La police gaze des enfants et saccage un camp de roms

Ce qui choque peut-être le plus, c’est de savoir que les policiers français ont reçu des instructions pour ne pas intervenir dans les quartiers sensibles pour ne pas déclencher d’émeutes. C’est tellement plus facile de s’attaquer à des roms… Je signale que cet article m’a été soumis à plusieurs reprises par des internautes mais que j’ai hésité à le mettre ici, qu’ils ne s’offusquent pas du temps pris pour cela, merci.

Mardi 8 janvier, plusieurs dizaines de policiers procèdent à une descente dans l’un des plus grands squats de Roms de l’agglomération lyonnaise à Saint-Fons. Tout y est : tenues anti-émeute, casques, boucliers, flash-balls, grenades lacrymogène, tasers, chiens d’attaque. Pendant une heure, ils vont asperger de lacrymogène les habitants et saccager le bidonville.

    Un peu plus tôt dans l’après-midi, selon certains Roms, des enfants auraient jeté des cailloux sur une voiture de police qui s’était introduite sur le parking du terrain privé qu’ils occupent. Voici donc nos braves policiers en tenue de guerre bien décidés à en découdre avec les enfants.

    Les policiers commencent par se retrouver au beau milieu d’un anniversaire. Une petite fille fête ses 3 ans et de nombreux enfants sont autour d’une table et d’un grand gâteau. Ils dansent au son de la musique tzigane, vêtus de leurs plus beaux habits. Estimant probablement qu’il s’agit là d’un rituel Rom dangereux et inconnu, les policiers donnent des coups de pied dans la table et balayent tout ce qui se trouve dessus : bouteilles de soda, gâteau, tout y passe. L’anniversaire, c’est comme le changement, ce n’est pas pour maintenant.

    Un bébé aspergé d’eau

    Les policiers ordonnent ensuite à toutes les personnes présentes de rentrer dans leurs cabanes et commencent à y pénétrer une à une. Il s’ensuit de véritables scènes de guerre. « Même dans les films, on n’a jamais vu ça », souligne un habitant. Marinella est couchée avec ses enfants lorsque deux policiers casqués rentrent dans sa maison. L’un d’entre eux tient dans sa main un bouclier et dans l’autre une bouteille de gaz lacrymogène qu’il vide en aspergeant l’ensemble de la pièce. La maman va se précipiter sur un linge pour couvrir ses enfants. Elle suffoque, ses enfants, eux, étouffent, impossible de respirer et de rester là. Elle se précipite dehors avec eux. Les policiers sont déjà passés à la cabane suivante.

    Roberto, 12 ans, raconte : « Un policier est arrivé avec un fusil et une lumière sur le fusil. Il a dit : on va revenir vous casser les couilles tous les soirs. En partant, un autre a mis du gaz avec une bouteille blanche. Ça piquait beaucoup la gorge et les yeux, avec mes frères et sœurs on est tous partis dehors, il y avait plein de policiers en noir avec des casques et des boucliers et aussi des chiens. »

    Claudia a 18 ans. Elle tient son bébé de 18 mois dans les bras quand un policier arrive vers elle et l’apostrophe violemment : « Il est où celui qui a jeté des pierres sur la voiture ? » Comme tous les habitants, Claudia n’est absolument pas au courant de ce qui s’est passé quelques heures auparavant. Elle jure qu’elle n’en sait rien. La suite est incroyable : « le policier a pris un bidon rempli d’eau et il l’a jeté sur moi et mon bébé en m’insultant. J’étais toute mouillée ».

    Gazés et bloqués chez eux

    Le comportement de la police rappelle ensuite des moments biens sombres de notre histoire. Sandu est seul dans sa cabane. « J’étais en train de me laver. Un policer est rentré, quand il m’a vu, il a lancé du gaz lacrymogène à hauteur de mon visage et il a refermé la porte. Quand j’ai voulu sortir, je n’ai pas pu. Il bloquait la porte et m’empêchait de sortir. J’ai cru que j’allais mourir. »

    Le terrain de Saint Fons est vaste. Après avoir passé en revue toutes les cabanes, réveillant les personnes qui dorment déjà, insultant celles qui ne dorment pas et gazant une bonne partie d’entre elles, les policiers attaquent l’autre partie du terrain avec une sauvagerie incroyable. Ils se mettent à casser les vitres de toutes les cabanes, méthodiquement, une à une.

