Alors que Kiev se prépare à relancer la guerre dans le Donbass, les chancelleries française et allemande montrent toute leur inutilité….

Personne ne veut voir ce baril de poudre sur lequel nous sommes assis, avec la mèche allumée. Quoi qu’il arrive, vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas. Même si vous pensez que l’Ukraine est “loin”, notre européiste de banquier, ainsi que son homologue allemande et la Russie, se sont engagés à faire respecter les accords de Minsk. Nous sommes tous concernés et, nos chers dirigeants eux, seront bien à l’abri. Les “émeutes” Nutella seront de la gnognotte en comparaison de ce qui arrivera si….

Depuis la signature des accords de Minsk, l’incapacité et l’incompétence des chancelleries allemande et française à faire appliquer ces mêmes accords et à parler réellement de ce qu’ils recouvrent est devenue de plus en plus flagrante.

Mais suite au vote de la loi de réintégration du Donbass, cette incapacité à appeler un chat, un chat, et à faire pression sur Kiev, vient de montrer toute son étendue. Les deux pays majeurs de l’UE que sont la France et l’Allemagne viennent ni plus ni moins de montrer que ce n’est pas eux qui décident de quoi que ce soit concernant leur politique étrangère, mais bien Washington.

Alors que la Russie, mais aussi plusieurs politiciens et analystes ukrainiens, comme Viktor Medvedtchouk, Iouri Boyko, Vadim Rabinovitch, et Rouslan Bortnik, ont tous dénoncé le fait que cette loi enterre complètement les accords de Minsk et que l’Ukraine prend donc la mauvaise direction, la France et l’Allemagne, pourtant garantes de ces accords se sont fait remarquer par leur silence initial.

Ce n’est que le lendemain du vote de cette loi par la Rada, que l’Allemagne s’est fendu d’un communiqué dans lequel le gouvernement allemand déclare qu’ils doivent encore vérifier le texte, et qu’ils ne pouvaient faire de déclaration définitive à ce sujet, car ils ne l’avaient pas étudié (sic).

Oui, vous avez bien lu, ce texte de loi est en cours de vote depuis des mois en Ukraine, la version votée en seconde lecture est quasiment identique à celle votée en première lecture, mais Berlin ne l’a toujours pas étudiée, alors qu’il était évident depuis le retrait de la mention des accords de Minsk de la loi, que cette dernière avait toutes les chances d’entrer en conflit avec l’accord dont l’Allemagne est la garante !!!

Mais attendez, le meilleur est pour la fin. Donc ils n’ont pas vérifié le texte, mais le porte-parole ministère des Affaires étrangères allemand, Steffen Seibert, indique néanmoins que selon lui, « la loi souligne l’engagement en faveur d’un règlement pacifique et n’a pas pour but d’aggraver la situation ».

Bon reprenons depuis le début Steffen. Nous avons là un texte de loi, dont la seule mention aux accords de Minsk (qui sont la seule solution pacifique au conflit), a été retirée dès le vote en première lecture de la loi, qui déclare un des garants des accords comme étant un pays agresseur sans aucune preuve, qui prévoit d’utiliser l’armée en dehors de tout cadre constitutionnel du genre déclaration de guerre ou loi martiale, et qui met en place un quartier général unifié des forces armées du pays pour repousser l’agresseur imaginaire, et donc en réalité génocider la population civile du Donbass, mais pour monsieur Seifert, cette loi n’a pas pour but d’aggraver la situation et elle souligne l’engagement en faveur d’un règlement pacifique du conflit. Sic.

Je sais bien que dans la novlangue des élites occidentales, la guerre c’est la paix, et l’ignorance, c’est la force, mais là il y a des limites au fait de prendre les gens pour des demeurés.

Si cette loi souligne l’engagement de Kiev en faveur d’un règlement pacifique du conflit, qu’est-ce qu’il faudrait qu’elle contienne pour que monsieur Seifert considère quelle a pour but d’aggraver la situation ? Des camps de concentration pour les habitants du Donbass ? Ou même ça il essaierait de nous les faire passer pour des camps de vacances ?

Et si on regarde du côté de Paris, alors là c’est le pompon. En réponse à une question sur le fait que cette loi entrerait potentiellement en contradiction avec les accords de Minsk, la réponse de la diplomatie française vaut son pesant de cacahuètes.

