Notre poison quotidien! (mis à jour)

On en a parlé sur le forum principalement, notre alimentation en général est pratiquement impropre à la consommation suivant le point de vue, saturation en tout et n’importe quoi, jusqu’à l’huile de vidange, de plus en plus de français n’ont plus les moyens de s’alimenter correctement, les produits dit “bios” devenant hors de portée du porte-feuille moyen. Les alternatives quand à elles sont plus que désastreuses, il n’y a qu’à regarder les étiquettes, huile de palme, graisses hydrogénées, conservateurs, OGM, colorants, exhausteurs de gout, sans parler du reste, il y a trop à dire…

Après certains peuvent s’étonner que je n’ai plus aucune confiance au système, mais les agences de sécurité alimentaire elles-même laissent passer cela sans rien dire, une raison précise? Je n’ose donner mon avis sur le sujet…

Jeudi, le Fipa accueillait en avant-première mondiale le dernier opus de Marie-Monique Robin, un documentaire qui tire la sonnette d’alarme sur le danger des additifs alimentaires et les dysfonctionnement des autorités de régulation. Diffusé en mars prochain sur Arte, fruit d’une enquête de 2 ans, “Notre poison quotidien”, comme la réalisatrice des “Escadrons de la mort” ou du “Monde selon Monsanto” nous en a donné l’habitude, devrait faire énormément parler de lui.

Notre poison quotidien débute par une séquence de film délicieusement rétro (1). Images en noir et blanc, voix légèrement nasillarde, décor sixties. Nicolas, sa femme et ses deux enfants sont attablés devant un déjeuner qui passe mal. Nicolas est soucieux. Et, on le comprend.

C’était il y a près de cinquante ans. Colorisez le film, ne changez pas une ligne aux interrogations de Nicolas. C’est aujourd’hui. Quand ces images ont été tournées, Marie-Monique Robin avait 4 ans. Depuis, la petite fille a grandi. Elle est devenue une réalisatrice reconnue dont les documentaires interrogent la société et ébranlent les pouvoirs établis. Le Monde selon Monsanto, c’était elle. Escadrons de la mort : l’école française, Les Pirates du vivant ou Torture made in USA, toujours elle. Aujourd’hui, elle revient avec Notre poison quotidien, un film dont on n’a pas fini de parler, présenté jeudi 27 au Fipa en avant-première mondiale. La réalisatrice y reprend les interrogations de Nicolas et mène sa propre enquête sur toutes les questions qui, depuis des années, travaillent nos sociétés. Quels sont les effets à long terme des produits chimiques utilisés dans la chaîne alimentaire, du champ du paysan à l’assiette du consommateur ? Les autorités qui en réglementent l’utilisation sont-elles fiables et indépendantes de l’industrie? Y a-t-il un lien entre ces produits chimiques et la progression importante dans les pays développés, de certaines maladies neurologiques (Parkinson et Alzheimer), du cancer ou des dysfonctionnements de la reproduction ?

Au terme d’une enquête de deux ans, Marie-Monique Robin nous livre des réponses claires, sans équivoque et peu réjouissantes. Un documentaire alarmant c’est vrai, mais il n’est plus temps de finasser et puis, comme elle le dit elle-même : « Savoir, c’est pouvoir. »Notre poison quotidien sera diffusé le mardi 15 mars à 20h40 sur Arte. En attendant, Marie-Monique Robin s’est extrait un moment du livre qui accompagnera le film pour nous parler de Notre poison quotidien. Entretien.

Comment vous est venu l’idée de mener cette enquête ?
Marie-Monique Robin : Lorsque je travaillais sur mon précédent documentaire, Le Monde selon Monsanto, trois questions me venaient régulièrement à l’esprit : d’autres entreprises produisant des substances chimiques avaient-elles, comme Monsanto, menti et caché ou manipulé des données ? Deux : comment sont testés et réglementés les produits mis sur le marché ? Trois, y a-t-il un lien entre l’exposition à ces produits et les maladies chroniques et neurodégénératives qui sont en pleine explosion dans les pays développés, au point que l’Organisation mondiale de la santé parle elle-même d’« épidémie ».