    Quand ils arrivent à hauteur d’une voiture, ils cassent la lunette arrière. Sacha, 10 ans, raconte : « il y avait un gros projecteur qui éclairait tout. Il y avait du bruit et j’ai regardé par la fenêtre. J’ai vu un policier tout en noir qui cassait la voiture avec son bâton. Ensuite, des policiers ont regardé par la fenêtre avec une lampe. Je me suis vite caché sous les couvertures avec ma maman, j’avais peur. Un policier qui avait un casque a mis du gaz par la fenêtre. On ne pouvait plus respirer. Ma maman voulait sortir, mais j’avais trop peur. On a attendu qu’ils partent. »

    Les vengeurs casqués continuent à remonter les cabanes. Des portes sont arrachées, des bâches déchirées. Dans un cabane, le repas du soir qui cuit dans un grosse marmite est violemment jeté par terre par un policier. Dans une autre, un homme qui dort est réveillé par le bruit de la porte qu’un policier vient de fracasser : « j’ai ouvert les yeux et un policier avec un casque m’a mis du gaz sur la figure »

    La hiérarchie nie et couvre les policiers

    Bilan de l’opération : plusieurs dizaines de personnes gazées dont des enfants traumatisés, une femme aspergée d’eau, (qu’est ce qu’on rigole dans la police…), des vitres de cabanes cassées et des portes arrachées. Avant de partir, les policiers ne peuvent s’empêcher de s’exciter sur les voitures garées sur le parking et cassent les rétroviseurs de plusieurs d’entre elles.

    Contactée par des journalistes le lendemain de l’opération punitive, la police donne bien évidemment une version toute différente. Selon un communiqué sorti dans la précipitation, « un équipage de police a été victime de jets de projectiles dont un a brisé la lunette arrière du véhicule et atteint le chauffeur ». Soucieux de couvrir immédiatement ses hommes, le commissaire en personne montre à la télévision un véhicule de police dont la vitre arrière est brisée… à deux endroits… Ouaou… Ils sont forts ces roumains. Un projectile, deux impacts. Ils ont inventé le caillou à fragmentation qui se divise en plusieurs parties lors du jet. A moins que ce ne soit un caillou à tête chercheuse qui est rentré dans le véhicule avant d’en ressortir.

    Mais les contradictions de la police ne s’arrêtent pas là. Dans une interview donnée à la télévision, le commissaire affirme que suite à l’agression du caillou à fragmentation et à tête chercheuse, des policiers, confrontés à une « vingtaine, voire une trentaine d’individus hostiles », ont fait usage, « à une reprise du gaz lacrymogène » et « dans la foulée, les équipages se sont repliés et ont terminé leur mission ». Sauf que le communiqué de presse, lui, dit exactement le contraire : « ils ont été dans l’obligation de faire usage du gaz lacrymogène pour les repousser et poursuivre l’opération. » Alors, après le gazage, partis, pas partis les rambos ? Il faudrait que la police accorde ses violons.

    Enfin, le communiqué affirme : « une opération de police a été montée de 18.30 à 19.30 afin d’identifier et d’interpeller les auteurs ». Est-ce que quelqu’un a déjà vu une opération de police sans contrôle d’identité ? Surtout quand il s’agit « d’identifier » des individus. Et bien ce soir là, pas une seule personne sur les 200 que compte le campement n’a été contrôlée. Pas une. Pas une seule interpellation non plus. Mais ce n’était visiblement pas le but.

    Le travail de la police : gazer des enfants ?

    Selon une source policière qui souhaite rester anonyme, il s’agissait de retrouver un lance-missile, pardon un lance-cailloux, un objet qui aurait pu servir à lancer un projectile… En réalité, il s’agissait surtout d’une expédition punitive pour montrer de quel bois se chauffe notre valeureuse police en cette période hivernale.

    Ce n’est pas la première fois que la police gaze des enfants Roms à Lyon. En novembre 2010, déjà, des policiers avaient utilisé des gaz lacrymogènes contre un squat, envoyant plusieurs personnes à l’hôpital. Les policiers avaient nié les faits et expliqué qu’ils avaient gazé un chien. Cette fois-ci, le commissaire, la Direction Départementale de la Sûreté Urbaine et le préfet en personne sont montés au créneau pour couvrir les policiers qui se font justice eux-mêmes. Tous ont répété le même message : la police n’a fait que son travail.

