Espagne: 9300€ pour griller la liste d’attente à l’hôpital

LE CHIFFRE DU JOUR: 9300 euros. C’est la somme versée par une sexagénaire à un hôpital catalan pour éviter la longue liste d’attente qui retardait son opération. L’illustration d’un système de santé espagnol à double vitesse qui se généralise.

C’est une histoire assez ahurissante que relate aujourd’hui la presse espagnole. Celle d’une femme, Isabel Navarro, qui s’est acquittée d’une facture de 9300 euros pour passer outre le long délai d’attente qui l’éloignait de son opération à la hanche. Une intervention pourtant réalisée dans un hôpital public.

Vous êtes pressés? Payez!

Son cas n’est semble-t-il pas isolé. En Catalogne, sur les quelques 60 hôpitaux financés presque intégralement par la Generalitat (des fonds publics, donc), plus de 50 ont opté pour la mise en place d’un double parcours, privé-public, au sein de leur établissement. Objectif: renflouer leurs caisses vidées par les coupes budgétaires publiques. 

C’est le cas de l’hôpital du Vendrell, dans la province de Tarragone. Pour certaines opérations, telles que l’implantation d’une prothèse de hanche, l’attente dépasse largement le délai maximum officiel de 6 mois. Mais il y a une solution: passer, moyennant finance, par le parcours « privé ».

Mêmes équipes -médecins, infirmiers-, mêmes locaux, seuls les tarifs diffèrent. Isabel Navarro a ainsi déboursé plus de 9000 euros (dont 3000 euros d’honoraires et 2800 euros pour la prothèse) pour mettre fin, sans plus de délai, à des souffrances qui devenaient insupportables.

« Je n’en pouvais plus »

Je n’en pouvais plus, parfois, je n’étais pas capable de sortir de mon lit, alors que j’ai toujours été très active: j’aime marcher, faire du vélo…. »,

raconte la sexagénaire au quotidien El País. Dans le même temps, les délais donnés par l’hôpital public s’allongent: « Au début ils nous ont dit que la liste d’attente était d’un an, puis, de 14 mois. Chaque fois la date de l’opération s’éloignait davantage… » rapporte sa fille. C’est elle qui a contacté l’établissement de santé, pour voir s’il était possible, comme elle l’avait entendu dire, de passer outre ces délais en payant.

Ils nous ont donné un budget, nous avons réuni les économies de mes frères et sœurs et de ma mère, et en un mois, elle a été opérée ».

L’intervention -un succès- a finalement eu lieu fin décembre. Soit cinq mois après l’inscription d’Isabel Navarro sur la liste d’attente « publique », mais bien avant la date prévue si elle était restée dans le circuit public.

« J’ai payé toute ma vie »

J’ai payé toute ma vie pour la sécurité sociale, et quand j’ai eu un problème, on n’a pas pu me prendre en charge correctement »,

regrette, amère, Isabel, dans les colonnes du quotidien espagnol. « J’ai eu de la chance, mais je pense à toutes les personnes qui ne peuvent pas payer et qui souffrent ».

Pour sa défense, la direction de l’hôpital affirme que l’intervention s’est faite via un circuit différent, autonome, et qu’aucune intervention publique n’a été retardée pour opérer Mme Navarro. Elle a également mis en doute le témoignage de la famille, en avançant que le temps d’attente moyen pour une opération de ce type était de 7,3 mois en 2013.

Privé-public, mélange des genres

La pratique est-elle légale? Oui et non, selon le département de santé de la Generalitat. Un hôpital financé par des fonds publics a le droit de réaliser une activité de type privée. Pour autant, il est illégal qu’un patient qui entre dans l’établissement par le parcours de soin public, soit finalement opéré dans le même centre, via le parcours privé…Si Isabel Navarro dépose une réclamation, la Generalitat catalane a déclaré qu’elle étudierait les éventuelles irrégularités.

Les listes d’attente sont un instrument pour pousser les patients à aller vers le secteur privé »,

dénonce Angels Castells, porte-parole d’une plateforme de défense de la santé publique. Pour Carme Borrell, docteur en Santé Publique et membre d’un centre d’investigation en épidémiologie et de santé publique, « les médecins qui exercent dans le secteur public peuvent être en situation de conflits d’intérêts s’ils facturent aussi dans le privé (…) Les établissements publics ne devraient pas réaliser de soins privés », conclut-elle.

Source: MyPressEurop.info via les Brindherbes

Benji

12 Commentaires

  1. Comment elle est magnifique leur €urope du fric des multinationales, du fric et du cartel de banque,

  2. Ca confirme bien que la politique “économique et sociale” dont nous parlent en permanence nos dirigeants, n’existe pas, c’est un peu comme quand ils nous perlent de démocratie, de liberté d’expression ou de transparence.
    Dans notre exemple, la politique est clairement économique et va logiquement à l’inverse d’une politique sociale.
    Devoir payer pour être soigné, c’est une démarche économique, pas sociale.

  3. À ce rythme la ce n’est plus “marche ou crève” mais “paye ou crève” que ce sois pour les soins, boire, manger et respirer

    Monde tristounnet :'(

  4. Pour se faire incinérer ou enterrer il y a aussi une liste d’attente ?

    • Une ville du sud-est (je crois Bormes les mimosas ou Le Lavandou) a déposé un arrêté interdisant de se faire enterré car la ville n’a plus de place pour les morts.
      Alors liste d’attente pour brûler… Ca risque d’arriver, en attendant, on peut toujours garder nos morts chez soi, façon Ravage de Barjavel.

      • Hahaha,mourir est dangereux pour les cimetières..
        Merci Zugzwang

        • Autant pour moi, c’est pas l’interdiction de se faire enterrer, c’est une interdiction de mourir !

          Le lien de l’article ici :

          http://www.liberation.fr/societe/2000/09/21/interdit-de-mourir-au-lavandou_337931

          Je cite :
          “Il est interdit à toute personne ne disposant pas de caveau de décéder sur le territoire de la commune.”

          • J’ai lus un article ou les fœtus servaient d’appoint au chauffage,(en Angleterre)
            Les vieux,les mourants,les malades sans ressources aussi bientôt?,ce qui solutionnerais le PB des cimetières tout en ne dépendant plus du gaz de Poutine…
            Bien sur on pourrais augmenter la date à la combustion constructive par des amendes impayées etc etc..

            • T’as pas d’ami ? Prends un Curly !
              T’as pas d’énergie ? Prends un vieux ! … Ou un Poutine (ca marche aussi)

              Ce qui fait peur, c’est pas tellement qu’on mette en place des textes à la c.n du genre “interdit de mourir” mais c’est surtout qu’il y a des gens qui cherchent à les appliquer.

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