Je vous mets les parties les plus importantes, pour que vous puissiez juger du niveau de bêtise abyssale de cette réponse, et je mets mes réponses et commentaires au fur et à mesure

« L’Ukraine a adopté le 6 octobre 2017 une loi permettant de renouveler pour un an le statut spécial dans le Donbass, marquant ainsi son engagement à mettre en œuvre les accords de Minsk. »

On commence par une tentative de botter en touche en parlant d’une autre loi, tout en oubliant de préciser que la loi a été profondément remaniée par rapport à la première version de ce statut spécial, et que cette nouvelle version ne répond absolument pas aux exigences des accords de Minsk. En clair cette loi n’est que de l’enfumage. Y a mieux comme preuve d’engagement à la mise en œuvre des accords de Minsk. Mais lisons la suite.

« L’adoption de la loi « sur la garantie de la souveraineté de l’Ukraine sur les territoires temporairement occupés des régions de Donetsk et de Louhansk », le 18 janvier, concerne l’organisation interne des structures civiles et militaires de l’Ukraine dans le contexte du conflit dans l’Est du pays. Cette loi ne saurait remettre en cause la mise en œuvre par la Russie et l’Ukraine des accords de Minsk. »

Avec ce paragraphe là on touche le fond. Soit la personne qui a fait cette réponse n’a pas lu le texte de loi voté par la Rada, soit cette personne a le QI d’une huître cuite à la vapeur, soit cette personne est d’une hypocrisie sans borne. Les options n’étant pas exclusives et pouvant se cumuler. Car comment qualifier autrement cette réponse totalement à côté de la plaque ?

Cette loi désigne un des garants des accords de Minsk comme le pays agresseur et même comme occupant les territoires des Républiques Populaires de Donetsk et de Lougansk (RPD et RPL), jette aux orties les accords de Minsk, prône le retour de ces territoires sous le giron ukrainien par l’usage de la force militaire en dehors de tout cadre légal du point de vue constitutionnel, et la diplomatie française nous présente ça comme si c’était une simple réorganisation interne des structures civiles et militaires de l’Ukraine dans la zone de conflit.

C’est comme si après le vote des lois de Nuremberg par l’Allemagne nazie, on les avait qualifiées de simple « réorganisation interne de la société civile allemande ». Ou après le vote des pleins pouvoirs à Hitler, qu’on avait qualifié cela de « grand pas en avant pour la démocratie » (puisqu’ils ne lésinent pas sur la novlangue déjantée, autant aller jusqu’au bout du délire).

Le fin du fin étant la dernière phrase du paragraphe qui présente encore une fois la Russie comme étant partie prenante des accords de Minsk alors qu’elle n’est que garante. Donc il faut rappeler encore une fois, que NON ce n’est pas à la Russie de mettre en œuvre les accords de Minsk.

C’est à l’Ukraine, la RPD et la RPL de mettre en œuvre ces accords, dont ils sont les signataires. L’Allemagne, la France et la Russie n’en sont que les GARANTS au côté de l’OSCE. C’est comme si j’exigeais de la France et de l’Allemagne qu’elles appliquent les accords de Minsk, et le cessez-le-feu. C’est vraiment du débilisme comme disent les Russes.

En omettant ainsi la RPD et la RPL (qui, elles, sont signataires des accords de Minsk je le rappelle) et en mettant la Russie comme acteur du conflit, la France fait sienne la novlangue ukrainienne sur ce conflit, et légitime cette loi de réintégration du Donbass qui désigne la Russie comme étant l’agresseur face à l’Ukraine.

Je vous épargne le dernier paragraphe lénifiant et creux sur l’importance de respecter le cessez-le-feu et de s’engager à trouver une solution pacifique au conflit, qui ne veut plus rien dire quand on s’assoit à ce point sur l’évidence.

Ce texte de la diplomatie française montre une déconnexion totale avec la réalité, et cela est effrayant à plus d’un titre. Car cela veut dire que la France est prête désormais à se laisser entraîner dans une guerre avec la Russie pour ne pas déplaire au réel patron de l’Ukraine : les États-Unis.

La France et l’Allemagne vont donc laisser Kiev continuer sur sa lancée, jusqu’à ce que l’incendie atteigne l’UE.

