Danielle Mitterrand : “La démocratie n’existe ni aux USA, ni en France”.

Le site Lescrises.fr a eu la bonne idée de ressortir des cartons une interview de 2011 de l’ex-première dame de France. Durant cet entretien, les mots sont clairs, précis, et il n’est vraiment pas garanti que ceux-ci soient assumés par les socialistes au pouvoir.

La seule chose qui puisse réellement être dite, c’est qu’elle ne fait que confirmer ce que nous savions déjà, en expliquant certains rouages de la machine infernale…

Hernando Calvo Ospina est un journaliste colombien réfugié en France et collaborateur, Danielle_Mitterrand_1991entre autres, du Monde Diplomatique.

Sa présence dans un avion régulier d’Air-France en avril 2009 effraya à ce point les USA qu’ils lui interdirent le survol de leur territoire et exigèrent son déroutage. Voir : http://www.legrandsoir.info/article8459.html

Hernando Calvo Ospina a bien voulu nous confier le texte d’un entretien qu’il a eu avec Danielle Mitterrand. Qu’il en soit remercié.

Ce qui suit est un extrait de l’entrevue à Mme. Danielle Mitterrand, veuve de l’ex-président français Franço05s Mitterrand, et présidente de l’association « France-Libertés ». A sa lecture il est facile de comprendre pourquoi, et ce depuis plusieurs années, les médias politiques et d’informations dans leur grande majorité ont essayé de l’ignorer.

vendredi 28 octobre 2005 – Entretien réalisé par Hernando Calvo Ospina.

Hernando Calvo Ospina : Mme. Mitterrand, qu’a signifié pour vous l’arrivée au gouvernement de votre époux François ? Est-ce que les idéaux sociaux et politiques qu’il portait dès sa jeunesse ont été reconnus en ces moments-là  ?

Danielle Mitterrand  : Mai 1981 fut un mois de grande activité, car c’était la préparation de l’arrivée au pouvoir de François. J’essayais d’apporter tout ce qu’il y a de meilleur en moi, pour que ces rêves d’avoir une société socialiste, quoique à l’européenne, deviennent réalité.

Mais bien vite j’ai commencé à voir que cette France juste et équitable ne pouvait pas s’établir. Alors je lui demandais à François : Pourquoi maintenant que tu en as le pouvoir ne fais-tu pas ce que tu avais offert ? Il m’a répondu : “Je n’ai pas le pouvoir d’affronter la Banque mondiale, le capitalisme, le néolibéralisme…. J’ai gagné un gouvernement mais je n’ai pas le pouvoir !

J’appris ainsi que d’être le gouvernement, être président, ne sert pas à grand-chose dans ces sociétés sujettes, soumises au capitalisme. J’ai vécu l’expérience directement durant 14 ans. Même s’il essayait d’éviter le côté le plus négatif du capitalisme, les rêves ont commencé à se briser très rapidement.

HCO : Vous n’avez pas assumé le rôle de « première dame » comme l’« exige » la tradition protocolaire. Était-ce un simple caprice ? Ou à cause de convictions politiques ?

DM : Je n’ai pas voulu être une « première dame » comme toutes les autres, et en conséquence j’ai refusé le protocole qu’on a voulu m’imposer. J’étais l’épouse du chef de l’État, d’un homme que j’aimais, mais j’étais aussi libre d’avoir mes propres convictions. Je n’allais pas accepter d’être la simple image de la femme française typique, représentative d’un secteur social ; de sourire devant les caméras et les personnalités ; ou de servir d’ornement aux oeuvres de bénéfices. Avant tout, mon rôle devait consister en mon apport pour la construction d’une société juste.

J’ai eu mes critères et mes réflexions politiques, qui ont parfois fait choc avec celles de François. Si le gouvernement n’allait pas sur une bonne voie, je me devais de le dire, de le critiquer. Je sais que ce n’est pas le rôle d’une « première dame », car normalement elles ne sont qu’un instrument du pouvoir. Chaque fois que les autres ont voulu s’opposer à mes tâches militantes pour des « raisons d’État », pour n’être pas « diplomatiquement correctes », François m’a soutenue car il voyait qu’elles étaient justes. Il ne pouvait essayer de m’empêcher de faire ce qu’il disait défendre.