    Non, messieurs, le travail de la police n’est pas de se venger d’un jet de caillou contre une voiture en gazant à bout portant plusieurs dizaines de personnes dont des enfants.

    Non, messieurs, le travail de la police n’est pas de punir des innocents en saccageant des habitats précaires plongeant ainsi dans une misère encore plus grande des dizaines de personnes dont le seul crime est de vivre sur un terrain vague.

    Non, messieurs, les Roms ne sont pas des chiens, que l’on gaze et que l’on chasse à coups de matraque. Ce sont des êtres humains qui ont le droit de vivre dans la dignité comme vous et moi.

    Les dirigeants socialistes et Manuel Valls en particulier portent une très lourde responsabilité dans les dérapages successifs contre la minorité Rom. Depuis l’élection de François Hollande, on assiste à des comportements pire encore que sous Nicolas Sarkozy : des traques jour et nuit, des enfants humiliés et violentés par la police, des bébés en garde à vue. La liste est longue. En continuant à stigmatiser les Roms, en jetant cette population à la vindicte populaire et en couvrant de tels agissements de la part de policiers qui sont censés faire respecter la loi et non la violer, le gouvernement ouvre la porte à des actes beaucoup plus graves. Une vague de racisme sans précédent se développe actuellement en France contre les Roms. On se rend compte à travers ce dérapage révoltant qu’elle touche également très largement la police.

    Philippe Alain

    Voir son blog sur Mediapart

    Photo Une : (cc) Philippe Leroyer/flickr

    Via Bastamag

    Benji

    12 Commentaires

    1. Pourquoi tu avais hésité à le mettre ? o_o

      On va pas faire de généralité, on est rodé :p

      Tout le monde le sais qu’il y a aussi des salopards chez la police, chez les gendarmes et bien entendu chez les CRS, car évacuer un camp, ça, toute les forces de l’ordre peuvent le faire, mais le faire violalemment et avec sadisme, faut être déjà une merde à la base, on le devient pas sous les ordres de la hiérarchie.

    2. Ce qu’il faut préciser c’est que bien souvent ils sont utilisés.

      On les fait s’installer à un endroit précis sur des terrains vagues ou dans des immeubles décrépits.
      Leur présence fait chutter les prix, des promoteurs achètent les terrains et aussitôt la police les dégage alors qu’on les a laissé tranquilles pendant des mois.

      Je parie que dans peu de temps ces squats vont être rasés et qu’il va pousser des grands projets immobiliers.

      C’est ce qui se passe à St Herblain dans la banlieue de Nantes gérée par Nantes métropole dont Ayrault était le président il y a encore 9 mois.

      Le procédé existe également dans Paris mais ce sont les dealers qui sont utilisés de la même façon.

    3. de triste mémoire la gestapo de lyon a fait des ravages avec la police francaise 1941 a 1944 et là c’est un bis , sur fond de crise et haine de l’autre … c’est vraiment un monde de Merde .

    4. Et ben heureusement que le PS a été élu… qd je pense qu’on a failli avoir une droite raciste au pouvoir!

    5. la question que je me pose c’est a quel moment les crs et policier vont se rendre compte qu’ils sont sur le siège ejectable? il leur faudra peut etre le temps de ne plus percevoir leur salaire pendant quelques mois?
      en tout cas je reste persuadé qu’en interne y’en a qui doivent commencer à grgner severe de toujours faire le sale boulot. je reste persuader que beaucoup s’indigneront et finiront dans la rue avec les militants. derriere les armures, les armes et les insignes il y a des etre humains non?

    6. petit ra du ps quand a la politique de sarkozyv envers les romes (on ne peut que constater l’inhumanité et l’inefficacité de cette politique d’expulsions massives et de destruction systématique des campements, qui ruine les efforts d’insertion, d’accès à la santé et à la scolarisation menées par les collectivités sans aucun soutien de l’Etat.

    7. Effort d’insertion… vous avez dit effort d’insertion… bizarre ça…

    8. Ce sujet m’offre l’occasion de vous parler en quelques mots d’un film : “Les fils du vent” de Bruno Le Jean sorti fin 2012.
      Sensible portrait de quatre Manouches guitaristes de jazz qui racontent leur quotidien avec gaité, humour, pudeur.
      Ce film esthétique m’est apparu comme un hymne authentique des peuples tziganes, gitans, manouches, roms, bohémiens à la tolérance, à la solidarité, à la musique, à la liberté.
      Allez le voir et vous me direz 🙂

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