“On est des précaires recrutés pour accompagner des chômeurs”

L’emploi est de plus en plus précaire en France, entre les plans sociaux qui vont en s’accélérant et le manque d’emplois en général, la situation devient hautement critique. Les situation décrites dans l’article ci-dessous est ubuesque, et ce qui suit l’article est encore pire!

Une agence Pôle emploi de Dijon, le 29 février 2009.

Le marché du placement privé de chômeurs est-il en train de dérailler ? Certains jours, Laurent (tous les prénoms ont été modifiés), conseiller d’insertion professionnelle en région parisienne, n’est pas loin de le penser. “Je suis écœuré, ça atteint du jamais-vu”, lâche-t-il, après être passé par de nombreuses entreprises du secteur. Son employeur actuel, le cabinet Initiative, lui demande parfois de recevoir au même moment dans deux villes différentes d’Ile-de-France, d’éponger lui-même son bureau dans lequel l’eau s’est infiltrée après les nuits de pluie, ou de réparer l’électricité. D’autres employés ont dû payer de leur poche les factures de téléphone ou monter eux-mêmes les meubles.

Entre toutes ces tâches, Laurent tente de faire son job : remotiver des chômeurs éloignés de l’emploi et, si possible, leur retrouver un travail. “Sauf qu’avec 100 demandeurs d’emploi à suivre et 35 heures dans une semaine, je ne vois pas comment je peux leur proposer un rendez-vous d’une heure chacun.” Tout cela en contrat de professionnalisation, pour à peine plus de 1 800 euros brut par mois, un salaire parmi les plus bas du secteur.

“ENTRETIENS DANS DES APPARTEMENTS”

L’histoire d’Initiative se confond avec celle de beaucoup d’autres opérateurs privés de placement (OPP), le nom donné à ces entreprises qui font du placement des chômeurs un business. Basée à Gap (Hautes-Alpes), cette petite entreprise remporte en février un gros marché de Pôle emploi en Ile-de-France et doit ouvrir seize agences en trente jours, à près de 700 kilomètres de son siège.

“Nous passions les entretiens dans des appartements”, se souvient une conseillère, qui a été licenciée avant la fin de sa période d’essai. “J’ai été recrutée uniquement par mail, je n’ai jamais passé d’entretien”, assure Marie, également licenciée depuis. Entre les départs volontaires et les licenciements, près de dix personnes, sur la trentaine recrutée en février, ont quitté l’entreprise, estiment les salariés interrogés par Le Monde – Franz Rubichon, le gérant d’Initiative, ayant refusé de répondre sur ce point.

Le partenaire d’Initiative pour ce nouveau marché, l’école de commerce niçoise Esccom, a jeté l’éponge juste après avoir commencé les prestations. “Il y avait un vrai décalage entre le cahier des charges et le fonctionnement de terrain”, répond, par mail, Jean-Pierre Buccino, son responsable de la formation continue. Sans compter, ajoute-t-il, “une certitude côté charges fixes et une incertitude côté recettes”, la rémunération de l’entreprise étant dépendante des flux de chômeurs envoyés par Pôle emploi. Après ce départ, Pôle emploi envoie son directeur qualité contrôler certains sites parisiens. “Il était effaré par nos conditions de travail. Il s’est étonné qu’on puisse être payé aussi peu”, affirme Marie. Mais rien n’a changé.

“Nous sommes parfaitement en mesure de répondre aux demandes de Pôle emploi”, défend pourtant le gérant d’Initiative, qui admet tout juste “avoir pris du retard en Ile-de-France en raison de la difficulté de trouver et d’aménager des locaux satisfaisants”. Il réfute que les contrats de professionnalisation lui permettent de bénéficier de larges exonérations de cotisations sociales: “Nous les utilisons parce qu’ils permettent de financer des formations bien plus lourdes que pour des contrats classiques.”