HCO : Mme. Mitterrand, vous avez fondé « France-Libertés », qui s’est distinguée par son engagement politique, social et humanitaire…

DM : Je l’ai fondée non pas dans l’intention d’en faire un contre-pouvoir, ni pour qu’elle serve au pouvoir. Je voulais prendre mes propres initiatives de solidarité politique, indépendantes des desseins du pouvoir, même si je m’attendais qu’avec le gouvernement socialiste nous aurions des objectifs proches. Mais je me suis vite rendu compte que ce ne serait pas facile. Est arrivé le moment où « France-Libertés » voulait aider des populations opprimées, mais le gouvernement socialiste français soutenait d’une manière ou d’une autre leurs bourreaux. Rapidement j’ai dû me poser la question : Jusqu’où peut-on aller sans provoquer d’ « incidents diplomatiques » ?

Dans l’Association s’est présenté pour nous un questionnement qui ne m’a pas du tout plu : sa présidente, épouse du président de la République, devait-elle respecter la sacro-sainte loi de non-ingérence dans les affaires de l’État, et se priver ainsi de son droit à la solidarité politique et humanitaire, pour ne pas aller à contre-courant ? J’ai continué avec mon projet car je le croyais juste. Alors, même de vieux amis personnels et de lutte ont commencé à m’isoler. Tout le pouvoir et le poids de la diplomatie française ont tenté de m’écraser, usant de tout pour « réparer » mes actions et mes expressions politiques publiques.

J’ai constaté que je ne pouvais pas exercer ma fonction de manière exemplaire si je ne servais pas le marché, le capitalisme. Que mon devoir n’était pas de me préoccuper des torturés ni des affamés. Que si ceux qui étaient écrasés réclamaient l’éducation, la santé ou du travail, je devais tourner la tête de l’autre côté. J’étais la « première dame » et je devais aider, avec mes sourires dans les cocktails, à ce que les intérêts commerciaux de la France progressent. Quand j’écoutais au cours de mes visites aux ambassades les discours du « commercialement correct », où le tout-puissant marché était ce qu’il y avait de fondamental avant la solidarité entre les peuples, cela me donnait l’envie de partir en courant. Je ne pouvais croire que les « bulldozers » du marché pourraient arriver à recouvrir jusqu’aux fondements mêmes de notre culture. Et ils l’ont fait.

Pourquoi un gouvernement qui se disait de gauche ne pouvait-il pas répondre aux attentes qu’il avait créées durant tant d’années dans l’opposition, tant au niveau national qu’international ? Devait-on accepter les impératifs d’un système mercantile jusqu’à la soumission ?

HCO : Ce système du marché sauvage, du capitalisme, du néolibéralisme, a à sa tête les États-Unis. Est-ce que la France se soumettait aux desseins de ce pays ?

DM : Durant la célébration du Bicentenaire de la Déclaration des droits de l’Homme – juillet 1989 – j’ai pu voir jusqu’à quel point nous étions soumis aux État-Unis. L’État français n’invita pas plusieurs dignitaires, en particulier des Latino-Américains. Comme par hasard c’était ces pays-là que Washington voulait annuler, détruire. Et je ne vais pas citer de noms, mais c’est facile à vérifier. Je me rappelle avoir dit à François : « Jusqu’à quel point allons-nous être dépendants de l’humeur des États-Unis, ne pas pouvoir choisir nos invités pour nos festivités… ? » Ce fut une honte.

HCO : Mme. Mitterrand, si cela arrive en France, vous devez bien savoir ce qu’il en est sous d’autres latitudes…

DM : Je ne suis pas anti-États-Unis, mais je suis avec le peuple de ce pays et non pas avec l’Administration qui le gouverne. Celle qui se sert de ce peuple pour tirer des bénéfices qui servent à quelques uns. Durant toutes ces années de ma vie, spécialement après la Seconde Guerre mondiale, j’ai pu voir comment les États-Unis foulaient aux pieds la liberté et la démocratie des autres pays, particulièrement les pauvres. Ronald Reagan désigna comme terroriste le gouvernement sandiniste du Nicaragua, quand les terroristes, c’était son Administration et cette « contra » qu’il finançait.