Même l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), que l’on peut difficilement qualifiée de pro-russe, a été bien plus critique vis-à-vis de ce texte que Paris et Berlin réunies.

L’APCE a en effet voté une résolution dans laquelle elle appelle les autorités de Kiev à modifier la loi de réintégration Donbass pour la mettre en conformité avec les accords de Minsk et à garantir les droits humanitaires et la protection sociale de la population dans la région du Donbass.

C’est un député de la Rada du Bloc d’opposition, Vadim Novinsky, qui a rapporté les faits mercredi sur son compte Facebook, en soulignant « qu’il s’agit de la première réponse sérieuse de la communauté internationale à cette loi controversée ».

Le député a aussi souligné que l’APCE a publié un rapport sur la situation humanitaire en Ukraine, qui donne une image vraiment impressionnante de la catastrophe humanitaire sur laquelle le gouvernement ukrainien tente de fermer les yeux.

En raison de la guerre dans la région du Donbass, plus de quatre millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire. La guerre a coûté la vie à plus de 10 000 personnes (dont presque 6 000 civils rien qu’en RPD et en RPL), tandis que plus de 1,5 million de personnes sont devenues des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et que près d’un demi-million d’entre elles demandent l’asile dans d’autres pays (principalement en Russie, le pays prétendument agresseur, cherchez la logique).

En attendant que les garants des défunts accord de Minsk se réveillent, l’Ukraine quant à elle, ajoute chaque jour un peu plus de terre sur ce qui fut Minsk II. Après un calme relatif lié à la présence d’Alexander Hug (chef adjoint de la MSS de l’OSCE) en RPD, l’armée ukrainienne a repris ses mauvaises habitudes et violé le cessez-le-feu en RPD à 12 reprises ces dernières 24 h.

L’incendie commence à prendre, et ceux qui sont supposés être les pompiers regardent ailleurs et feignent de croire qu’il n’y a pas de problème. Ce n’est pas lorsque l’incendie ravagera le continent européen tout entier qu’il faudra pousser des cris d’orfraie et appeler à résoudre pacifiquement le conflit.

Il sera trop tard pour cela, et il serait bon que les populations européennes comprennent que leurs gouvernements respectifs les emmènent joyeusement à l’abattoir pour satisfaire les intérêts géopolitiques d’un pays (les États-Unis) qui est à des milliers de kilomètres, et qui tel Ponce Pilate, se lavera les mains de l’enfer dans lequel il aura plongé les populations du continent européen.

Christelle Néant pour DoniPress

Pour allez plus loin, je vous conseille de lire ces articles (d’archives) du Monde Diplomatique que l’on ne peut accuser d’être “conspirationniste”. Pour savoir et comprendre que, rien n’est du au hasard..

Pour favoriser l’obéissance Effacer le passé ? Par John Berger

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Fallait-il collaborer avec le IIIe Reich ?Comment les nationalistes ukrainiens réécrivent l’histoire par Jean Marie Chauvier

Dans les pays postcommunistes, l’histoire – et notamment celle de la seconde guerre mondiale – représente un enjeu majeur de la bataille d’idées. Car les forces nationalistes, qui y constituent un des piliers des nouveaux régimes, s’efforcent de justifier, au nom de l’hostilité à l’Union soviétique, leur collaboration avec l’occupant nazi et son entreprise génocidaire. Ainsi en Ukraine…/…

Et aussi

Ukraine, jeux de miroirs pour héros troubles par Laurent Geslin & Sébastien Gobert (12/2016)

De la Baltique à l’Ukraine Quand l’Allemagne manipulait les nationalismes… par Francis Arzalier

En Ukraine, les ultras du nationalisme par Emmanuel Dreyfus  (2014)

Les extrêmes droites gagnent du terrain en Europe, même si nombre d’entre elles cherchent à se parer d’habits neufs (lire « Extrêmes droites mutantes en Europe » et « Le Front national sur un plateau »). De toute évidence, de tels mouvements jouent un rôle en Ukraine. Svoboda ou, plus radical encore, Praviy Sektor espèrent profiter de la révolte populaire contre le système corrompu du président Viktor Ianoukovitch…/….

Il y en a bien d’autres….

 

 

Volti

2 Commentaires

  1. Ben le réveil va être brutal.

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