que tu nous donnes, las de supporter leur arrogance, las de supporter ta passivité, nous venons t’appeler à la réflexion, à l’action.

Allons, un bon mouvement : quitte l’habit étroit de la législation, lave ton corps rudement, afin que crèvent les parasites et la vermine qui te dévorent. Alors seulement du pourras vivre pleinement.

Albert Libertad

Source Agoravox

Volti

12 Commentaires

  1. Et moi qui croyais que “veauter” c’était synonyme de conquête d’autonomie….mince alors, on a profité de mon enfance pour me faire croire à des conneries !!

  2. c est tout à fait normal que les anarchistes accusent les électeurs de criminels ,si 95 % des personnes s exprimaient lors d élections ça anéantirait leur propagande ,qui consistent à dire que les politiques ne représentent pas la société ….par contre eux ne représentent qu eux mêmes ils n ont strictement aucune légitimité ,juste le fait de se faire connaitre par une sur enchère verbale ….

    • “eux ne représentent qu eux mêmes” … C’est bien ce qu’ils revendiquent !
      “ils n ont strictement aucune légitimité” … Les autres non plus !

      “Car enfin le trait le plus visible dans l’homme juste est de ne point vouloir du tout gouverner les autres, et de se gouverner seulement lui-même. Cela décide tout. Autant dire que les pires gouverneront”. Alain

      • ” Car enfin le trait le plus visible dans l’homme juste est de ne point vouloir du tout gouverner les autres, et de se gouverner seulement lui-même. Cela décide tout. Autant dire que les pires gouverneront ». Alain
        ouais c est l illusion à laquelle ceux qui accusent les électeurs de criminels veulent faire croire …..on a eu un bel exemple que cette illusion n est qu une plaisanterie avec les GJ, qui ne voulaient pas de représentants , n y de portes paroles,
        il n a pas fallu longtemps pour que quelques uns émergent du lot et passent dans les médias régulièrement , en a vite suivi des guéguerres internes puis le fiasco des élections européennes……
        « eux ne représentent qu eux mêmes » … C’est bien ce qu’ils revendiquent ! “ils n ont pas le choix
        « ils n ont strictement aucune légitimité » … Les autres non plus !”toujours plus que ceux qui n ont jamais été candidat à rien ,même représentant de leur classe en primaire ,de peur de se ramasser une vestehttps://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_yahoo.gif

    • petit predateur..
      on te fais comprendre que ton vote ai inutile ,prouvé.
      les anarchistes que tu écris te là mettes aussi bien que les représentants du pouvoir.

      Un chien renifle les truffes en foret à cet époque..
      Le rouge gorge siffle ..

      Et Octave Mirbeau te là souhaite Bonne .
      et va la vie , sans carte d’ élire qui que ce soit.

  3. La démocratie.

    Confier sa vie, sa liberté à quelqu’un qu’on ne connait pas, qui est prêt à tout écraser pour arriver premier ?

    La démocratie a vécu… Faut trouver mieux…

    • Mais, quelque soit le système il y en aura toujours qui trouveront les moyens d’en profiter, créant ainsi des abus et la condamnation du dit système… L’homme est cupide, aucun espoir.

  4. @boco

    La démocratie a été effective aux USA pendant un siècle.
    Constitution, lois antitrusts…etc

    Le problème n’ est pas d’ être pour ou contre la démocratie !
    Le problème est de comprendre que ce qui nous est vendu comme une démocratie…est une dictature d’ une oligarchie !!

  5. – Moi aussi, j’aimerai que l’eau ne noie point, que le feu ne brûle point, que le froid ne tue point.

    – C’est tellement plus facile de rejeter la faute sur l’outil, plutôt que de maudire son incapacité à s’en emparer correctement, …fusse-t’il par la force.

    “La faute c’est toujours l’autre.”

    • @engel

      Le problème est que beaucoup confondent la démocratie avec l’ Etat providence !

      La démocratie, c’ est la liberté de faire ses choix et de s’ assumer sans dépendre de qui que ce soit.

      L’ Etat providence, c’ est la dépendance assurée !

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