Rude rentrée pour les universités : abandonnées par l’État, poussées à chercher de l’argent privé

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Source BASTA

Blocage de l’Université Paris-8 en décembre 2007, dans le cadre de la mobilisation étudiante contre la loi LRU. CC K’m via Wikimedia Commons.

La nouvelle loi sur l’université et la recherche, la LPPR, marque une étape supplémentaire dans le désengagement de l’État vis-à-vis de l’enseignement supérieur public. Conséquences : gels de postes, conditions d’enseignement dégradées et augmentation des frais d’inscription.

Les universités françaises s’apprêtent à faire leur rentrée sous une double menace : la Covid-19, qui risque encore d’empêcher la pleine reprise des cours en présentiel, et une nouvelle loi, la LPPR, pour « loi pluriannuelle de programmation de la recherche ». Elle a été présentée en Conseil des ministres en plein été et doit arriver à l’Assemblée nationale le 21 septembre. Derrière les belles promesses de la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal annonçant « 25 milliards d’euros » pour la recherche, ce texte cache des perspectives beaucoup moins réjouissantes pour les chercheurs et les personnels des universités.

Cette nouvelle loi ouvre grand la voie au recrutement d’enseignants-chercheurs sur des contrats de quelques années seulement. Ce sont les fameux « contrats de projet ». Ceux-ci se terminent à la fin du financement d’un projet de recherche. La loi de Frédérique Vidal veut aussi mettre en place des « tenure track », comprenez des recrutements en CDD de trois à six ans, avec une possible – mais pas du tout certaine – titularisation à la fin.

Au lieu de donner aux universités les moyens d’embaucher des enseignants-chercheurs titulaires, sur des postes de fonctionnaires, la LPPR mise principalement sur le financement par « projets ». Ce qui s’inscrit dans la continuité des « initiatives d’excellence » et autres « programmes d’investissements d’avenir » qui visent depuis des années à financer au coup par coup certains établissements plutôt que de pérenniser l’enseignement supérieur public et la recherche fondamentale sur le long terme. La LPPR est une pierre de plus dans cette série de réformes de l’université, depuis la loi « LRU » (loi « libertés et responsabilités des universités »), adoptée en 2007, sous Sarkozy.

Des plans d’austérité pour les universités en déficit

Sous couvert d’« autonomie » et de « responsabilité » des universités, l’État dépense en fait toujours moins pour l’enseignement supérieur. Résultat : les établissements se retrouvent régulièrement dans des situations budgétaires difficiles, gèlent les embauches et vont jusqu’à réduire le nombre d’heures de cours. « Auparavant, on avait à peu près vingt postes de maîtres de conférence ouverts chaque année, suite aux départs en retraites et aux mutations. Aujourd’hui, on est passé à trois ! », illustrent Florent Calvayrac, enseignant-chercheur en physique à l’université du Mans, délégué syndical du Snesup-FSU.

L’université du Mans a connu des « exercices budgétaires déficitaires » en 2017 et 2018. En conséquence, la présidence de l’université a annoncé « un plan de retour à l’équilibre ». Bref, un plan d’austérité. Comme l’a constaté l’enseignant en physique : « On nous demande sans arrêt de réduire la voilure. Il n’y a même plus tout à fait assez d’argent pour payer les heures supplémentaires. Donc, on nous a fait diminuer de quelques pour cent les volumes horaires de cours dans chaque formation. »

Chaque année, des universités se retrouvent dans le rouge. La Cour des comptes alerte régulièrement sur ce phénomène, à l’œuvre dès la mise en route de la loi LRU. Avec l’autonomie budgétaire, les universités se sont retrouvées à devoir gérer seules le personnel. Or, la dotation que leur attribue l’État fait abstraction de l’évolution du coût de la masse salariale, ce qu’on appelle le « glissement vieillesse technicité ». Les personnels fonctionnaires des universités gagnent en échelon en vieillissant. Ils « coûtent » donc plus cher au fur et à mesure des années. L’État ne compense plus ces frais en augmentation. Ce qui provoque mécaniquement un trou dans les finances des établissements.

« Débrouillez-vous »

Cela s’est produit à l’université de Bretagne Sud, dont les campus sont à Lorient, Vannes et Pontivy (Morbihan), désignée par la Cour des comptes comme présentant une situation budgétaire « très dégradée ». « À cause de la pyramide des âges des enseignants-chercheurs, nous avons fait face à un glissement vieillesse-technicité qui a pénalisé l’université, explique François Merciol, enseignant-chercheur en informatique à l’université bretonne, lui aussi délégué du Snesup. On a commencé à parler des universités en faillite juste après la loi LRU. À partir de là, l’État a dit aux universités “débrouillez-vous”. On parle d’autonomie et de responsabilité, mais, en fait, cela veut dire que l’université doit gérer les problèmes sans qu’on lui donne plus d’argent. L’université de Bretagne Sud a essayé d’être bonne élève. Finalement, nous servons plutôt de ballon d’essai et nous subissons tout autant les gels de postes. »

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Source BASTA

Voir :

Nouveaux OGM : le gouvernement rechigne à les encadrer malgré une décision de justice

Volti

5 Commentaires

  1. 6% du PIB alloués à l’enseignement en France.

  2. Elle ne sont pas abandonnées par l’état. Elles sont vendues au privé.
    A l’école dans les années 70, déja il y avait dans les école d’ingé des “aides du privé” sous forme de matériel.
    Ainsi le labo d’electronique était equipé par HP. “Gracieusement” et il y avait une participation “amicale” d’une filliale de Thomson pour les equipement radio.

  3. Mouhai,
    sa va pousser a encore plus permettre les financements des Industriels,
    et donc ainsi de biaiser les études davantage lorsque les résultats leurs seraient préjudiciables.

    D’un autre coté tant mieux, l’argent du contribuable ne dois pas servir aux tricheurs
    qui justement prennent trop souvent le contribuable pour un idiot,
    afin de mieux l’arnaquer.

  4. J’étais dans les premiers à dénoncer ce projet relative à l’autonomie des universités portée par Pécresse.
    Ce qui avait fait échoué le mouvement était la mouvance des bobos qui se sont infiltrés dans les différentes AG dans le but de faire croire que tous les étudiants seraient gagnants vis à vis de l’accès au marché du travail.

    En réalité, il a été développé comme prévu des formations à la carte en fonction des besoins des entreprises dont on sait qu’elles varient considérablement.
    De ce fait, des étudiants qui commencent à faire un cursus et qui le valident, et pensent décrocher direct un job, se retrouvent à la case Pole Emploi avec plusieurs solutions :
    1) refaire un nouveau cursus.
    2) équipier au Mc Do.

    Pour beaucoup, la solution 2) est imposée de part le loyer à payer.

    • Après la grève de l’université et Mme qui a laissé pourrir la situation, un proche a bifurqué vers une école de commerce , il a dû faire un crédit avec ses parents…

      Un autre qui travaille auprès de la Direction d’une grande université m’a dit
      que les petites universités n’avaient pas beaucoup de dotation contrairement aux grandes
      qui en avait trop!

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