Prenons le cas des pesticides utilisés dans l’agriculture. Leurs fabricants nient toujours tout lien entre les maladies que vous évoquez et l’exposition à ces produits ?

C’est tout simplement faux. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que, chaque année, un à trois millions de personnes sont victimes d’une intoxication aiguë par les pesticides, et plus de 200 000 en meurent. Dans mon film, je montre que l’exposition chronique à des doses faibles mais répétées dans le temps de pesticides a provoqué des maladies chroniques chez les agriculteurs. Elles ont mis très longtemps à être reconnues, mais elles le sont enfin dans certains pays. En France, la Mutualité sociale agricole (MSA) a fini par accorder le statut de maladie professionnelle à une trentaine d’agriculteurs, dont dix pour la maladie de Parkinson. Qui devons nous croire, la MSA ou l’industrie chimique ?

Vous remettez en cause la notion de Dose journalière admissible (DJA), qui est un des fondements de toute la réglementation des produits chimiques dans l’alimentation. Comment en êtes-vous arrivée là ?
Le système actuellement en vigueur a été élaboré à la fin des années 50. Il repose sur ce qu’on appelle la DJA, c’est-à-dire la quantité d’additifs alimentaires qui peut être ingérée quotidiennement et pendant toute une vie sans aucun risque. L’initiateur de la DJA est le toxicologue français René Truhaut. La création de la DJA part d’une bonne intention, celle de limiter les risques de l’utilisation des produits chimiques – qui, rappelons-le sont des poisons – dans la chaîne alimentaire. Pour établir cette DJA, on est parti du principe de Paracelse (médecin suisse du XVIe siècle) : la dose, c’est le poison. Autrement dit, à de très faibles doses, les substances chimiques sont inoffensives. Or, ce que j’ai pu constater dans mon enquête, c’est que la plupart des DJA ont été calculées sur la base d’études fournies par l’industrie chimique elle-même. Mais, comme Monsanto, beaucoup d’entreprises de ce secteur mentent et trichent. Les DJA sont donc largement suspectes, car calculées sur la base de données fournies par des entreprises dont la principale préoccupation n’est pas la santé du consommateur mais la recherche du profit.

Par ailleurs, ce principe de « la dose fait le poison » est devenu un dogme intangible de l’évaluation toxicologique, alors même qu’on sait aujourd’hui qu’il n’est pas valide pour toutes les substances. Certaines d’entre elles, comme celles qu’on appelle les « perturbateurs endocriniens », peuvent agir sur l’organisme à des doses très faibles. Des centaines d’études ont par exemple prouvé que le Bisphénol A pouvait avoir des effets à des doses infimes, parfois 5 000 fois inférieures à la DJA qui lui a été attribuée.

Enfin, chaque substance s’est vu attribuer une DJA individuellement. Or, il faut savoir que 100 000 produits chimiques sont apparus depuis la seconde guerre mondiale et qu’on n’a jamais évalué les conséquences de ces produits lorsqu’ils sont mélangés, ce que l’on nomme “l’effet cocktail”. Aujourd’hui, il y a du poison partout, qui rentre dans la nourriture, et on essaie simplement de faire en sorte que les gens ne tombent pas raides morts tout de suite!

Vous n’accordez aucune confiance aux agences de règlementation comme la Food and drug administration (FDA) aux Etats-Unis ou l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) en Europe, qui contrôlent la mise en circulation des produits sur le marché ?

Je ne leur fais effectivement pas confiance, et je pense que le système de règlementation mis en place est totalement inopérant et ne nous protège pas. Je veux bien accorder à certains de leurs experts le crédit de faire ce qu’ils peuvent mais, hors micro, ils reconnaissent eux-mêmes que leur action est très limitée. En fait, le principal problème des experts qui travaillent dans ces agences vient de leur proximité avec le monde de l’industrie. Les membres des comités sur les additifs alimentaires ou les plastiques alimentaires à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES) comme à l’EFSA, sont tous sous contrat avec les marchands d’additifs alimentaires ou de plastiques. Tous.

