Lobbying, dérives et pressions de l’américain Merck

Un labo pharmaceutique capable de tout pour faire toujours plus d’argent, quelle surprise!!! C’est aussi pour cela qu’il faut actuellement se tourner vers les méthodes naturelles pour soigner certains maux, car nous ne pouvons savoir exactement quels secrets se cachent derrière ces médicaments-miracles qu’ils veulent absolument nous vendre…

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Un médicament contre l’hépatite C a été mis sur le marché en minimisant ses effets indésirables.

Experts de l’agence du médicament payés par le labo, lobbying agressif, publicité mensongère… L’histoire du Victrelis est un concentré des dérives de l’industrie pharmaceutique. Libération, qui a eu accès à des documents confidentiels, lève le voile sur les pratiques douteuses du labo américain Merck et sur la compréhension des autorités à son égard. Résultat : malgré ses effets secondaires sévères, le Victrelis a été autorisé pour des malades qui n’en avaient pas besoin.

Tout commence début 2010. Merck teste un nouveau médicament contre l’hépatite C, maladie qui tue 3 500 personnes par an en France. La bithérapie guérit alors moins de 40% des malades (1). En y ajoutant le Victrelis (trithérapie), ça monte jusqu’à 66%. Un vrai progrès. Mais il convient d’être prudent : les essais sur l’homme ne sont pas tous finis, et la thérapie, qui peut durer près d’un an, provoque des effets secondaires très sévères (dépression, anémie, nausées…). Comme l’expliquent les patients, «Le traitement vous rend malade, mais vous avez une chance de guérir».

Mais Merck est pressé. Le 12 avril 2010, une délégation débarque à l’Agence française du médicament (2) pour demander une autorisation temporaire d’utilisation (ATU). Autour de la table, il y a Lawrence Serfaty, hépatologue à l’hôpital parisien Saint-Antoine et expert de l’agence pour les hépatites. Or, il a signé, six mois plus tôt, un juteux contrat de consultant avec Merck sur… le Victrelis ! Montant : 33 200 euros plus les frais. De surcroît, le Dr Serfaty n’a pas déclaré ce contrat précis à l’agence, se disant seulement consultant pour le labo depuis 2007. Joint par Libération, il indique avoir été «transparent» et ne pas s’être occupé de l’ATU, à l’exception d’une réunion, qu’il a quittée pour cause de conflits d’intérêts.

Pourtant, un document de Merck mentionne qu’il a joué un rôle dans l’évaluation du Victrelis. Si tel était le cas, le labo risque de violer la loi américaine anticorruption. En interne, c’est l’alerte. D’autant qu’il est prévu de verser 73 407 euros à Serfaty en 2011, l’équivalent de son salaire à l’hôpital. Le 2 décembre, une réunion de crise se tient autour du patron de Merck France, Guy Eiferman. Il appelle Serfaty et estime que tout est réglé : le médecin lui a dit qu’il n’«était plus» expert à l’agence «sur les dossiers nous touchant de près». Le 13 décembre, le Victrelis obtient son autorisation temporaire. Un mois plus tard, la première commande tombe. Elle émane du Dr Serfaty. Il a démissionné de l’agence en avril 2011 à cause de ses liens d’intérêts.

Evaluation. Merck doit maintenant décrocher une autorisation définitive auprès de l’Agence européenne du médicament (EMA). Fin 2010, elle confie l’évaluation à la France et aux Pays-Bas. L’agence tricolore désigne un expert pour l’aider : Dominique Guyader, hépatologue au CHU de Rennes. Un choix très discutable, puisqu’il a, lui aussi, des conflits d’intérêts. En janvier 2001, Merck a versé 13 880 euros à son association de recherche, pour un essai clinique sur… le Victrelis ! Le Pr Guyader a aussi été rémunéré par le labo pour une intervention et un compte rendu de congrès.

Joint par Libération, il dit que ses conflits d’intérêts étaient «mineurs», et qu’il a travaillé en toute indépendance. Si son évaluation ne s’étend guère sur les effets secondaires du Victrelis, il souligne en effet son manque d’efficacité sur certains patients, pour lesquels il déconseille le traitement. Au final, le rapport de l’agence française, que Guyader n’a pas rédigé, est favorable à la mise sur le marché.

Mais les Pays-Bas estiment au contraire que le médoc n’est pas commercialisable en l’état, malgré le fait qu’il guérit 70% à 80% de patients de plus que la bithérapie. Car le Victrelis n’augmente que très peu les chances de guérison chez certains malades (3). Il ne faut donc pas le leur prescrire, vu la «hausse des effets indésirables». La seconde crainte de l’agence néerlandaise porte justement sur l’explosion des cas d’anémie (baisse des globules rouges), qui touche 49% des patients. Pour compenser, il faut leur donner de l’EPO (le dopant favori des cyclistes), une molécule aux «effets secondaires considérables».