Pourtant, Pôle emploi impose à tous les prestataires que les conseillers recrutés aient trois ans d’expérience… La direction de Pôle emploi affirme de son côté n’avoir pour l’instant aucune critique à adresser à Initiative. “Nous ne vérifions pas la nature des contrats de travail, ils peuvent très bien recruter en contrat de professionnalisation”, explique-t-on. Face au départ d’Esccom, remplacé depuis par un sous-traitant, Pôle emploi avoue également son impuissance.

“LES PRIX ONT BAISSÉ DE PLUS DE 50 % DEPUIS 2005″

“Le cas Initiative est symptomatique d’un marché qui devient un véritable Far West”, s’inquiètent Benoît Bermond et Olivier Febvre, représentants de l’Union régionale francilienne des organismes de formations (UROF), qui regroupe surtout les acteurs associatifs du marché. “Les prix ne cessent de baisser, estiment-ils. Des entreprises apparaissent sur le marché, remportent des appels d’offres, passent de 30 à 300 personnes, entrent en Bourse et finissent en liquidation. Tout cela en quelques années.”

Deux grosses entreprises du secteur, CLAF et Assofac, sont actuellement placées en redressement judiciaire. “Les prix ont baissé de plus de 50 % depuis 2005. Il y un incroyable dumping social”, assure de son côté Estelle Sauvat, directrice de Sodie, un gros cabinet qui a perdu bon nombre des derniers appels. Impossible de savoir combien a proposé Initiative pour remporter celui d’Ile-de-France. “Ces données sont confidentielles, mais nous éliminons systématiquement les offres anormalement basses”, assure simplement la direction de Pôle emploi.

Sic…
Source et article complet: Le monde via Realinfos

 

Le souci n’est pas nouveau, un livre existe sur le sujet, une petite mise en bouche est possible bien sur avec l’interview de son auteure Fabienne Brutus. Vous pensiez que cela n’allait pas dans ce pays, mais êtes-vous prêts à entendre la vérité? Par exemple, on fait baisser les statistiques quand au nombre de chômeurs d’une manière simple, en comptabilisant ceux de 1ère catégorie uniquement, sachant qu’il y a 8 catégories, et c’est sans compter sur ceux qui ne font même plus partie du système. Les 10% environ de chômeurs parmi les actifs de ce pays ne sont pas loin des 20% en fait, et pas besoin de reprocher cela à un gouvernement en particulier, c’est la succession de ceux-ci ainsi que leur complicité qui a mené à un seuil aussi critique. Autre fait dénoncé, celui qui décroche un contrat en CDI d’une heure/semaine reste un demandeur d’emploi, travailler 4 heures/mois ne fait pas un travail, hors le bénéficiaire de ce CDI ne sera plus compté comme chômeur dans les statistiques. Ceci n’étant que deux des points énoncés et dénoncés dans la vidéo, je vous laisse découvrir les autres, de la folie pure cachée à un public “moutonisé” et donc peu informé de la réalité qui se cache derrière le voile de fumée.


Au passage, un grand merci à Blueman pour son travail exceptionnel en nous proposant ses “vidéos remarquables” qui reste une base de donnée fantastique au niveau infos. Vous pouvez trouver les références et la présentation du livre de Fabienne Brutus sur cette page.

 

Benji

9 Commentaires

  1. C’est étonnant que nos chères grandes entreprises qui fabriques des chômeurs à tour de bras n’aient pas encore la main mise sur le marché de la recherche d’emploi.

    David.

  2. Ils en parlent aussi ici, ce sont des conférences/spectacles de gens “normaux” qui raconte leur quotidien, plus ou moins de bonne qualité pour le son selon la vidéo mais en faisant un petit effort cela vaut vraiment le coup 🙂

    http://www.scoplepave.org/pole-emploi

    Le site est un peu fouillis mais il y a des perles à regarder (désintoxication à la langue de bois, pollution de l’eau, auxiliaire de vie scolaire, critique des médias etc.) toujours très instructif et selon l’intervenant cela peut-être très amusant aussi.

  3. Merci Fabienne. Cette femme est un bel exemple à suivre !

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