Dans mon film, je raconte l’histoire de Dominique Parent-Massin, car elle est emblématique de ces conflits d’intérêt. Elle a présidé pendant des années le comité des additifs alimentaires à l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et a toujours affirmé que l’aspartame ne présentait aucun danger. Comment aurait pu elle prétendre le contraire ? Elle travaille pour Ajinomoto, premier fabricant d’aspartame au monde, et pour Coca Cola, qui en est le premier utilisateur.

Comme la quasi-totalité des experts travaillent désormais pour l’industrie, j’admets qu’il soit difficile d’en trouver des indépendants. Mais qu’au moins ces conflits d’intérêts soient publics et ainsi connus de tous. Et tout aussi important, que les décisions prises par ces autorités de régulation soient totalement transparentes. Le système actuel ne peut plus continuer, il est fait pour protéger l’industrie, pas le consommateur.

Qui devrait aujourd’hui repenser le système de réglementation des substances chimiques dans l’alimentation si ce ne sont pas les autorités de régulation ?

L’Union européenne a mis au point le programme REACH [un système intégré d’enregistrement, d’évaluation, d’autorisation et de restrictions des substances chimiques, NDLR], qui me semble aller dans le bon sens. L’idée est d’inverser la charge de la preuve, de demander aux industriels de prouver que les produits qu’ils veulent mettre sur le marché ne sont pas toxiques. Et de le faire sur la base d’un processus de validation beaucoup plus transparent qu’aujourd’hui. Le principe de REACH est également de ne pas attendre ce qu’on appelle aux Etats-Unis, « The dead body count method » (la méthode qui consiste à compter les morts à la morgue), pour intervenir. Autrement dit, ne pas attendre trente ans pour évaluer l’éventuelle toxicité d’un produit en comptant les morts et les malades. Il ne s’agit de rien d’autre que d’appliquer le principe de précaution tel qu’il est prévu dans les constitutions françaises et européennes. Si des études expérimentales faites chez les animaux, ou in vitro, montrent l’éventuelle toxicité d’un produit sur le marché, on ne tergiverse pas, on l’interdit purement et simplement.

Quelle serait la première mesure à prendre pour diminuer la toxicité des aliments que nous mangeons ?
Sur la base d’études expérimentales réalisées sur des animaux, nous savons que de très nombreux produits ont des effets potentiellement cancérigènes, neurotoxiques ou « obésogènes ». Une liste de ces produits a été établie par de nombreuses associations et ONG et par le Parlement européen lui-même. Il faut se débarrasser immédiatement de tous ces produits.

Dans votre film, vous dénoncez les effets nocifs de l’aspartame et du bisphénol A. Etes-vous favorable à leur retrait total du marché ?
Evidemment. Le principe de précaution nous commande d’agir dès que nous sommes en possession de données partielles et c’est très largement le cas pour ces deux molécules. L’aspartame, que l’on retrouve dans au moins 6 000 produits de consommation courante, est un cas exemplaire. Il ne sert à rien et à personne, pas plus aux obèses qu’aux diabétiques, comme on nous a abusivement laisser croire. Qu’est-ce que ce produit fait encore sur le marché après toutes les études qui prouvent sa nocivité depuis au moins trente ans ? Quant au bisphénol A, n’en parlons pas. Lui aussi est inutile. La preuve, quand le Canada puis la France ont interdit l’usage des biberons au bisphénol A, ils ont immédiatement été remplacés par un autre produit.

Que faire pour échapper à notre poison quotidien ?