Campagne. Chez Merck, c’est l’alerte rouge. La commercialisation pourrait être retardée. Surtout, le Victrelis pourrait être interdit aux malades pour lesquels il est inefficace. Avec à la clé une réduction du marché, et des millions d’euros de manque à gagner. Insupportable. Le 26 avril, Merck lance une vaste campagne de lobbying : dans tous les pays européens, ordre est donné aux cadres d’aller dézinguer les arguments néerlandais auprès des «leaders d’opinion clés» (les médecins les plus influents) et des «agences de régulation». En juillet 2011, l’agence européenne avalise la position de la France et du labo : le Victrelis est autorisé pour tous les malades, à l’exception des cirrhotiques.

Article complet sur liberation.fr

Autre article, et le même sujet, les mensonges des labos pharmaceutiques dont de Merck, encore… Et cette fois-ci, c’est un qui s’exprime, et il a beaucoup à dire…

Après vingt ans de collaboration, le Dr Dalbergue publie un livre accusateur contre l’industrie pharmaceutique.

C’est un témoignage coup de poing qui va faire mal à l’industrie pharmaceutique, à peine remise des scandales du Mediator ou des pilules contraceptives. Dans un livre qui paraît mercredi, le Dr Bernard Dalbergue, 55 ans, dénonce les «pratiques douteuses» d’une industrie où il a passé deux décennies, dans plusieurs firmes différentes. C’est la première fois en France qu’un ancien cadre dissèque de l’intérieur, documents et histoires vécues à l’appui, la manière dont les labos manipulent les médecins, voire les autorités.

Bernard Dalbergue a longtemps été un bon soldat. Jusqu’à ce qu’il soit «révolté» par ce qu’il a vu chez son dernier employeur, l’américain Merck, qu’il accuse d’avoir «foulé aux pieds l’éthique».«Si je parle aujourd’hui, c’est pour contribuer à réduire les accidents médicamenteux, qui tuent au moins 18 000 personnes par an en France, et pour proposer des pistes de réflexion pour réformer le système», explique Dalbergue. Il se définit comme un «lanceur d’alerte», mais refuse l’étiquette de «repenti».«La majorité des labos sont honnêtes. Et j’ai aimé mon métier.»

«Dorloter». Son job ? Manipuler les médecins. Il décrit une industrie obsédée par «l’argent», servie par une «armée» de salariés «conditionnés» pour faire grimper les ventes, en passant sous silence les effets secondaires. «Nos médicaments n’ont que des qualités, inutile de parler des aspects moins glorieux : il n’y en a pas. […] Voici comment faire pour inciter les médecins à prescrire», écrit-il. En tant que cadre au marketing puis aux affaires médicales, Dalbergue était chargé de «dorloter» les «leaders d’opinions», ces prestigieux médecins hospitaliers capables de faire ou défaire la carrière d’une molécule. C’est-à-dire d’«inventer les moyens les plus tordus pour les acheter en toute discrétion», à coup de déjeuners, d’invitations grand luxe à des congrès, de contrats de consultants ou de participation à des travaux scientifiques. Bref, entretenir les fameux «conflits d’intérêts», que l’on retrouve régulièrement pointés du doigt dans tous les scandales médicamenteux (Vioxx, Mediator, etc.).

A chaque fois, les médecins mis en cause assurent que l’argent n’altère pas leur indépendance. Le témoignage de Bernard Dalbergue met à mal cette ligne de défense. «Très peu de médecins m’ont résisté. A force de travailler main dans la main avec nous, ils perdent leur objectivité, même si la grande majorité ne s’en rend pas compte.»

Il raconte dans son livre comment il a convaincu un grand professeur de censurer son discours à un congrès, en y retirant un passage sur les effets secondaires d’une molécule. Il y a aussi l’histoire de cette délégation de mandarins venue bouder ostensiblement face au patron de son labo, pour protester contre la baisse de leurs financements – la firme les a immédiatement rétablis. Ou encore la manière dont Dalbergue a, avec l’aval de l’Etat, activé ses réseaux de médecins pour minimiser les dérives liées au Subutex (trafic, prise par injection…), un produit de substitution à l’héroïne.

Bref, le Dr Dalbergue est devenu, au fil des ans, «un sacré roi de l’embrouille».«Ces pratiques d’influence sont moralement discutables et coûtent cher à la Sécu, mais elles sont autorisées par la loi, précise-t-il. Et elles n’ont pas de conséquences sanitaires tant que les molécules dangereuses ne sont pas commercialisées ou maintenues sur le marché.»

Il écrit que tout a basculé lorsqu’il a eu la conviction que son dernier employeur avait franchi la ligne rouge. D’abord en «mettant en danger les patients» avec le Viraferonpeg, traitement de l’hépatite C.

Suite et fin sur Libération

 

Benji

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