J’étais au Nicaragua peu de temps avant qu’ils détruisent la révolution. Fonctionnait encore ce qui avait été atteint au niveau de l’éducation et de la santé, des choses qu’avait le peuple nicaraguayen pour la première fois de son histoire. Je me rappelle que Daniel Ortega me disait : « Daniella, dis à François qu’il ne peut pas nous laisser tomber ; que l’Europe démocratique ne peut pas nous abandonner… ». Je le lui ai dit en effet. Et il n’a pu rien faire : les États-Unis avaient décidé que les sandinistes devaient s’en aller avec leurs plans de développement social, pour faire place au néolibéralisme et au retour de la misère pour le peuple.

Hernando Calvo Ospina.

http://hcalvospina.free.fr/spip.php?article119

(Traduit par Abacar Fall)

Source : Le Grand Soir, Hernando Calvo Ospina, 22-11-2011

Source et fin sur Lescrises.fr

 

Benji

9 Commentaires

  1. La démocratie je l’ai vue a l’œuvre pendant les élections législatives de 1981…..
    J’ai déchiré ma carte d’électeur.

  2. https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_scratch.gif “Je le lui ai dit en effet. Et il n’a pu rien faire”; …on aurait bien aimé savoir quelles étaient leurs méthodes de pression pour ça, qu’est-ce qu’ils utilisaient (et utilisent certainement toujours) au juste !
    https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_unsure.gif
    A mon avis aujourd’hui ils ne doivent plus avoir à se fouler grandement pour ça, vu le niveau de soumission de nos pourritiques actuels ! https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_negative.gif

  3. Pauvre fille.
    C’est ELLE qui dis que son époux est incapable d’influencer la politique de ce Pays,bonne chance à l’autre utopiste ASSELINEAU..
    https://lesmoutonsenrages.fr/wp-content/plugins/wp-monalisa/icons/wpml_cool.gif

  4. Bonsoir,
    Pas besoin de regarder très haut, il suffit de regarder dans les petites mairies.
    Par exemple à la mairie de Malissard dans la Drôme, c’est le “maire” et ses adjoints qui dirigent.La mairie est à eux.Les conseillers municipaux sont considérés comme des pom-pom girls
    Maintenant, on peut acheter des chemins “entre deux” sur lequel tout le monde pouvait passer et qui dessert plusieurs maisons.Un habitant peut enclaver des maisons, construire des murs, clôturer une parcelle même pas bornée.De toute façon, on fera la déclaration de travaux après et puis c’est cela ne concerne pas la mairie. C’est du droit privée, paraît-il!

    Finalement, c’est comme au temps du Far West!

    On se demande bien pourquoi on dépense des fortunes à faire des règlements, POS ou PLU.

  5. Il est quand même fantastique que personne ne s’aperçoive que cet article est un enfumage de première.
    Faire croire que Mitterrand ne s’est aperçu du fait que tout était aux mains de l’oligarchie qu’en 1981 s’appelle du foutage de gueule.
    Le 10 novembre 1946, François Mitterrand devient député de la Nièvre.
    Ayant été décoré de l’ordre de la francisque sous Pétain, il le savait très bien et a agit comme les autres depuis tout ce temps pour tirer profit du système.

    Il a été nommé onze fois ministre de 1947 à 1957 : ministre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre dans les gouvernements Ramadier puis Schuman, de 1947 à 1948 ; secrétaire d’État à la Présidence du Conseil chargé de l’information dans les gouvernements Marie, Schuman et Queuille, de 1948 à 1949 ; ministre de la France d’Outre-Mer ensuite ministre d’État des gouvernements Pleven, Queuille et Faure, de 1950 à 1952 ; ministre délégué au Conseil de l’Europe du gouvernement Laniel, de 1952 à 1953 ; ministre de l’Intérieur du gouvernement Mendès France, de 1954 à 1955 ; enfin ministre d’État de la Justice sous Guy Mollet jusqu’en juin 1957.

    Alors que l’on ne se foute pas de la gueule du peuple.

    • J’avais oublié un détail.

      Dès la fin de la guerre, adhérent au Mouvement européen, il s’est déclaré favorable à la construction européenne et fait voter tous les grands traités en ce sens.
      Pourquoi a t’il été autorisé à devenir président de la France? Par hasard?
      Il faut arrêter de rêver, il a fait allégeance au système.
      PS: Comme dit plus haut ne pas oublier un certain Schuman……

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