Nous n’avons pas le choix, il faut encourager l’agriculture biologique, manger bio, cuisiner des produits frais, éviter au maximum les plats préparés vendus dans les supermarchés et introduire dans son alimentation des produits simples comme le curcumin, qui sont des anti-inflammatoires naturels corrigeant les défauts et excès de la malbouffe.

Source et vidéo sur telerama.fr

Je complète cette entrevue avec un billet de Laurent Chambon qui est docteur en sciences politiques, spécialiste des minorités en politique et dans les médias, ancien élu local travailliste à Amsterdam et chercheur en sciences politiques, et est co-fondateur de Minorités.

 

À chaque fois que je rentre dans la banlieue où j’ai grandi, dans le neuf-un, je suis frappé par plusieurs choses: (1) tout est bien propre avec des fleurs partout malgré les voitures qui brûlent, (2) les zones commerciales à l’américaine (des magasins/entrepôts construits à la va-vite autour d’un parking) remplacent les dernières forêts, (3) on voit que les gens ont de moins en moins d’argent et les supermarchés ont supprimé les produits les plus luxueux au profit des gammes premier prix, (4) la laideur commerciale et l’indigence des publicités omniprésentes sont d’une violence extrême et (5) il y a plein de gens vraiment très gros partout. Plus que gros. Carrément obèses, en fait.

Il y a quatre ans, j’avais été mixer mon premier disque à Detroit. Là-bas, la laideur structurelle de la ville et l’obésité des gens faisaient partie de l’exotisme. Mais chez moi, dans le neuf-un, la violence de cette pauvreté culturelle et visuelle mélangée à l’épidémie d’obésité m’a énormément choqué. Je ruminais ma déception quand je suis tombé sur plusieurs livres et articles sur la nourriture, l’obésité, les classes sociales et la révolution verte. Comme d’habitude, il faut savoir séparer le bon grain de l’ivraie, même si ce n’est pas facile.

Une des théories en vogue dans le Nord de l’Europe est que l’obésité est une maladie mentale. Ce serait une sorte d’anorexie à l’envers, mixée à des comportements d’addiction, de faiblesse morale et de dérèglements comportementaux. Au lieu de laisser les laboratoires nous mener en bateau et nous concocter des pilules magiques qui font maigrir sans aucun effet secondaire, les médecins et psychologues se voient en grands prêtres du contrôle de soi, à mettre en place des thérapies pour empêcher les gens de se bâfrer comme des cochons.

Un truc de paresseux

C’est vrai que je me sens mal à l’aise quand je vois à Amsterdam ces touristes américaines obèses qui se remplissent de mégamenus XL de frites, de hamburgers et de wraps (contenant au moins une demi-feuille de laitue) mais qui font une crise d’asthme si la serveuse leur sert un coca normal au lieu du coca light qu’elles ont demandé.

Voir des obèses manger trop, c’est presque aussi insoutenable que ces publicités pour les fondations de protection des animaux où ils vous montrent des chiots malheureux dans des cages. Il y a quelque chose d’obscène dans ce gavage d’obèses.

Cependant, même si on a envie de crier que ces Américains sont obèses parce qu’ils sont paresseux et gourmands, je me demande s’il y a là une explication valable. Car qui connaît les États-Unis sait que plus on est pauvre, plus on est soit super maigre, soit super gros. Les corps des Américains signent leur appartenance à une classe sociale, bien avant leur accent ou leurs vêtements. Les riches ont des corps athlétiques et des dents parfaites, les pauvres n’ont ni l’un ni l’autre, et la classe moyenne essaye de limiter les dégâts pour ne pas trop ressembler aux pauvres.

Quand on sait à quel point la méritocratie américaine est un mythe, et que la richesse comme la pauvreté sont avant tout hérités, on se dit qu’il doit y avoir autre chose que la volonté personnelle qui fait que les riches sont beaux et les pauvres sont moches. Donc l’idée que les gros le sont parce qu’ils sont paresseux, aussi évident que cela paraisse, ça me paraît quand même très douteux.

Les psy ont beau essayer de nous vendre leur thérapie anti-morfales, je n’y crois pas.

Un truc de classe

Un des bouquins essentiels de la décennie dont j’ai déjà parlé dans la Revue n°10 de Minorités est The Spirit Level, Why More Equal Societies Almost Always Do Better de Richard Wilkinson et Kate Picket. On y découvre un lien statistique direct entre les maladies et les inégalités. Pour résumer rapidement, plus une société est inégale, plus les gens sont gros, dépressifs et violents. Plus une société est égalitaire, plus ses membres contrôlent leur propre vie : moins de criminalité, moins de violences, moins d’adolescentes enceintes, moins de viols, moins d’obésité, moins de maladies, moins d’extrême-droite…

Notre couple de sociologues anglais avoue cependant ne pas pouvoir vraiment expliquer dans les détails comment cela est possible: tout montre que les inégalités sont un facteur de stress individuel et collectif qui a des conséquences dramatiques, mais ils ne parviennent pas vraiment à mettre la main sur des articles scientifiques qui expliqueraient pourquoi vivre dans une société inégalitaire produit de l’obésité.

Finalement, je suis tombé sur un article de chercheurs, repris ensuite dans Slate, qui ont réussi à démontrer quelque chose de vraiment intéressant: l’obésité n’a pas de lien direct prouvable avec la quantité de nourriture ingérée, et elle n’est pas la cause de toutes les maladies en général associées à un important surpoids. L’obésité est en fait un symptôme d’empoisonnement alimentaire.

Pour résumer, le corps humain se protège de la nourriture de merde en stockant les éléments qu’il ne sait pas dégrader ou transformer à l’extérieur du corps, dans la couche de gras externe. Plus on mange de la merde, plus on se retrouve à dégouliner de gras sur le ventre, les seins et les fesses. Et puis, au bout d’un dizaine d’années, quand le corps n’arrive plus à se défendre et n’arrive plus à stocker toutes ces horreurs dans le gras externe, les organes internes sont touchés, et les maladies associées à l’obésité se font sentir.

Nation malbouffe

Dans Fast Food Nation, un livre très bien fait que j’avais dévoré en une traite, Eric Schlosser explique comment l’industrialisation de l’alimentation américaine est allée de pair avec une économie de bas salaires, d’un prolétariat ultra mobile et corvéable à merci, et la construction d’une Amérique inégalitaire où les infrastructures payées par tous sont au service des intérêts de quelques industriels.

Il raconte l’exploitation des adolescents par les chaînes d’alimentation rapide, l’indigence des contrôles d’hygiène, la très très mauvaise qualité des ingrédients utilisés par l’industrie alimentaire, la cruauté envers les animaux et les travailleurs sans papiers (dont les restes peuvent se mélanger dans votre hamburger), mais aussi le mensonge généralisé.

Le premier mensonge est celui de la composition des produits vendus: gras de très mauvaise qualité, graisses trans (désormais interdites dans certains États ou villes), bas morceaux, additifs en tous genre. Le plus frappant est celui de l’odeur et du goût: pour cacher que nous bouffons littéralement de la merde, la viande est dotée d’un parfum « viande bien saisie sur le barbeque», les frites pré-cuites sont parfumées aux bonnes-frites-qui-n’existent-plus, la mayonnaise est parfumée au fromage et la bouillie de restes de poulets passés à la centrifugeuse pour augmenter la quantité d’eau est, elle aussi, parfumée au poulet.

Quand à l’umami, ce cinquième goût découvert par les Japonais, celui qui nous fait adorer le poulet frit ou la viande bien saisie, il ne doit rien aux ingrédients ou à la cuisson: il vient d’additifs chimiques destinés à tromper votre palais.

Non seulement on nous vend de la merde dans des jolis emballages, mais on trompe notre instinct et notre odorat.

Une histoire qui traîne beaucoup sur le net et dans les journaux est celle de cette américaine qui a laissé traîner dehors un Happy Meal™, ce menu concocté avec amour par McDonald pour les enfants, juste pour voir. Ignoré par les champignons, les bactéries et les insectes, il n’avait pas bougé un an après. Si même les bactéries et les champignons n’en viennent pas à bout, et que les mouches (qui ne sont pas connues pour être de fines bouches) s’en désintéressent, comment peut-on imaginer que notre corps puisse le dégrader pour y trouver les éléments dont il a besoin? Je sais que ça a refroidi beaucoup de parents autour de moi qui ont lu cette histoire.

Empoisonnement collectif planifié

Il suffit de se promener dans n’importe quel supermarché américain, néerlandais ou britannique pour réaliser à quel point la bouffe industrielle domine: il est presque impossible de se concocter un repas avec des produits non transformés exempts d’additifs destinés à tromper vos sens. Manger sainement demande des ressources pécuniaires et organisationnelles que les pauvres ne peuvent pas se permettre.

Cette évolution, on la retrouve désormais dans ma banlieue d’origine: les magasins de primeurs ont fermé depuis longtemps, remplacés par des boutiques télécom, les supermarchés font de plus en plus de place pour les plats préparés par l’industrie alimentaire (avec des marges très intéressantes) au détriment des produits frais non transformés (dont la marge est bien moindre). Vendre un poireau à quelques dizaines de centimes pour faire une soupe rapporte énormément moins que vendre un litre de soupe à plusieurs euros, surtout quand elle consiste surtout en de l’amidon, des exhausteurs de goût, des gras de mauvaise qualité et du sel.

Tout à coup, les statistiques des sociologues commencent à faire sens: les sociétés inégalitaires (États-Unis et Royaume-Uni en tête) sont celles où la pauvreté est la plus violente, mais aussi où l’industrie alimentaire a le plus développé d’alimentation à bas prix pour satisfaire les besoins caloriques des plus pauvres. Car leur revenu disponible y est aussi bien moindre que dans les société plus égalitaires.

Les pays européens qui suivent cette pente facile de l’inégalité sont aussi ceux qui sont les plus touchés par l’industrialisation de l’alimentation, réponse économique à la baisse des salaires réels et la violence organisationnelle qui est exercée sur les familles. Dans une société où les gens n’ont plus beaucoup l’occasion de manger ensemble parce qu’on leur demande d’être flexibles tout en les payant moins, la malbouffe industrielle est une réponse normale.

Manger bouger point FR

Alors quand je vois ces campagnes gouvernementales « manger bouger » après des publicités pour de la malbouffe à la télé, je commence à voir rouge. On laisse les classes moyennes se paupériser, on transforme leurs villes en centres commerciaux vulgaires uniquement accessibles en voiture où la seule nourriture possible est de la merde parfumée, et on nous dit qu’il faut bouger sinon on va tous être gros.

Maintenant qu’on sait que nos corps deviennent obèses parce qu’on nous fait ingérer des produits toxiques, et qu’on mange de la merde car c’est l’organisation optimale si on veut maximiser les profits de quelques uns tout en maintenant les salaires  des autres aussi bas que possible sans que les gens aient faim, ça ne vous fait pas tout drôle d’entendre dire partout que si vous bougiez un peu votre cul vous seriez moins gros?

Ce qui m’énerve encore plus, c’est qu’on sait désormais que le modèle américain de développement est une catastrophe: une nature à bout de souffle, des villes laides où l’on vit mal, des classes moyennes paupérisées qui sont obligées de vivre à crédit parce que travailler ne nourrit plus son homme, et un quasi-monopole de l’alimentation industrielle qui a conduit à une obésité pandémique et une morbidité inconnue jusque là, même chez les enfants.

Donc on sait. Mais rien n’est fait, on continue comme ça.

Tout va bien, le pays se modernise. Vous reprendrez bien un peu notre merde parfumée?

Mais n’oubliez pas de vous bouger le cul, bande de gros paresseux.

Benji

Les commentaires sont clos.